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Demain l'Afrique?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

Après la France-Afrique , la Chine-Afrique?
                           Hold-up économique ou partenariat prometteur?
     Depuis des années, Pékin s'intéresse à certains pays africains et trace là-bas un chemin inattendu.
        D'une toute autre manière que les coloniaux d'autrefois.
           Mais pas de manière "désintéressée". Habilement.

       Obstinément mais souvent à bas bruit, la Chine avance ses pions, dans le plus vaste projet de voies nouvelles pour ses exportations, dans le cadre des nouvelles routes de la soie à plusieurs tracés.
...Des projets d’infrastructures comme le chemin de fer vers le Ghana. CHEC négocie actuellement un prêt avec l’Eximbank chinoise pour la construction de l’autoroute Ouagadougou-Bobo Dioulasso (1,3 milliard de dollars). 
     Déjà des têtes de pont sont établies et sécurisées, à la corne de l'Afrique notamment, et des ports aménagés. A grands renforts de créations d'infrastructures routières, hospitalières, etc...
    La création en l’an 2000 du « Forum de la coopération sino-africaine » a servi de plate-forme stratégique institutionnelle pour le renforcement des échanges bilatéraux, de la communication et de la coopération entre la Chine et l’Afrique
    Une opération de charme qu'on n'arrête plus, à l'aide de prêts avantageux et d'avantages matériels, de promesses en apparence réalistes. .
    Une démarche gagnant-gagnant? C'est tout le problème à terme.
       Si l'on croit les engagements verbaux de Xi Jinping en personne, tout baigne, l'avenir s'annonce radieux. Pas d'arrière-pensées politiques, ni de pressions quelconques. Juste des incitations.
     « Nous poursuivons toujours la pratique des “cinq non” dans nos relations avec l’Afrique, à savoir ne pas s’ingérer dans la recherche par les pays africains d’une voie de développement adaptée à leurs conditions nationales, ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures africaines, ne pas imposer notre volonté à l’Afrique, ne pas assortir nos aides à l’Afrique de conditions politiques quelconques, et ne pas poursuivre des intérêts politiques égoïstes dans notre coopération en matière d’investissement et de financement avec l’Afrique. Nous espérons que les autres pays pourront aussi se conformer à ce principe des “cinq non” dans le traitement des affaires liées à l’Afrique. »
   La Chine-Afrique sera donc, à ses dires, un modèle de coopération. Sans immixtion, c'est juré.
      Une coopération très intéressée bien sûr. L'Afrique est largement sous-exploitée et représente un immense marché potentiel.. Un pays immense comme le Congo pourrait être riche. Les matières premières abondent: le pétrole bien sûr, mais aussi et surtout les terres rares, décisives pour l'avenir, dont la Chine s'est déjà accaparé la production et le traitement à 90 %.
     Comme d'habitude, Pékin voit loin. Et, comme dit un proverbe de ce pays, plus on prend de la hauteur, plus on voit loin...
   Dans un continent qui a plus d'une raison de se détourner des anciens (et parfois durables) colonisateurs. Même à Madagascar.
   Du Sénégal au Rwanda, on vient préparer le terrain, pour décoller ou sortir du marasme.
        Avec certaines conditions tout de même.
    De grandes transformations économico-politiques en vue, dans la cadre de nouvelles formes de mondialisation. Sans aucun doute.
   La Chine sait ce qu'elle veut et s'en donne les moyens.
 Dans ce nouveau cadre en gestation, l'Afrique va-t-elle en profiter pleinement?
     On en parle et on peut le penser, malgré les arrière-pensées de la Chine.
                 La feuille de route sera appliquée...sauf accident.
     Le sujet n'a pas fini de faire la une de l'actualité, car c'est peut-être un aspect nouveau de l'histoire du monde qui se joue sans doute là-bas, malgré les incertitudes chinoises et l'immensité des projets.
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Point d'histoire

Publié le par Jean-Etienne ZEN

  Nazis après-guerre [notes de lectures]

         Dénazifier: une mission ambiguë, inachevée et presque impossible

              Il a fallu du temps pour que les faits soient mis à jour. Exsangue, l'Allemagne d'après-guerre, subissant l'occupation des vainqueurs, mis du temps à se relever et à remettre sur pied une économie qui allait reprendre un rythme accéléré, le plan Marschall ayant été déterminant pour donner au pays les impulsions nécessaires.

 

           Très tôt une politique de dénazification fut instaurée dans la partie Ouest, mais fut inégalement menée selon les responsables des pays occupants, les lieux et les périodes.  Beaucoup de hauts responsables du régime de la dictature furent exfiltrés à l'aide de réseaux de solidarité et avec l'aide de pays où ils trouvèrent refuge. Le Vatican ne fut pas en reste.   Seule l'Autriche échappa au filet des instances chargées de la dénazification.                     Mais la RFA constituée manifesta beaucoup de réticences à faire le ménage au sein de sa propre population, même au sein des responsables de la haute administration: "...Ces derniers sont d'autant plus ménagés par la justice que 90 % des magistrats et avocats en fonction dans les années d'après-guerre avaient servi sous le régime hitlérien. Les autorités font au contraire de la chasse aux communistes dans la fonction publique une priorité. Le Service fédéral de renseignement (BND), mis sur pied par l'ancien responsable du renseignement militaire allemand sur le front de l'Est, Reinhard Gehlen, recrute nombre d'anciens nazis grâce aux États-Unis qui leur reconnaissent un anticommunisme ardent. Tout l'appareil d’État de la RFA est concerné.                                                                                  Le groupe de recherche sur l'histoire du ministère de l'Intérieur établit qu'en 1961, la part des anciens membres du parti nazi parmi les cadres supérieurs atteignaient 67 %, contre moins de 10 % en RDA. Hans Globke, à l'origine des lois antisémites de Nuremberg, devient même le directeur de cabinet de Konrad Adenauer, le premier chancelier fédéral..."  qui fut appelé le "grand recycleur".                                                                       Une des conséquences de la chappe de plomb qui s'est abattue très vite sur le pays pour un bon moment. Une épuration qui a tourné court, qui fut un échec à bien des égards, le contexte politique de l'Europe favorisant bien des oublis, de complicités, bien des dénis. Du moins pour la première dénazification. à la nature à la fois complexe, diversifiée et ambiguë. La passé est mal passé et il reste encore bien des traces aujourd'hui de ce qui fut le drame absolu de l'Allemagne et de ses séquelles. L'oubli des véritables causes de l'aventure fascistes reste toujours un problème. ________________________________

