Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le charme discret

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

De la bourgeoisie
                            Il a bien du souci, le Maïtre de Beaucé.
   Après les ennuis qu'on connaît, le voilà qui contre-attaque, se jugeant victime.
    Victime d'une justice que certains estiment "aux ordres", arrêtant  net sur le chemin de la présidence espérée un "homme d'exception". Il a rebondi, mais pas dans la voie espérée.
  L'heure est à la défense contre un système qui l'aurait broyé.
    Notre système hyper-présidentiel serait donc un système où tous les coups sont permis, où les grands shows prennent le dessus, où les figures individuelles sont à l'avant-scène et où le débat d'idées est escamoté, voire réduit à quelques slogans vite oubliés.

   Les dorures du Palais attirent plus que le service du bien commun et les intérêts des lobbies s'imposent d'avantage que les principes républicains dont nous sommes encore sensés nous inspirer.    Le Président, malgré l'apparence, ne maîtrise plus grand chose, sinon à la marge, à l'heure où la souveraineté est mise à mal. Depuis plus de vingt ans, la marche à l'hyper-pouvoir centralisé a fait oublier les débats d'une république d'assemblée, qui a ses défauts,  mais qui peut être vraiment délibérative, sur la base de programmes différenciés soumis aux libres débats, réellement appliqués. Le retour aux idéaux républicains, quoi...
     Démocratiser la démocratie attendra. Place aux ambitions, au double langage, au machiavélisme à peine masqué  (*)
    De toutes manières, le Fillon nouveau a fait long feu et devra retourner  en prison au château. Giscard en avait bien un. Comme Chirac d'ailleurs.
         Il y a fort à faire à Beaucé et Pénélope a besoin de repos.
_______________  (*) Mais nos (chers) élus ne peuvent exercer leur mandat que sous le contrôle et dans l'intérêt de leurs administrés, dans l'intérêt général, en vue du bien commun.. Il suffit de relire Montesquieu et sa conception de la vertu, au sens politique.

   Une démocratie est toujours fragile  et réformable, sous peine de devenir un mirage.
        Une autre démocratie est toujours possible, si les citoyens restent éveillés.(*)
     L'hyper-présidence d'aujourd'hui a montré ses limites et ses excès, laissant peu de place aux débats parlementaires sur des questions pourtant essentielles.
   Nos z'élites n'ont de légitimité qu'à la condition de remplir scrupuleusement leur mandat, et pas tout une vie. La politique n'est pas un métier, c'est un service.

   Le risque de corruptions est toujours présent , si les garde-fous ne fonctionnent pas bien, pour éviter que l'on répète que  l’honnêteté ne paie pas en politique 
_______
   (*)  : " Fillon a toujours mis en avant le fait qu’il avait, au contraire de ses principaux concurrents du parti gaulliste, les mains propres. Durant le débat des primaires qui l’avait opposé à Alain Juppé (reconnu coupable en 2004 de prise illégale d’intérêt dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, sous la houlette de Jacques Chirac), Fillon annonça: «On ne peut pas diriger la France si on n’est pas irréprochable.» Fillon n’a pas non plus manqué de railler les nombreux démêlés judiciaires de son rival Nicolas Sarkozy au sujet de ses frais de campagne en invoquant la droiture morale de la grande figure patriarcale et conservatrice nationale, Charles de Gaulle: «Qui imagine un seul instant le général de Gaulle mis en examen?» Maintenant que le parquet financier a ouvert une enquête préliminaire au sujet de l’affaire Fillon, le général semble plus seul que jamais."
________________________________________
      Comme disait Alexis de Tocqueville:

    Il y a un passage très périlleux dans la vie des peuples démocratiques. Lorsque le goût des jouissances matérielles se développe chez un de ces peuples plus rapidement que les lumières et que les habitudes de la liberté, il vient un moment où les hommes sont emportés et comme hors d’eux-mêmes, à la vue de ces biens nouveaux qu’ils sont prêts à saisir. Préoccupés du seul soin de faire fortune, ils n’aperçoivent plus le lien étroit qui unit la fortune particulière de chacun d’eux à la prospérité de tous. Il n’est pas besoin d’arracher à de tels citoyens les droits qu’ils possèdent ; ils les laissent volontiers échapper eux-mêmes(…)
« Si, à ce moment critique, un ambitieux habile vient à s’emparer du pouvoir, il trouve que la voie à toutes les usurpations est ouverte. Qu’il veille quelque temps à ce que tous les intérêts matériels prospèrent, on le tiendra aisément quitte du reste. Qu’il garantisse surtout le bon ordre. Les hommes qui ont la passion des jouissances matérielles découvrent d’ordinaire comment les agitations de la liberté troublent le bien-être, avant que d’apercevoir comment la liberté sert à se le procurer ; et, au moindre bruit des passions politiques qui pénètrent au milieu des petites jouissances de leur vie privée, ils s’éveillent et s’inquiètent ; pendant longtemps la peur de l’anarchie les tient sans cesse en suspens et toujours prêts à se jeter hors de la liberté au premier désordre.
« Je conviendrai sans peine que la paix publique est un grand bien ; mais je ne veux pas oublier cependant que c’est à travers le bon ordre que tous les peuples sont arrivés à la tyrannie. Il ne s’ensuit pas assurément que les peuples doivent mépriser la paix publique ; mais il ne faut pas qu’elle leur suffise. Une nation qui ne demande à son gouvernement que le maintien de l’ordre est déjà esclave au fond du cœur ; elle est esclave de son bien-être, et l’homme qui doit l’enchaîner peut paraître. (…)
« Il n’est pas rare de voir alors sur la vaste scène du monde, ainsi que sur nos théâtres, une multitude représentée par quelques hommes. Ceux-ci parlent seuls au nom d’une foule absente ou inattentive ; seuls ils agissent au milieu de l’immobilité universelle ; ils disposent, suivant leur caprice, de toutes choses, ils changent les lois et tyrannisent à leur gré les mœurs ; et l’on s’étonne en voyant le petit nombre de faibles et d’indignes mains dans lesquelles peut tomber un grand peuple… [Alexis de Tocqueville _Extrait de De la Démocratie en Amérique, Livre II, 1840]"
                                                ________________________________________________________
Partager cet article
Repost0

Varia

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 __  Allemagne: la tentation du réarmement

__   Pékin: vers une suicide économique, une fuite en avant?

                    Comment tenir, avec le mythe du zéro covid?

 

__ Hôpital: "en progrès". Vraiment?  

                Inquiétudes sur le terrain

__ Changement climatique: la preuve par l'Inde?  Coup d'oeil.

__ Alter-féminisme en question  Inquiétant

__  Berner l'ennemi

__ Nouvel éclairage sur le Traité de Versailles et le rôle de Wilson

                                                              _____________________________

Partager cet article
Repost0

Tourisme toxique

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

Partir, revenir...
                                 L'épisode que nous vivons, avec sa paralysie des transports longues distances, sa contestation de certains de nos loisirs de masse, est assez propice à une mise en question des modes de déplacement à des fins de découvertes de nouveaux horizons, de plus en plus nombreux et inter continentaux, supposés nouveaux et attractifs, vendus sur catalogues au papier glacé. D'exceptionnel qu'il était, le voyage est passé dans le registre des biens de consommation ordinaires, pour une masse de plus grande de personnes de tous continents.
      Il s'est généralisé, banalisé. low-costé. Partir n'est plus partir.

  Il est devenu un produit d' appel, certains pays jouant sur le tourisme  pour gonfler leur PIB. Pas toujours avec discernement.
   Au risque de réduire le tourisme à des déplacements de foules grégaires qui ne voient rien ou presque, qui ne retiendront que quelques pixels embarqués ou quelques selfies, pour témoigner qu'"on y était".
   Voyage nomalisé, voyages-spectacle, voyage banalisé, vite oublié, avant de préparer le suivant sur catalogue au papier glacé.
    Le low-cost et la guerre des voyagistes  a encouragé la tendance, comme le fast food a banalisé et dénaturé la nourriture. Tant qu'il y aura du pétrole....
     Le voyage de découvertes, lent, peu programmé, dans des lieux non courus, qui laissent des traces indélébiles, est devenu de plus en plus rare .
     Faire l'éloge du dépaysement vrai, de la découverte authentique, des rencontres non programmées est devenu de moins en moins fréquent. Ce dépaysement qui change en profondeur l'intériorité et renouvelle le regard.
      Un peu de tourisme, ça va....Mais on semble avoir dépassé le seuil de la déraison touristique.
          Mais les déferlantes touristiques dans les mêmes lieux en même temps vont tuer le tourisme.
 Et les incidences de ce phénomènes sur le milieu, urbain et/ou naturel, commencent à poser bien des problèmes, même au Machu Pichu, où l'on parle de contingenter la fréquentation, dans certains villes où le problème de l'eau devient crucial, dans d'autres, où l'hyper-fréquentation, festive ou non, perturbe fortement la vie locale, modifie le prix du foncier, entraîne indirectement  l' "exode" de populations, comme à Barcelone , à Venise ou à Dubrovnik. A  Amsterdam, c'est les "festivités" nocturnes qui gâchent tout.
   Si, dans une certaine mesure, il peut être bénéfique économiquement, comme en Tunisie, il peut aussi se révéler catastrophique très rapidement. Les cohortes de visiteurs pressés sortis en rang des bateaux de croisière, sans discontinuer les jours d'été, auront-elles raison des plus beaux sites de Santorin, dont les rues principales sont investies à prix d'or par les marchands de produits de luxe?...
       Il faut réapprendre à voyager, non comme hier, mais selon des formules à réinventer.
   Retrouver le plaisir durable et profond de la découverte, loin de la saturation des tours-operators vendeurs de produits finis, où la surprise doit être bannie, où le confort doit être assuré, où l'on achète d'abord "un prix". Low cost, low plaisir...
   Le Routard ne fait même plus rêver.
        Comment retrouver, à contre-sens des tendances frénétiquement consommatrices, le sens du voyage rare et de qualité. 
  Il ne s'agit plus de suivre les injonctions du voyager pas cher, mais de retrouver le sens de l'étonnement et de la découverte. Avec désir et lenteur. Parcimonieusement.
    Des voyages qui forment à la vie et ouvrent à soi-même, comme disait le vieux Montaigne qui a parcouru une partie de l'Europe... à cheval.
____________________

Partager cet article
Repost0

Il n'est pas mort, dit-il...

Publié le par Jean-Etienne ZEN

  Mort ou moribond?..               