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Erreurs d'aiguillage

Publié le par Jean-Etienne ZEN

(Il y a déjà trois ans...)

 

On y va                                                 (Points de vue)
      On ne sait pas trop où, mais on y va.
    Vers une libéralisation des transports de plus en plus poussée.
  Toute une histoire....La réforme, menée au pas de charge et à courte vue selon les exigences anciennes de Bruxelles, ne sera sans doute pas conforme à ce qui fut promis.

  Tout reste à construire ou à reconstruire au niveau des chemins de fer, trop longtemps délaissés.
       Mais l'esprit est donné, finalement sans grande surprise:
             ... Ce qui se passe (en effet) dans ce secteur n’est jamais qu’une déclinaison de ce que les politiques néolibérales produisent globalement sur l’État social : désengagement de l’État  – qu’il s’agisse de ses missions régaliennes d’aménagement du territoire par la fermeture programmée des petites lignes ferroviaires ; du manque d’investissement dans l’entretien du réseau ferré – ;  mise en place progressive de la concurrence ; transformation des entreprises publiques par le biais du new public management ; démantèlement des acquis sociaux par l’abandon du statut des cheminots et, enfin, transformation des usagers en « clients » par la marchandisation du service....
...La grande transformation de la SNCF directement imputable aux politiques de l’UE est son découpage par activités. C’est tout le sens de la directive 91/440 que d’avoir séparé l’exploitation du service de la gestion de l’infrastructure. Les règles de la concurrence européennes ont poussé cette logique en découpant chaque activité de l’entreprise – TGV, trains Corail, trains régionaux, trains de fret – au nom de la sacro-sainte concurrence libre et non faussée interdisant tout mouvement financier interne. En clair, les bénéfices du TGV ne peuvent plus venir compenser l’activité fret, déficitaire...
   Désormais, le service public ferroviaire est traité au prisme de l’efficience, de l’efficacité, de la performance économique. Il n’est plus le « service d’intérêt collectif qui fonde le lien social », selon la formule du juriste Léon Duguit, mais un service soumis à la logique de marché. Cette histoire est le fruit de la construction européenne, mais aussi de la transformation de la puissance publique, État comme collectivités, dont le rôle tend de plus en plus à se réduire à celui d’organisateur du marché. Elle s’est également faite par la dépolitisation du sujet en le noyant sous des enjeux techniques et financiers très complexes qui sont autant d’obstacles à l’émergence d’un débat citoyen. C’est cette évolution profonde, inscrite dans une temporalité longue – la libéralisation des transports est inscrite dans le Traité de Rome – mais accélérée avec l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, que j’ai tenté de mettre au jour....
...Il faut déjà rappeler que les transformations néolibérales des grandes entreprises publiques (SNCF, la Poste, France Telecom, etc.) se font avec l’aval de l’État, qui organise le marché et ses logiques. Dans le domaine des transports, on assiste du reste à une situation pour le moins ubuesque puisque l’État, via ses compagnies, en est réduit à faire exister un marché qui peinerait visiblement à exister sans lui. Je prends l’exemple dans mon livre de la concurrence dans les transports urbains, qui est vraiment frappante. Une bataille fait rage entre différents groupes publics : la RATP, via sa filiale RATP Dev, fait concurrence à Keolis, filiale de la SNCF, laquelle fait concurrence à Transdev, filiale de la Caisse des dépôts… 

      La conséquence « logique » de ce processus est de rendre au marché ce qui lui appartient, et donc d’organiser la privatisation de ces groupes. Les annonces récentes du gouvernement sur sa stratégie de privatisation de différents groupes publics, à l’instar d’Aéroports de Paris, de la Poste ou de la Française des Jeux, est là pour en témoigner....
           La désinformation et les données biaisées ont fait leur oeuvre, auprès d'une opinion peu motivée, car peu informée sur ce sujet complexe.
      Comme l’a écrit récemment l’éditorialiste Éric Le Boucher dans les Échos, "le train n’est rentable dans aucun pays » et, partout, même dans les pays les plus exemplaires pour ce mode de transport, comme en Suisse, au Danemark ou en Allemagne, il est largement subventionné..." (à des degrés divers)
            ...Un second argument, lié au précédent, qui circule dans les médias veut que la SNCF est très dépensière et peu efficace au regard de ce qu’elle coûte au pays. L’entreprise publique ne serait pas au standard des autres pays européens.
    Ce n’est pourtant pas ce que révèle le rapport publié en 2017 European Railway Performance Index (RPI) du cabinet international Boston Consulting Group, qui fait référence en matière de performance des transporteurs ferroviaires.    Ce rapport indique que la France se trouve dans le premier tiers des pays en matière de performance ferroviaire avec une note de 6/10, au même titre que la Suisse (7,2), le Danemark (6,8), la Finlande (6,6), l’Allemagne (6,1), l’Autriche (6,1) et la Suède (6)....
        La gouvernance par les nombres finit par lasser.
                      La finance sera finalement la grand gagnante du processus de privatisation...s'il va à son terme.
      A vouloir tuer le malade, on peut s'attendre à nombre de désillusions, comme au Royaume Uni, où l'Etat se voit dans l'obligation de revenir en force.
       Ce qui est sûr, c'est que le dossier est loin d'être clos.
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Inde en rébellion