                 En tout cas plus que dans un état de coma, même dépassé. Le PS est déjà mort!  Il y a longtemps que le parti a commencé son agonie, ses dérives électoralistes successives, par "réalisme"... ou mimétisme. Le constat est cruel mais sans appel. Un ancien ministre socialiste l'avoue, après d'autres.  Les incantations sont sans effets. Tout reste à (re)construire.    Pas étonnant:                                                                                                               "En matière de privatisations, la gauche plurielle a réalisé en trois ans un programme plus important que n'importe quel autre gouvernement français" (Revue Socialiste 07/2000)___-« C’est la gauche du Vieux Monde qui ressemble de plus en plus à la gauche américaine », ( Lipset)____ -« Le projet historique de la social-démocratie est définitivement achevé », ( Pierre Rosanvallon ) ___- Jean-Pierre Le Goff remarque les efforts pathétiques de la gauche pour « maintenir ensemble les morceaux d’une identité éclatée », oscillant sans cesse entre ses conceptions traditionnelles et « une fuite en avant moderniste » censée lui attirer les bonnes grâces des couches sociales montantes.                                                                                                                                La vague néolibérale est passée par là, ainsi que la mondialisation financiarisée et sans frein....Cela ne pouvait aller sans crises. Comment la rebâtir?  Sur de nouvelles bases, avec de nouveaux hommes?...    


                                                                                                                                                                                                            __  Points de vue:     "Dans un livre publié en 1998, un brillant sociologue affirmait : « il n’y a plus aucune alternative au capitalisme. Le débat ne porte plus que sur la question de savoir jusqu’où et par quels moyens on doit régir et réguler le capitalisme. » Ces paroles sont tout particulièrement remarquables parce que l’homme qui les a écrites, Anthony Giddens, était aussi célèbre pour être le gourou intellectuel du Premier Ministre britannique et chef du Parti travailliste, Tony Blair. En se convertissant à la troisième voie (The Third Way, titre du livre de Giddens), qu’il faut clairement comprendre comme la voie médiane évitant à la fois l’anticapitalisme de gauche et le conservatisme de droite, Blair a contribué à mettre fin à une période d’un siècle pendant laquelle la gauche européenne a été dominée par les socialistes. En agissant ainsi, lui et ses homologues du continent ont également facilité un processus qui a eu pour effet de rapprocher davantage les divisions entre les partis politiques européens de celles existant aux États-Unis où le socialisme n’a jamais vraiment pris pied..."                                                                                                                                    ______"...La crise de la gauche tient à un épuisement idéologique sans précédent et probablement sans remède. Faute de voir encore un avenir au parti socialiste, ses figures les plus marquantes le quittent. ...Cette globalisation suscite, qu'on le veuille ou non, un effet de vases communiquant, entraînant entre les grandes zones du monde une contagion des inégalités et parfois de la précarité. Qui ne voit que la tendance naturelle du libéralisme mondialisé est l'alignement par le haut des inégalités mondiales ? La globalisation du marché de l'immobilier en est un signe parmi d'autres. La course au moins disant fiscal ou au moins disant social entrave les régulations de l'Etat providence, dont les partis sociaux démocrates, même s'ils n'en avaient pas l'exclusivité, avaient fait leur fonds de commerce.  Encore cette globalisation n'aurait-elle pas eu tant d'effets si les grands partis de gauche avaient pu y faire obstacle. Or non seulement ils ne l'ont pas fait mais ils ont au contraire encouragé cette évolution, parti socialiste en tête. Ils l'ont fait d'abord parce que la gauche n'a jamais surmonté sa contradiction fondamentale : elle se veut à la fois le parti de la justice sociale et celui de l'universalisme, pour ne pas dire de l'internationalisme. C'est en raison de sa propension originelle à l'universalité qu'elle n'a pu s'opposer à un progrès des échanges de toutes sortes qui prenait le visage de l'ouverture au monde et du dépassement des frontières, sans mesurer que cette ouverture à un monde qui n'est pas encore, ni près, socialiste ne pouvait que compromettre son autre objectif, celui de la justice sociale..."                                                                    ____    "...La crise capitaliste actuelle ne laisse pas indemne le projet au nom duquel le social-libéralisme se voulait adaptation au défi de la modernité. Depuis une vingtaine d’années, l’ensemble de la social-démocratie s’accordait sur l’idée que le capitalisme était sorti vainqueur des affres du XX° siècle, que la mondialisation rendait inévitable l’acceptation de la doxa néolibérale, qu’il ne restait plus qu’à accompagner cette évolution en cherchant à en atténuer les effets les plus erratiques. Avant de devenir un penseur du sarkozysme gouvernemental, voilà des années que Jacques Attali théorise cette mutation des sociaux-démocrates en sociaux-libéraux. Il est vrai qu’il y contribua fortement en inspirant le « tournant de la rigueur » que la gauche gouvernante décréta en 1983, sous l’égide de François Mitterrand...cette gauche sans ressorts laisse le terrain totalement libre à Nicolas Sarkozy. Celui-ci peut sans risque user d’une rhétorique qui se serait écroulée à peine formulée s’il existait une opposition digne de ce nom. Il lui est même loisible de paraître occuper simultanément l’espace de la droite et celui de la gauche. Promettre d’intensifier la révolution néoconservatrice dont il a fait son projet, et se revendiquer du volontarisme en politique. La rue de Solferino en reste muette…"  _______

Partager cet article
Repost0

Le vert lui va si mal

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

A l'aube d'un virage?
                             Mutation ou délitement?
        Les résultats assez inédits des urnes et le bilan de la Convention pour le climat semblent indiquer à la fois une prise de conscience collective qui s'affermit et une volonté de passer enfin à des mesures significatives pour repenser notre aventure industrielle et marchande à la lumière des alarmes lancées par un toujours plus grand nombre de spécialistes, pas seulement de climatologues.