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Terres et révoltes paysannes

                    Depuis des semaines, les paysans indiens ne cessent de défiler dans les rues de Dehli, de façon parfois véhémente, contre les forces déployées par le Gouvernement Modi.      De futures lois pour libéraliser l'agriculture sont en question. Avec pour toile de fond la contestation d'une tendance générale à la privatisation des terres, qui affecte d'autres parties du monde. De plus en plus, on assiste à l'achat de terre de la part d'Etats ou de groupes industriels, qui y cherchent de nouvelles sources de revenus. Les terres sont devenues un enjeu, aux dépends de la paysannerie traditionnelle.   Comme le souligne une étude d’Oxfam, «l’agriculture a toujours été considérée comme une entreprise risquée qui générait de faibles rendements. Cela a changé ces dernières années, et le système alimentaire en est venu à être considéré comme un secteur qui garantira la croissance à long terme» . (Il est révélateur que les investisseurs milliardaires des États-Unis se soient tournés vers l’achat de terres agricoles: le plus grand propriétaire individuel de terres agricoles aux États-Unis est maintenant Bill Gates, et Jeff Bezos, propriétaire d’Amazon, n’est pas loin sur la liste. Il sera pratiquement impossible de retracer les investissements que ces milliardaires auront pu faire dans d’autres régions plus pauvres, car ils auront été réalisés par l’intermédiaire de diverses sociétés écrans.)

__Dans le droit fil de ce changement d’intérêt des investisseurs mondiaux pour les terres agricoles du Tiers-Monde, la Banque mondiale a consacré son Rapport annuel sur le développement mondial 2008 (ci-après WDR 2008-World Development Report) à l’agriculture. Après plus de deux décennies d’interruption, les auteurs du WDR ont décidé «qu’il est temps de placer à nouveau l’agriculture au centre de l’agenda du développement, en tenant compte du contexte très différent des opportunités et des défis qui se sont fait jour….Cet «accaparement mondial des terres» a suscité de nombreuses critiques. Mais de tels accaparements de terres n’ont pas été tentés uniquement par des pays dépendant des importations alimentaires, comme l’Arabie saoudite ou la Corée du Sud, qui étaient en situation d’insécurité alimentaire.  Aujourd’hui, les transnationales de l’agroalimentaire et les investisseurs financiers géants des pays les plus riches du monde sont eux aussi à la recherche de terres. En effet, la croissance même de l’insécurité alimentaire leur a fait comprendre que les investissements couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur des denrées alimentaires, de la «ferme à l’assiette», pouvaient leur rapporter de riches dividendes dans un avenir par ailleurs incertain..."

 

             Aujourd'hui en Inde, les paysans ne désarment pas, toujours déterminés, contre la déréglementation de l'agriculture, contre les géants de l'agroalimentaire, que favorise le pouvoir en place.       Une manifestation qui dure, parfois rudement réprimée. Les enjeux sont d'importance ...                           "...Trois lois adoptées  par le gouvernement par le gouvernement de Narendra Modi sous le nom de Farms Bills, qui engagent une profonde libéralisation du secteur agricole. Elles ouvrent la possibilité aux agriculteurs d’acheter et vendre en dehors des marchés régulés par l’État, appelés mandis. Elles facilitent et assouplissent les contrats entre fermiers et acteurs privés. Elles retirent enfin céréales, légumineuses, huiles alimentaires et oignons de la liste des biens essentiels, qui encadrait les prix et volumes d’achats de ces denrées.  Objectif affiché : « libérer » le secteur agricole du carcan de l’État, attirer les investissements étrangers et permettre aux agriculteurs de dégager des revenus supplémentaires en ouvrant de nouveaux marchés. Mais ces derniers ne croient pas à ces belles promesses. Pour de nombreuses unions agricoles et défenseurs des paysans, le peu de régulations dont bénéficiaient les agriculteurs est simplement supprimé pour les livrer à la mainmise du marché...."   Tout cela malgré les imperfections du système antérieur et ses dérives.   Un mouvement de la plus haute importance, là où l'agriculture tient encore une place majeure dans l'économie de ce grand pays. _____________________

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La politique et son discours