   Nous avons peu de temps devant nous pour entamer un grand virage, sans nous contenter d'incantations et nous parer de belles vertus, pour continuer à assurer les conditions nécessaires à la vie humaine pour notre descendance.
  Le Président Macron ne pouvait pas rester sourd à la vague qui monte, même si elle est floue et ambivalente, reflétant aussi un désarroi ambiant et un rejet du jeu politique traditionnel.
   Mais le voilà pris à son propre jeu et obligé d'accompagner, pour le contrôler, un mouvement qui lui échappe dans une large mesure.
    Après la "déception", la prise en main et la promotion obligée de valeurs qui lui étaient jusqu'ici bien étrangères. Un peu comme comme Sarkozy à un moment, la main sur le coeur, dans une étrange conversion qui fut sans lendemain. Mais là, la simple manoeuvre tactique a moins de chance de réussir. Le contexte a changé. L'écologie ne sera plus un "supplément d'âme" s'ajoutant aux mesures conventionnelles.. Les prises de conscience sont trop fortes, les urgences trop rapprochées.
   Et maintenant?...que vais-je faire, comme le chantait G.Bécaud. Tout est à repenser, jusqu'à l'exercice du pouvoir, c'est certain. Le vert n'était pas la couleur prévue, quand était envisagés les grands projets pour demain, depuis le pharaonique site marchand du nord de Paris jusqu'à l'exploitation de la super mine d'or en Guyane.
  Ce n'est pas un pas en avant qui est attendu, mais un conversion, une mutation:
                   "...;Quoi qu’il décide ou qu’il annonce, Emmanuel Macron se trouve aujourd’hui coincé par la montagne de promesses qu’il n’a pas tenues depuis trois ans. Dans son camp, les déceptions sont lourdes. Dans l’opposition, la défiance paraît irréversible. Sans structure et avec un maillage territorial pour le moins confidentiel, le président de la République va donc entamer la dernière partie de son quinquennat plus fragilisé que jamais. « En Marche est vide en termes d’idées et ne correspond plus à la recomposition politique qu’on avait initiée, conclut un cadre de LREM. Si on ne fait rien, on va vers le délitement....»
                                                        _________________________________

Partager cet article
Repost0

Mais où s'arrêtera Musk?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Elon s'envole. No limit!

                      Pas seulement dans le ciel étoilé , mais aussi dans les affaires. Un business plus juteux que celui de Jeff Bezos.  Où s'arrêtera son ambition, son  appétit tous azimuts? Il part plus vite qu'un fusée. L'étoile brillera-t-elle longtemps dans le ciel du plus juteux busines? Méga patron et influenceur, il veut tout changer.                              Il revendique une "liberté d'expression" absolue, ce qui en soi peut paraître séduisant, mais ce projet cache pas mal d'ambiguïtés, voire de dangers. Certains s'en réjouissent: "...L’annonce ravit la droite conservatrice américaine, qui reproche régulièrement aux entreprises de la Silicon Valley de favoriser les démocrates. Le sénateur républicain Jim Jordan, par exemple, a salué « le retour de la liberté d’expression » sur la plate-forme, tandis que la sénatrice du Tennessee, Marsha Blackburn, connue pour ses positions conservatrices, a déclaré qu’il s’agissait d’un « grand jour pour être conservateur sur Twitter » et qu’il était « temps que Twitter devienne ce qu’il est censé être : une plate-forme numérique ouverte à toutes les opinions ».  En France aussi, certains se réjouissent de l’événement, particulièrement à l’extrême droite. « Le rachat de Twitter par Elon Musk : une très bonne nouvelle pour la liberté d’expression ! Stop censure, on suffoque ! Vive la liberté ! », a par exemple écrit Florian Philippot, président des Patriotes et ancien bras droit de Marine Le Pen...(...une très bonne nouvelle pour la liberté d’expression !Stop censure, on suffoque ! Vive la liberté !"  )

 

                  Que veut dire une liberté d'expression "absolue"? Un mythe, un projet libertarien, où la notion de régulation, de contrôle démocratique n'a pas de sens et où les algorithmes des réseaux sociaux ne sont pas neutres.       Un projet "inquiétant » , même si c'est largement mythique, voire partisan.   "... Il faut bien comprendre qu'il existe deux conceptions de la liberté d'expression. La première, plutôt américaine, est radicale : la liberté est au-dessus de tout, ce qui signifie que tout point de vue, quel qu'il soit, peut être exprimé dans l'espace public. Y compris, donc, un point de vue raciste, xénophobe, antisémite ou la diffusion d'une fake news. La deuxième conception, plutôt européenne et française, est qu'il y a des limites légales à ce qu'on peut dire dans l'espace public.  La plupart des patrons des entreprises de la tech américaine, y compris Jack Dorsey [le fondateur et premier CEO de Twitter, qui a quitté la direction fin 2021, Ndlr] pensent que la liberté d'expression doit être totale. C'est pour cela qu'ils combattent l'idée que les réseaux sociaux sont des médias responsables des contenus qu'ils diffusent, et qu'ils se montrent si réticents à les modérer. Mark Zuckerberg [le fondateur et patron de Meta qui comprend Facebook, Instagram, WhatsApp et Messenger, Ndlr], Jack Dorsey, ou encore les dirigeants de Google/YouTube, estiment que leur plateforme est un outil technique avant tout. Pour eux, leur rôle est simplement de mettre en relation les utilisateurs, grâce à des algorithmes qui mettent en avant des contenus liés à leurs centres d'intérêts...."                                                                                Le touche-à-tout ne manque pas d'ambitions, comme certains rêveurs californiens: il veut s'envoler vers les cieux du transhumanisme, refonder l'humanité en modifiant ses capacités cérébrales. Rien que ça!...Souriez, vous êtes (presque) sauvés!.. 😎 ____________

Partager cet article
Repost0

To be or not toubib

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

Etre ou ne pas être (soignant)
                                     Ils sont au front depuis des semaines. Au tout premier plan, ou plus en retrait , mais tout aussi nécessaires, indispensables, dans la chaîne de la prise en charge et des lourds soins à administrer. Tous les jours. Sans compter leur temps. Sans préoccupation des risques quotidiens qu'ils côtoient.


   Ils sont souvent fatigués, épuisés, certains frôlent le burn-out. Parfois aussi en colère, indignés devant le manque de moyens, les imprévisions, les défaillances, comme la gestion scandaleuse des masques et autres protections qui font encore défaut. 
    Et pourtant, on était prévenu, mais la gestion à flux tendu et l'externalisation de la production des moyens de protection et de soins indispensables ont produit des conséquences prévisibles. Certains y ont laissé leur vie.
     Ce n'est pas une prime de quelques milliers d'euros qui va leur remonter le moral et remédier aux dysfonctionnements hospitaliers et aux salaires du personnel soignant parmi les plus faibles d'Europe. La reconnaissance morale, c'est bien, mais qu'on n'oublie pas la leçon: pour exercer correctement et dignement un métier comme celui-là, le malade étant au coeur du dispositif, il faut être en nombre suffisant et être davantage valorisé. Seulement pour être disponible. au service du client malade, qui demande plus que des soins techniques.
  Ils ne veulent pas être appelés des "héros," mais seulement des professionnels, au service de tous.       Tous nous sommes appelés à être les sujets de leur soins et de leur attention.
  Dans des hôpitaux malades, devenus des lieux où l''autofinancement est devenu l'objectif depuis des années, ils font souvent plus que le maximum, sans compter leurs heures.
  L'hommage qui leur est dû ne peut se ramener à des applaudissement aux balcons. Leurs conditions de travail sont parfois épuisantes, surtout moralement. Les symptômes sont bien là.
  La hantise de mal faire son travail n'est pas sans conséquences sur leur moral, leur comportement et parfois leur décrochement. Le surmenage guette, comme la culpabilité. Parfois jusqu'à l'abandon.
   Retiendrons-nous au moins cela dans les temps qui viennent, si du moins on veut bien considérer la santé comme une valeur non marchande par excellence?..Si elle a un coût, elle n'a pas de prix.
        L'hôpital n'est pas une entreprise.
                                                                ________________________

Partager cet article
Repost0

Médica-ments (suite)

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Les rois du marché

                          Pas n'importe lequel. Faire la loi dans le domaine alimentaire, pour des produits de base, en jouant sur les prix au niveau international, dans un contexte de dérégulation et de spéculation, c'est déjà un processus potentiellement discutable.       . Mais faire la pluie et le beau temps dans le domaine du médicament, parfois vitalement nécessaire, cela peut-être mortel pour les malades en attente de soins urgents, dans le domaine de l'oncologie, par exemple.  On le savait déjà, les grandes firmes pharmaceutiques, les plus rentables pour les placements financiers, visent d'abord le profit maximal, joue l'opacité et parfois la rétention de certains produits pour jouer artificiellement sur les prix.                                                                                                                            Le document produit hier soir sur Arte, le montre clairement, par des exemple précis. Les Etats n'ont que très peu de moyens d'agir sur l'énorme pouvoir financier de "Big pharma" et, malgré la capacité d'autorisation de mise sur le marché, ils n'ont pas la possibilité, même minime, de contrôler ou du moins de superviser les choix, la production et les prix de produits qui relèvent de l'intérêt général, national et international. Au plus haut point.  Des vies sont en jeu, par exemple dans le domaine de l'oncologie: ruptures d'approvisionnement, prix vertigineux, politique du silence ou chantage: le document fournit des exemples de pratiques parfois obscures ou douteuses de la part de méga-firmes qui ont pignon sur rue et qui se nourrissent le plus souvent de la recherche publique. Les profits issus de ces pénuries artificielles sont problématiques, scandaleux. Il est temps que l'OMS s'empare enfin du problème, que les Etats se mettent conjointement d'accord pour contrôler ces monstres sacrés qui font la joie des investisseurs privés.                   .            Qu'on en juge:                                                                                                                                                    "...Le phénomène est loin d’être récent. Partout dans le monde, des patients ne peuvent pas être soignés correctement parce que le traitement dont ils ont besoin n’est pas disponible, tout simplement. En Europe, ces deux dernières décennies, les pénuries de médicaments ont été multipliées par vingt. Au CHU de Rennes, où nous conduit ce documentaire notamment, on manque d’anti-inflammatoires injectables, d’anticoagulants ou encore de traitements anticancéreux. Tous les laboratoires sont concernés par les ruptures de stockLa rentabilité, évidemment, est au cœur du sujet. Et avec elle la question des brevets. Lorsqu'un brevet prend fin et avec lui le monopole d’un laboratoire, le prix baisse mécaniquement. Comment récompenser l’innovation sans pénaliser les patients ? C’est l’un des enjeux.    Autre exemple saisissant, en Espagne cette fois : les stylos injecteurs d’adrénaline. Certains patients allergiques doivent en avoir sur eux en permanence pour éviter le choc anaphylactique. Ces stylos injecteurs sont fabriqués à Madrid par ALK. Mais en 2017, ce laboratoire a cessé de les vendre en Espagne : il refusait une baisse de prix imposée par les autorités espagnoles. Résultat : à Madrid, ALK a continué de produire pour l’exportation, mais pas pour les patients espagnols. Le gouvernement est contraint d’importer de l’étranger des stylos d’adrénaline produits sur son propre sol. Complètement ubuesque.    Les laboratoires n’hésitent pas à retirer du marché des produits lorsque les Etats baissent leur prix. Cela montre à quel point la relation entre les gouvernements et les laboratoires est fragile. Les pénuries, désormais structurelles, sont parfois sciemment organisées par les laboratoires. Les « big pharma », par ailleurs, sont nombreux à avoir délocalisé leurs productions de médicaments en Inde, où les normes environnementales sont moins contraignantes. En délocalisant, les laboratoires ont fragilisé la chaine d’approvisionnement.  Comment reprendre le contrôle de l'économie du médicament? Le documentaire dessine des pistes, mais la première étape est une prise de conscience collective.."