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

 Ce que parler veut dire en politique   [ -Notes sur la crise du langage politique aujourd'hui-]
                                                           Le discours des hommes politiques n'échappe pas aux limites, aux dérapages et aux perversions éventuelles du discours commun. Seulement il  a une autre portée.
      Parler vrai, quand on a le pouvoir, n'est jamais sans conséquences sur la vie des hommes.
        France culture a diffusé hier matin un intéressant débat sur certains aspects de la crise du discours politique actuel. Sur les dégradations qui affectent aujourd'hui de plus en plus la communication publique: le culte de la « petite phrase » n'est pas neuf, certaines d'entre elles ont fait les beaux jours ou les sombres heures de personnalités politiques... l'ère contemporaine a ceci de particulier qu'il ne semble plus y avoir aucune limite, aucune censure, aucune barrière dans l'invective. Tout peut être dit, de la pire des comparaisons au raccourci des plus grossiers, pour exister sur la scène médiatique, suivant ainsi l'adage « peu importe que l'on parle de moi en mal ou en bien, tant que l'on parle de moi ».__L'horizon du débat public est-il à ce point gangrené par la culture de l'instant qu'il ne peut plus dépasser le stade de l'invective ? Ou cette tentation de l'invective permanente est-elle la survivance d'une séquence passée ? En attesterait la montée dans l'opinion publique de la côte de popularité de personnalités, de droite comme de gauche, qui tentent de soustraire à la perpétuelle surenchère des dérapages verbaux..
    Triste constat, quoique évidemment réducteur et incomplet. Mais il s'agit bien de tendances. Un langage qui ne prend plus guère de recul, rivé à l'instant, aux intérêts immédiats, aux effets de manche, au déficit d'analyse au profit de la valorisation de la personne, non pas de l'intérêt général. Les institutions sont parfois autant en cause que les personnes?
    Une communication politique en crise, déjà évoquée par les Anciens, théorisée par Machiavel, au service du seul pouvoir et de sa reproduction, 
    Mais la particularité aujourd'hui est que les mots sont souvent démonétisés, les situations d'urgence, les périodes de crise favorisant les promesses inconsidérées, les incantations. 
         A l'époque où la confiance est ébranlée, tout pouvoir est contesté, l'autorité ne va plus de soi, on assiste à une crise de la représentativité, une chance par certains côtés, mais aussi parfois un péril pour les démocraties.
Le pouvoir est contaminé par l'épuisement du discours , du sens. Tant que de nouveaux projets politiques forts ne se substituent pas à la marchandisation généralisée  et au relativisme libéral, escamotant les questions d'intérêt général et de vision à long terme.
   La perte de pouvoir réel, l'impuissance (relative) des décideurs, en période de mondialisation accélérée, de suprématie de la finance ne contribuent pas peu à cet affaissement, cette décrédibilisation.
     Dire la vérité au peuple, devient sans doute une exception, sur les grands problèmes. C'était pourtant le programme que s'était donné explicitement Pierre Mendès-France:
    Il affirmait : « L'intégrité dans la vie publique est au moins aussi nécessaire que dans la vie privée. » Persuadé, après Gambetta (discours au Théâtre du Château d'Eau le 20 octobre 1878), que « la République, c'est la forme qui emporte le fond », Pierre Mendès France causait parce qu'il avait quelque chose à dire. Trente ans plus tard, Laurent Fabius, premier ministre, convoquera le journaliste Jean Lanzi pour de petits speeches télévisuels, « Parlons France », qui ne seront que du sous-Mendès sur-déclamé : il n'aura rien à déclarer, ne se souciera que d'une forme sans fond, ce sera tragiquement nul. Mendès, dans son dernier ouvrage au titre si peu anodin, La vérité guidait leur pas (1976), avait vu juste : « L'usage de la télévision a entraîné une dégradation civique supplémentaire. Elle devait populariser, démocratiser la politique ; elle a, au contraire, reproduit sur une échelle plus vaste encore les défauts de l'ancien système. Le théâtre politique est plus ouvert mais plus faussé, plus falsifié, plus censuré que jamais. Il est plus que jamais un théâtre de vedettes. »
      C'est bien à une sorte de théâtralisation du discours politique à laquelle nous assistons trop souvent.
Les techniques du marketing contaminent le discours public. Claude Salmon est allé jusqu'à dire que l'homme d'Etat se présente comme un objet de consommation, vantant des idées et ses projets comme un commercial qui fait l'impasse sur le fond, la qualité.
  Le rapport entre les techniques politiques et celles du spectacle a souvent été noté et déploré. 
Priorité au paraître, imitation de certaines techniques la télé, complaisamment  convoquée, techniques de séduction à tout prix , d'agitation de  paillettes, quand ce n'est pas des procédés de bateleur, dont Berlusconi était passé maître.
   Le show politique se double d'un storytelling:d'une captation de l'attention à tous prix, inspirée des maîtres de la com, ou des spindoctors, à l'usage du citoyen voyeur passif, plus consommateur que citoyen. 
   Le divertissement tend à devenir le moyen absolu, comme a su le faire Georges Bush. Di-vertissement: une technique de détournement de l'attention, comme l'étymologie le suggère.
   La politique spectacle devient prioritaire. Napoléon y était passé maître.
Raison et vigilance citoyennes s'en trouvent affaiblies sinon annihilées. 
           Depuis Platon, critiquant dans son Gorgias l'instrumentalisation cynique du discours, rien n'a changé dans le fond, mais les méthodes sont tout autres. 
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Le facteur et le chronomètre

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Algorithme et rentabilité.   ____Du facteur à l'opérateur postal.

                     3 heures 43 minutes et 59 secondes...C'est le chiffre ubuesque de durée d'une tournée moyenne, fixé par ceux qui "pensent" dans leurs bureaux....                                       Où est passé le facteur qui prenait le temps de faire son métier, tout en n'oubliant pas de dire bonjour à ceux qui n'étaient pas encore des "clients" et de s'enquérir de la santé de tel ou tel. Je ne parle pas du facteur de Mr Tati ou de celui chanté par Y. Montand. Non plus celui de Dany Boon. Non, le facteur "normal". Celui qui dans les villages surtout avait une fonction sociale certaine, surtout pour les plus isolés.          __Aujourd'hui,  en voiture ou à vélo électrique, il file en regardant sa montre. Il ne connaît plus personne et parfois ne reste que quelques mois. Les stagiaires, les intérimaires se succèdent, inconnus de tous, ils ne connaissent que des n° de maisons.     On est passé du facteur (terme dépassé) à l'opérateur postal. Plus pressé et plus stressé que jamais. Un chronomètre dans la tête. Son secteur de distribution change régulièrement et il n'a pas moins de courrier, même si on écrit moins. Les produits publicitaires et les petits colis se sont multipliés.