 

                              Le problème n'est pas nouveau, mais les déplorations, les mises en garde, les signalements n'y font rien. Seule semble compter la "loi du marché", l'intérêt des actionnaires. L'inversion des valeurs règne en maître. Des questions, parfois gravissimes continuent à se poser (Que l'on pense seulement à l'affaire du Médiator). Tant que les labos auront le vent en poupe, seuls maîtres chez eux, faisant la pluie et le beau temps, au gré des valeurs de la bourse, on n'aura pas fini de parler de cette question hautement politique, c'est à dire concernant le bien commun...    ___________________

Partager cet article
Repost0

Prémonition et impréparations

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 

Il était une fois un rapport
                                       Un rapport tout ce qu'il y a de plus officiel, produit par les plus hautes instances de l'Etat en matière politique et sanitaire, quoique classé curieusement "secret", qui fut écrit il y a quelques années et qui anticipait, par le menu, de manière troublante, sur les mesures qu'il fallait prendre pour éviter ou limiter les effets du cataclysme sanitaire que nous vivons aujourd'hui. Il y eut d'autres alertes, plus individuelles.

    Le journal Le Monde vient d'en révéler la teneur. L'étude était fournie et allait dans les détails.
       Ils ne pouvaient pas dire: on ne savait pas...On a baissé la garde. Par négligence ou par courte vue économique? Sans doute les deux. (*)
  Un aveuglement stupéfiant. La catastrophe a ceci de terrible, que non seulement on ne croit pas qu’elle va se produire alors même qu’on a toutes les raisons de savoir qu’elle va se produire, mais qu’une fois qu’elle s’est produite elle apparaît comme relevant de l’ordre normal des choses. Sa réalité même la rend banale. » (Dupuy)
  Comme pour le Titanic, déclaré insubmersible, qui révéla après coup les faiblesses de sa construction , de sa maintenance et de sa gestion. L'intelligence de la catastrophe montre ses limites au profit d'une amnésie parfois tragique.

        _____ (*)             "...Barré du tampon « Confidentiel », le rapport date du mois d’avril 2005. Rédigé au terme d’un an d’enquête par l’Inspection générale de l’administration (IGA) à la demande du ministre de l’intérieur de l’époque, Dominique de Villepin, sa lecture, quinze ans plus tard, en pleine crise du Covid-19, donne le vertige tant le document apparaît prémonitoire.     Jamais rendu public, cet épais rapport, que Le Monde a exhumé, porte sur « l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics » en cas de pandémie – grippale en l’occurrence –, mais aussi de « crise majeure au cours de laquelle la situation économique, l’appareil social, les structures administratives sont durablement perturbés, notamment une “crise sanitaire grave” ». Décrit méticuleusement sur 160 pages par l’inspecteur général Philippe Sauzey et l’inspectrice générale Chantal Mauchet, le scénario catastrophe s’est révélé prophétique. Il aurait pu être utile.       Pourtant, en ce début d’année 2020, lorsque le coronavirus déferle sur le pays, les pouvoirs publics sont totalement pris de court et rapidement débordés : manque de lits de réanimation, absence de tests, pénurie d’équipements de protection et notamment de masques, sans compter les multiples tergiversations sur la stratégie à adopter… L’Etat s’est tout simplement désarmé.   C’est ce « désarmement » sanitaire que Le Monde a reconstitué. Avec, en guise de fil rouge, ces fameux stocks de masques dont les fluctuations au fil des ans épousent celles des politiques menées par les gouvernements successifs.     Cette plongée au cœur du système sanitaire permet de comprendre, témoignages et documents inédits à l’appui, comment et pourquoi l’Etat, pourtant informé des risques encourus, a baissé la garde....
Partager cet article
Repost0

Externalisations et services publics

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Comment faire faire par les autres ce qu'on pourrait faire soi-même à moindre coût.