 

         La poste n'est plus ce qu'elle était. Elle est passée du statut de service public( notion archaïque!) à une société anonyme chargé de vendre des produits rentables. Le prix du timbre s'est envolé. Il y a les nouveaux bureaux hi-tech où on est prié de faire soi-même une partie du travail et il y a la face cachée de la poste. Celle qui échappe à nos yeux.         "....Dans son dernier livreLe Caché de la Poste, le chercheur, qui a travaillé auparavant sur une ethnographie des beaux quartiers vus par des étudiants d’origine populaire ou sur l’emploi de travailleurs sans papiers dans le BTP, y raconte les difficultés croissantes auxquelles font face les facteurs.   Il observe surtout au plus près les mécanismes et les effets des « réorganisations » constantes que subissent les centres postaux : tous les 18 à 24 mois, la direction de l’entreprise publique impose de réduire le nombre de facteurs, et donc augmente le périmètre des tournées.      L’argument au cœur de cette logique paraît simple : en douze ans, le nombre d’« objets distribués » a été divisé par deux. Mais cette argumentation oublie de signaler que le nombre de boîtes aux lettres desservies augmente sans cesse, et que le nombre de recommandés et de petits colis distribués par les facteurs grimpe en flèche chaque année.  Sur notre plateau, le sociologue discute avec Brahim Ibrahimi, facteur, syndicaliste Sud PTT dans les Hauts-de-Seine et acteur de toutes les luttes à La Poste. Ensemble, ils dévoilent un autre secret de fabrication de La Poste : les calculs, en apparence scientifiques, grâce auxquels ont été établies les tournées des postiers pendant une quinzaine d’années se fondaient sur des chronométrages et des mesures… dont l’entreprise a perdu toute trace il y a des années...."                                                                      La Poste n'est pas le seul ci-devant service public qui ait subi une mutation. Un changement de statut contesté. Depuis l'ouverture du capital, selon l'expression pudique employée dans les années 90. Le risque de finir comme France-téléphone est envisagé ça et là.   "...La loi de régulation postale de mai 2005 a ouvert la porte à une dégradation sans précédent du service public postal. Le contrat de service public signé en juillet 2008 entre l’État et la Poste reprend les critères retenus dans cette loi. Le gouvernement a mis en place une stratégie de défaisance qui l’a amené à soutenir la dernière directive postale en 2007. Pour compenser la perte de monopole, il a pris des mesures d’économies qui ôteraient tout « handicap concurrentiel » à la Poste. Il faut que celle-ci se mesure aux autres entreprises du secteur ! Et la mission de relève, de traitement et d’acheminement du courrier est, jusqu’au 1er janvier 2011, financée par le monopole pour les plis de moins de 50 grammes. Le cahier des charges qui prévoit la réduction des délais d’attente, par exemple, est une garantie bien limitée ! Si la porte est déjà ouverte, l’introduction de capitaux privés, même minoritaire, conduirait immédiatement à imposer de façon plus radicale la logique de rentabilité : l’ensemble des activités sera jugée sur des critères de rentabilité capitaliste : comparaison avec d’autres entreprises privées, ratios de charges de personnels et d’investissements... L’entrée en Bourse constituerait un pas supplémentaire, les résultats économiques et financiers des entreprises étant regardés du point de vue du cours de l’action et de la capacité à produire du dividende. Cela a des implications sur les stratégies d’entreprises, les choix d’investissements, l’emploi, les conditions de travail… L’expérience montre que la délégation de service public est totalement inopérante avec les grandes firmes privées. L’eau est un bon exemple. Cela tient à ce que les pouvoirs publics locaux, et même nationaux, n’ont pas les moyens de contraindre ces firmes à agir selon un autre objectif que le leur : profit maximum le plus vite possible..." ____________________

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Modèles scolaires

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

    En France, on n'a pas de pétrole, mais on a des modèles.
                                                        Les idées, on va souvent les chercher ailleurs.
              Par paresse, par renoncement ou par mimétisme.
     L'obsession  de nos chefs d'Etat, c'est de trouver des recettes pour sortir des difficultés qu'ils ont eux-mêmes souvent créés.
   Après le modèle américain des années 70, vint le modèle japonais, puis le modèle allemand, qui a montré ses faiblesses et ses failles.
  Aujourd'hui, l'heure est au modèle danois, après le modèle suédois, présenté de manière biaisée et partielle.

 

   C'est vrai en matière de "gouvernance" économique, emprunté au monde anglo-saxon revu et corrigé par la tacherisme.
   Mais c'est aussi vrai en matière scolaire, chaque ministre ayant à coeur de laisser son nom à une réforme ou à une réformette.
      Sous prétexte de dépoussiérer le mammouth, on vide progressivement de sa substance un système qui, sous l'effet de la massification, demandait certes bien des adaptations, mais que beaucoup ne reconnaissent plus, tant il s'éloigne des missions fondamentales de l'école, qui est d'abord de former l'homme et le citoyen, avec un minimum d'exigence de culture, de maîtrise de la langue.
    Tout se passe comme si l'accent était mis sur une nouvelle ambition, et cela très précocément: préparer le plus tôt possible de futurs producteurs et d'excellents consommateurs
               Ce que l'on déplore chez nous est encore plus visible dans d'autres pays, qui ont pris à grande vitesse les voies indiquées par de nouveaux pédagogues, marquées par la permissivité, l'idéal d'auto-apprentissage, le recul de l'autorité légitime du maître, les exigences minimales exigées le plus souvent, le fameux "apprendre à apprendre"
   En même temps la privatisation va bon train, accompagnant et accentuant les inégalités.
     En Suède, par exemple, qui a engagé un vaste tournant libéral et que l'on veut mimer, après d'autres modes, qui vont et viennent.
   Le modèle scolaire suédois est très souvent vanté, mais c'est se fier à l'apparence et ne pas comprendre ce qui se joue dans le fond ainsi que les dérives en cours.
   Certes, l'élève est "au centre" du système" (comme on le répète chez nous comme un mantra); il est aussi roi, avec toutes les effets pervers de cette promotion. Les parents ont une autorité  sur un système en fait très contrôlé, malgré la libéralisation proclamée.
   Un marché scolaire trop concurrentiel commence à être remis en question là-bas, ainsi qu'une baisse de niveau.
   La communication devient prioritaire aux dépends des contenus et des matières que l'on sacrifie peu à peu. La France prend le même chemin.
   La ségrégation scolaire va de pair avec une privatisation de plus en plus poussée.
       Les qualités de "modèle" suédois ont aussi des revers, à cette échelle. Il est discuté au coeur même du pays et du monde enseignant, après s'être trop ouvert.
    Etant donnée l'extrême permissivité qui s'est mise en place sous le gouvernement libéral, certains se demandent si l'on est pas en train de former là-bas des "petits cons".
    C'est la fin d'un mythe, semble-t-il..
       La privatisation galopante de l'école s'imprègne des lois du marché. La recherche de la "satisfaction client" pousse à une inflation de bonnes notes , qui fausse tout le système, les parents demandant souvent aux enseignant de revoir leur copie. Un système qui tend à devenir à la carte. Il n'est pas étonnant que le métier d'enseignant, assez mal payé, ne séduise plus.
       L'obsession  de nos chefs d'Etat, c'est de trouver des modèles pour sortir des difficultés qu'ils ont eux-mêmes souvent contribué à créer.
  .
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Est-ce ainsi que les vaches vivent?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

La vache et le prisonnier.

                          Un système devenu fou. Le productivisme, dans certains secteurs agricoles, notamment dans la production laitière, en Bretagne plus qu'ailleurs, débouche sur des situations où, au nom de la concurrence, les prix bas imposés par les géants de la transformation laitière, la vie des éleveurs, pris dans une logique hautement productiviste, devient  une course en avant perpétuelle à la production effrénée, à la modernisation à tous prix, à l'endettement permanent, à la solitude et même souvent au désespoir.                         On s'interroge sur le nombre de suicides élevés dans le monde agricole. Une des raisons principales est l'absurdité de ce qui se passe en silence au coeur de nos système de production fermiers, devenus trop souvent des usines où le beau mot d'éleveur a perdu son sens...Souvent pointée du doigt, la souffrance au travail n'est pas seulement sur les chaînes de montage industriel. Les super-grands de l'industrie laitière et leur logique propre, surtout quand la PAC a disparu, font la pluie et le beau temps dans nos étables, jusque dans les détails. On connaît les méthodes de Lactalis en particulier, qui a défrayé plus d'une fois la chronique.          ___C'est le cercle vicieux de la course au gigantisme. Quelques centimes de plus par litre de lait et la tendance pourrait s'inverser. Pour l'instant, beaucoup d'éleveurs sont prisonniers...parfois désespérés, comme le montre le film ''Petit paysan"....Une logique infernale. Le capitalisme de papa est entré dans les fermes, où plutôt l'exploitation tend à devenir la règle dans nos exploitations. A bas bruit. Mais on fait mieux ailleurs!  ...Et si les vaches mangeaient de l'herbe?...

 