           L'externalistion est devenue en France pratique courante. Avec la montée de l'influence néolibérale et sa critique des institutions étatiques. Magie a ouvert la voie dans sa critique de l'Etat et son apologie des affaires privées, des lois du marché.          La sous-traitance par l'Etat, dans des domaines de plus en plus larges,  est devenue pratique courante, dans le cadre de choix néolibéraux sous prétexte de "modernisation". La  consultocratie, par exemple, est devenue envahissante, au plus haut niveau de l'Etat, comme le montrent des exemples récents, qui ont soulevé des critiques légitimes    Un vrai scandale parfois!

 

 "Le recours à l'externalisation, soit le fait de confier à un acteur privé la réalisation de tout ou partie de l'action publique, est souvent présenté comme une façon d'adapter les services publics aux besoins et contraintes du XXIe siècle. Il ne s'agit pourtant pas d'une tendance nouvelle : le recours à des entreprises privées pour exécuter certaines missions existe dès le XVIIe siècle et a donné naissance à la riche histoire française des concessions et délégations de service public. Mais ce mouvement a connu une accélération récente, que l'on peut dater du milieu des années 1990 ; ses traductions juridiques sont désormais très variées et le recours à l'externalisation peut aujourd'hui être estimé à la somme de 160 Mds€, soit l'équivalent de la moitié du budget de l'Etat. Loin d'être anecdotique, ou cantonnée à des débats entre experts sur les modalités techniques de l'action publique, le recours désormais massif à l'externalisation soulève des questionnements qui mettent en jeu la capacité de la puissance publique à agir au quotidien ou à prendre ses décisions de manière souveraine.                                                            L'intervention du secteur privé dans les missions assumées par la puissance publique a longtemps été cantonnée à la construction des infrastructures qui nécessitait un apport important de capitaux : canaux de navigation au 17e siècle, puis chemins de fer, éclairage public ou encore alimentation en eau potable. Après l'inflexion des années 1930-1950, puis celle du début des années 1980, qui ont conduit à la nationalisation d'entreprises du secteur de l'énergie et des transports, une offensive tendant à « réformer l'Etat » en redéfinissant le périmètre respectif de l'action publique et de l'initiative privée, va conduire à imposer, à partir du milieu des années 1990, un cadre intellectuel nouveau, dans le prolongement des réformes menées au Royaume-Uni par le gouvernement de Margaret Thatcher. A travers la circulaire Juppé du 26 juillet 1995 relative à la réforme de l'Etat et des services publics, les stratégies ministérielles de réforme de 2002-2003, la révision générale des politiques publiques (RGPP) entre 2007 et 2012, la modernisation de l'action publique (MAP) sous François Hollande, ou encore le projet action publique 2022 lancé en 2018, tous les gouvernements ont poursuivi un objectif commun : réduire l'emploi public pour réduire les dépenses publiques et donc les déficits                                                                            Une externalisation en partie subie : emploi public en baisse, contraintes juridiques croissantes et évolution du contexte institutionnel Dans ce contexte d'austérité budgétaire, un certain nombre de contraintes vont imposer une pression croissante sur les opérateurs publics pour déléguer une fraction de leur activité au secteur privé.      La première de ces contraintes résulte de l'instauration du plafond d'emplois lors de l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux finances publiques (LOLF) en 2006. Les organismes publics se voient désormais assigner, en plus de l'exigence de tenir leurs contraintes budgétaires, l'obligation de le faire sans dépasser le recrutement d'un certain nombre d'agents. Résultat : entre 2006 et 2018, la fonction publique d'Etat a perdu 180 000 agents, auxquels s'ajoutent 220 000 agents transférés des ministères vers les établissements publics de l'Etat. Ces réductions d'effectifs sans réduction des missions ont mécaniquement obligé les gestionnaires publics à trouver à l'extérieur des services publics les ressources humaines qu'ils avaient l'interdiction de recruter en interne. La même logique est à l’œuvre avec la norme dite de « fongibilité asymétrique des crédits », également entrée en vigueur avec la LOLF, qui permet de redéployer le budget du personnel vers des dépenses autres (marché public, investissement...) mais qui interdit le mouvement inverse. Ces deux mouvements conduisent à un résultat paradoxal : en compensant ces « restitutions d’emplois » par le recours à des prestataires parfois bien plus onéreux, on réduit fréquemment la qualité du service public tout en dégradant les finances publiques, comme le montrent les exemples de la Société du Grand Paris jusqu’en 2018 ou de nombre de partenariats dits « public-privé »                                                  La deuxième contrainte forte imposée aux gestionnaires publics consiste dans le développement du droit de la concurrence, dans un cadre européen. Alors que les réformes du droit de la concurrence des années 1990 avaient principalement pour objet de mettre un terme à la corruption politico-financière associée à l'attribution de marchés publics à des entreprises privées, les évolutions les plus récentes ont eu pour effet de soumettre au droit de la concurrence un nombre croissant d'acteurs, y compris publics ou semi-publics. Ainsi, dans le secteur local, de nombreuses sociétés d'économie mixte se retrouvent écartées des relations avec les autorités publiques locales, au profit d'acteurs privés, quand bien même leur action aurait permis de limiter les coûts de transaction ou d'ancrer l'action locale dans la durée.     Enfin, l'évolution du cadre institutionnel et les nouveaux terrains investis par la gestion publique ont conduit à un renforcement du recours à des prestataires privés. Ainsi, les mouvements de décentralisation de l'action publique de 2003 ou 2015, dans un contexte de démantèlement des capacités de conseil et d'accompagnement de l'Etat déconcentré, a conduit à renvoyer aux collectivités des tâches de conception des politiques publiques sans qu'elles en aient les moyens. On retrouve cet émiettement d'acteurs dans le secteur des universités (2007) et des hôpitaux (2009), cette fois sur le plan de la gestion interne autant que sur la conception des politiques publiques. Certaines politiques, où la puissance publique compense son désengagement par une activité de simple supervision, se traduisent par une sous-traitance de fait de secteurs d'activité entiers. C'est le cas par exemple de la certification : des organismes privés sont accrédités par une instance nationale pour avoir eux-mêmes le droit de délivrer des labels publics (certiphytos, agriculture biologique, qualiopi...). Prestataires publics de fait, sans pour autant disposer du moindre contrat de prestation avec la puissance publique, ces organismes certificateurs disposent d’un poids d’autant plus important que la puissance publique est dépossédée de la connaissance fine du métier.                                                                                        Un affaiblissement pérenne des savoir-faire et capacités d'action publiques. Le discours entourant le recours croissant à l’externalisation dans les services publics se pare - en théorie - de toutes les vertus de la “bonne gestion” : une meilleure qualité, une plus grande flexibilité et un coût moindre.     En pratique, l'externalisation peut fréquemment se révéler une source de surcoûts pour le secteur public : les prestations payées aux entreprises sont redevables de la TVA et du coût de la rémunération des apporteurs de capitaux, auxquels s'ajoutent généralement des coûts dits « de transfert ».  De la même façon, l’argument d’une plus grande “flexibilité” est ambivalent : les coûts de gestion des ressources humaines ne sont que déplacés vers des coûts d’agence - soit à la fois des coûts de transaction et des coûts de qualité, et surtout de réelles contraintes sont intrinsèquement associées à la rigidité des contrats.   Enfin, l’examen des fournisseurs de prestations intellectuelles aux administrations donne un regard plus mitigé sur la question d'une "plus grande diversité de compétences". Non seulement la commande publique en la matière est extrêmement concentrée (entre 2011 et 2013, dix cabinets se partageaient 40 % du volume des contrats de prestations intellectuelles au sein de l’Etat) mais les profils des consultants concernés ne se distinguent que très peu de ceux des décideurs publics : mêmes écoles voire parfois mêmes concours de la fonction publique.  Mais ce qui constitue sans doute la première des difficultés de l’externalisation aujourd’hui massive dans les services publics, c'est que le recours à des prestataires externes entraîne une perte problématique de savoir-faire de la puissance publique, incapable de mettre en œuvre de façon autonome nombre de ses politiques. C’est tout un patrimoine immatériel des services publics, de compétences métier, de savoir-faire organisationnel voire parfois de réflexion stratégique, qui est fragilisé. Le cas du récent marché conclu avec des cabinets de conseil pour mettre en œuvre la stratégie nationale de vaccination contre le Covid-19 l’illustre bien, au moment même où disposer d’une administration de la santé robuste était le plus nécessaire.                                                                                                        Face au discours récurrent du « recentrage sur le cœur de métier » des administrations, il apparaît enfin nécessaire d’interroger le “coût complet” de l’externalisation sur la société : quel bilan social du recours à des prestataires privés lorsque ces prestataires, pour comprimer les coûts au maximum, multiplient les contrats courts ou à temps très partiel ? En matière « d’externalisation par le bas », y compris dans le domaine social, le secteur du nettoyage ou de la restauration génèrent parfois de la maltraitance institutionnelle pour laquelle il n’est jamais demandé de comptes au donneur d’ordres. Or si l’Etat se prévaut de manière croissante d’une vigilance sur les clauses « sociales » ou « environnementales » de ses marchés publics, il convient de rappeler que celles-ci sont fortement contraintes, et ne peuvent être édictées que dans la mesure où elles restent « strictement en lien » avec l’objet du marché. Par ailleurs, il est difficile pour les agents de l’Etat d’effectuer une vérification systématique et rigoureuse du respect de ces clauses auprès de chaque prestataire. Historiquement précurseur dans l’amélioration des conditions de travail ou de protection sociale de ses agents, l’Etat externalisateur semble aujourd’hui avoir renoncé à tenir compte des conséquences sociales de sa sous-traitance...                                Conclusion : redonner à la puissance publique les moyens de ses missions  L'action publique se retrouve aujourd'hui dans une impasse : le recours à l'externalisation est devenu une nécessité plutôt qu'un choix stratégique, et le service public se retrouve contraint à l'émiettement, contrôlé de façon de plus en plus approximative par une puissance publique qui n'en a plus ni les moyens humains, ni le savoir-faire. Notre note propose des éléments de réponse à trois niveaux distincts mais complémentaires. Le premier consiste en un guide pour la réflexion des managers publics, au travers de cinq questions préalables à un choix stratégique d’externalisation. Le deuxième consiste en l’identification des normes dont la modification devrait être entreprise afin de pouvoir procéder à la réinternalisation progressive des fonctions les plus stratégiques parmi celles aujourd’hui sous-traitées. Le troisième questionnement s’adresse à notre société dans son ensemble : souhaitons-nous conserver la capacité à agir du service public ? Si la réponse est positive, alors il est temps de modifier les contraintes budgétaires, juridiques ou institutionnelles qui l’entravent et le poussent à confier une part toujours croissante de ses missions au secteur privé...."    [Souligné par moi.]        ___________________
Partager cet article
Repost0

1 2 3 4 5 6 > >>