                 .".....Dans un gigantesque bâtiment de cinq mille mètres carrés, des centaines de vaches qui ne fouleront jamais l’herbe déambulent sous de grands ventilateurs-brumisateurs qui tournent silencieusement. À intervalles réguliers, de petits wagonnets parcourent le corps de ferme sur leurs rails, circulant d’un silo de stockage à l’autre, mélangeant les aliments et distribuant les rations. Dans l’étable, rebaptisée « stabulation », les vaches vont et viennent autour de quatre imposantes machines rouges. Ce sont des robots de traite. Attirées par une ration de granulés, elles viennent s’y placer à tout moment du jour et de la nuit, laissant les portes se refermer le long de leurs flancs. Le processus est entièrement automatisé : le robot commence par identifier la vache grâce à son collier électronique, puis il détecte l’emplacement de ses pis au moyen d’une caméra intégrée. Débarrassés de leurs saletés par un rouleau nettoyeur, ceux-ci sont ensuite scannés par un laser 3D rouge qui détermine la localisation des mamelles au millimètre près. La machine y place alors ses gobelets trayeurs : la traite peut commencer...      En ce mois de septembre 2020, une journée portes ouvertes est organisée à l’exploitation agricole des Moulins de Kerollet, à Arzal, dans le Morbihan. M. Erwan Garrec, éleveur laitier d’une quarantaine d’années, a fait une heure de route pour assister à cette démonstration du dernier robot de traite de la marque Lely, qui domine le marché. Investir dans un tel système, « c’est s’offrir les services d’un “employé modèle”, capable de traire vos vaches vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, pendant de nombreuses années », vante la brochure du groupe. « Ça vous dégage du temps et vous libère des contraintes liées à la traite », commente un vendeur du stand, avant de préciser : « À la moindre anomalie ou panne, vous recevez une alerte sur votre smartphone. » Grâce à son système de traite en continu, ce robot « permet d’augmenter facilement votre production de 10 à 15 % »....   M. Garrec n’a pas de smartphone, mais il rêve de la liberté qu’offrirait pareille technologie, lui qui s’occupe seul d’une grosse centaine de vaches laitières et travaille sans relâche plus de quinze heures par jour, trois cent soixante-cinq jours par an. Mais la liberté a un prix : s’offrir les services d’un de ces « employés modèles » impliquerait de débourser 150 000 euros, sans compter les 12 000 euros annuels de maintenance et les travaux d’aménagement à effectuer dans le bâtiment. Il faudrait de plus en changer tous les dix ans. Et, comme l’automate sature à partir d’une soixantaine de vaches, son exploitation en exigerait deux. Le vendeur le rassure : « Pour l’emprunt, on peut s’arranger. Le Crédit agricole encourage ses clients à se moderniser. Nous, on les connaît bien. »       Des emprunts, M. Garrec en a déjà contracté plusieurs. Pour son bâtiment, d’abord. Comme il a dû doubler le nombre de ses vaches afin de garantir la survie de son exploitation, il a fallu agrandir la ferme familiale, qui ne suffisait plus : une salle de traite plus vaste, un second silo pour stocker davantage de maïs. Et, comme il fallait plus de maïs, il a fallu doubler le nombre d’hectares destinés à en produire, et donc acquérir de nouveaux tracteurs..... M. Garrec produit aujourd’hui un million de litres de lait par an, soit trois fois plus que la moyenne des éleveurs laitiers français.    Une telle performance implique une course quotidienne contre la montre. Chaque matin, M. Garrec franchit en courant la centaine de mètres de pâturages qui séparent sa maison — construite sur l’une des parcelles de son exploitation — du bâtiment où se trouvent les vaches. Vêtu d’un bleu de travail, un seau à la main, il court encore, cette fois d’un bout à l’autre de sa stabulation de deux mille mètres carrés où flotte l’odeur nauséabonde du maïs ensilage (1). Ses gestes sont répétitifs et ajustés au centimètre près, pour économiser de précieuses secondes. Ce matin, il jette un coup d’œil rapide à sa montre et lance : « Ça va, on est dans les clous !....           « Grâce à cette alimentation, les vaches sont plus performantes », nous explique-t-il. Et puis, les faire pâturer s’avérerait chronophage, car elles sont nombreuses. Mais ce régime alimentaire coûte cher. Le maïs, qui vient de ses champs alentour, constitue son « plus gros poste de dépenses » : il nécessite des semences, des intrants, de l’irrigation et du travail agricole — externalisé par manque de temps.     Le maïs ensilage étant dépourvu de protéines, les rations distribuées aux vaches s’accompagnent de granulés de soja génétiquement modifié venu d’Amérique latine, ainsi que de minéraux et d’oligo-éléments en poudre.... Les vaches de M. Garrec sont des prim’Holstein, une race réputée pour être la plus productive du monde. « Le problème, c’est qu’elles sont fragiles. Il y a donc des frais de vétérinaire importants. » L’éleveur a cependant pu améliorer la productivité de son cheptel en recourant aux services de la coopérative d’insémination et de génétique animale Évolution. Son catalogue de plus d’une centaine de taureaux permet d’améliorer les performances des vaches, en adaptant par exemple leur morphologie (taille et hauteur de la mamelle, notamment) aux caractéristiques de la trayeuse. Cela n’empêche pas que 30 % du troupeau parte à l’abattoir chaque année en raison de mamelles non standards et de pis inadaptés. La proportion monterait à 50 % avec le calibrage du robot Lely Astronaut.    « On a un travail répétitif comme celui d’un ouvrier. Mais nous, on est notre propre patron. On prend des risques, on investit, on fait vivre et travailler plein de gens », développe M. Garrec en branchant inlassablement ses vaches aux trayeuses.... À vrai dire, c’est d’abord Lactalis, numéro un mondial des produits laitiers et treizième groupe agroalimentaire de la planète, que notre agriculteur fait vivre. « Là, je suis en train de produire le lait du mois de septembre, mais je ne sais pas encore à quel prix je le vendrai. » Car, dans la filière, c’est le client (ici Lactalis, mais il en va de même avec ses concurrents) qui fixe le prix et qui facture le produit, envoyant tous les mois au producteur sa « paye de lait ». Le contrat qui lie les deux parties ne fixe pas le prix, mais le nombre de litres qui doivent être produits.    Il est 1 heure du matin lorsque la course folle de M. Garrec prend fin. Après la traite du soir, il éteint la lumière du bâtiment et parcourt les pâturages en sens inverse, dans la nuit noire, guidé par la lumière de son téléphone, deux bouteilles de lait encore chaud à la main. Fourbu, il avale, avant de se coucher, un Nesquik dans lequel il a jeté de la semoule : « Ça prend cinq minutes. » Dans quelques heures, tout recommence.....                                      Selon M. Ronan Mahé, lui aussi éleveur, cette fragilité trouve également son principe dans le fait que, « depuis trente ans, le prix du lait n’a pas changé, et a même baissé ; pendant ce temps-là, tout a augmenté : aliments, matériel, charges, cotisations, mises aux normes, etc. ». Plus du quart des paysans vivent ainsi sous le seuil de pauvreté, avec des revenus souvent inférieurs au revenu de solidarité active (RSA). Ils sont la catégorie socioprofessionnelle la plus touchée par la misère. En 2017, près de 20 % d’entre eux ont déclaré un revenu nul, voire un déficit de leur exploitation....   Lactalis avait atteint 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2019, « avec un an d’avance sur ses objectifs ». Au cours de cette année « historique », le groupe a connu sa plus forte croissance, avec notamment neuf acquisitions. La fortune de M. Besnier a suivi la même progression, le hissant à la neuvième place du classement Challenges des personnes les plus riches de France (il est depuis redescendu à la onzième place). Lors d’une conférence de presse, il a également annoncé que le prix du lait allait encore baisser, « pour affronter les difficultés qui s’annoncent dans le secteur laitier » en raison de la pandémie de Covid-19 (3). « Il y a une course à la baisse entre les industriels, explique M. Le Bihan. Ils tirent les prix vers le bas pour dégager de la marge et rester concurrentiels. Lactalis, Sodiaal [première coopérative (4) laitière française] et les autres tiennent tous le même discours. »....                À la mi-septembre 2020, au moment même où M. Besnier savourait la réussite de Lactalis, « exemple presque parfait des succès du capitalisme familial à la française », lors de « son anniversaire, avec sa femme et ses trois enfants, en vacances à l’île de Ré (5) », M. Garrec nous confiait, assis à la table de son salon aux murs nus, face à la fenêtre par laquelle il voit passer ses vaches, qu’il rêvait de « fonder une famille ». Avant d’ajouter avec un soupçon d’angoisse dans la voix que, célibataire à 43 ans, il avait intérêt à ne plus traîner. Mais encore faudrait-il qu’il puisse « consacrer du temps » à sa famille, ce qui signifierait « soit prendre un employé, soit prendre un robot » — comme le Lely Astronaut dont il observait attentivement la démonstration quelques jours plus tôt. Or, dans les deux cas, cela impliquerait « de produire plus, pour compenser le coût ». Et donc de poursuivre sa course infernale contre le temps." ( Maëlle Mariette)  ____________________

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Passé compliqué

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

 Guerre picrocholo-orthographique? 
                                                     La Belgique entre en guerre... et y renonce.
          Elle passe vaillamment à l'offensive avant un repli prudent.
      Elle ne se battra pas seule sur le participe et ne participera plus tant que la francophonie ne bougera pas.
   Dur! l'accord qui divise et qui fait trembler les écoliers et même...les ministres!
       Les humiliations, ils en ont vécu(es) (?!)
               IL n'y a pas le choix, le singulier s'impose
  C'est comme ça. On appelle ça l'arbitraire de la langue. 


      L'orthographe dans sa forme actuelle, nous vient de...pas si loin.   Au 17° siècle, il fallait bien mettre de l'ordre dans le grand n'importe quoi des écrits divers et variés, même si Voltaire mis plus tardson grain de sel contestataire. 
     C'est la faute à Vaugelas, hélas! Il a fait ce qu'il a pu...
      Qu'en aurait pensé l'auteur (belge) de Bon usage de la langue française?
        Et qu' en dit Amélie Nothomb?
  Il manque l'avis de Jupiter sur le sujet et peut-être des décisions douloureuses (ou libératrices), qui ne nuiraient pas à Sa Grandeur.
   Depuis le temps qu'on parle de réformer l'orthographe...à la marge.
     Craindrait-on le risque de nivellement sur des points de détail, alors qu'on l'accepte sur l'ensemble des exigences scolaires?
  Le français est en souffrance, ça commence à se savoir...et à se voir
     Mais faut-il continuer à se battre pour l'accent circonflexe par exemple, sur le passé (pas si) simple, sur l'usage oublié du point-virgule? Par contre, la confusion de plus en plus fréquente aujourd'hui entre le futur et le conditionnel n'est pas sans conséquences cognitives. (Je pourrais vous en parler longtemps. Si j'ai le temps, je pourrai le faire demain...)
           Il faut se méfier du mythe du linguistiquement (trop) correct, mais on attend un nouveau Vaugelas qui mettrait un peu plus de raison dans la jungle orthographique et d'ordre dans les jeunes (ou moins jeunes) têtes blondes embrouillées...Jusqu'à un certain point.
             (Je me relis, on ne sait jamais...)
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Paradis fiscaux (suite...sans fin?)

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 D'ici et d'ailleurs.

                   Enjeux géopolitiques.

   Officiellement, ils auraient disparu, ou presque.
  Cela fait des années que certains proclament que le ménage a été fait, qu'ils n'existeraient même plus. Miracle du verbe! De la part de Moscovici et des autres. Ces derniers jours encore pourtant le problème rebondit. A nos portes.
      La fête paradisiaque continue, malgré les dénégations, de manières diverses et variées
Aux dépends des budgets publics, de la redistribution et de l'investissement productif.

Beaucoup de gesticulations médiatiques à ce sujet  de la part de l' OCDE et de pays pourtant directement concernés...
    La grande évasion continue, sous des formes toujours plus sophistiquées et plus ou moins "légalisées".
   Le feuilleton de l'évasion fiscale continue...
                          "   Loin d être un nouveau catalogue des différentes techniques de l'évasion fiscale tentative vouée généralement à l échec tant l' astuce des fiscalistes est sans limite et la réglementation en perpétuel changement , loin d être une démonstration apportant une impossible solution définitive aux dérives de la finance offshore, ce livre retrace par l histoire les enjeux géopolitiques qui ont toujours dominé le sujet des paradis fiscaux. Si, depuis la crise économique de 2008, l' opinion publique a pris conscience du phénomène, l actualité nous montre que l on est loin des déclarations du président français de l époque affirmant : « Les paradis fiscaux, c est fini ! ». SwissLeaks, LuxLeaks, affaire UBS, etc., chaque mois apporte son lot de scandales. 
     La raison en est simple : les paradis fiscaux ne sont pas un problème pour les grandes puissances tant qu elles réussissent à conserver leur pré carré offshore. Toucher à ces territoires, c est toucher à leur contrôle sur le système financier mondial et donc à leur souveraineté. Loin d être à la marge, la finance offshore est au coeur du capitalisme financier et chaque puissance lutte pour gagner en influence ; le règlement FATCA américain en est un parfait exemple. Ni sujet financier ou fiscal, ni sujet juridique, les paradis fiscaux sont le nouveau grand jeu des rivalités de pouvoir géopolitique entre puissances impliquant aussi certains lobbies industriels et financiers. Destiné au plus grand nombre et illustré de cas concrets, l' angle inédit proposé satisfera autant le lecteur curieux que le connaisseur souhaitant un éclairage nouveau. Il est temps de considérer le paradis fiscal comme une représentation, une construction géopolitique, afin que le débat soit enfin abordé sous son vrai visage...."

         Le problème des paradis fiscaux dépasse largement le cadre fiscal, il remet en cause la souveraineté des États et le consentement des peuples à mettre en commun

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