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Chômage d'aujourd'hui

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Vers un mieux?

               Sujet polémique s'il en est, la question du chômage revient régulièrement dans le discours politique.   Les chiffres présentés régulièrement sont périodiquement scrutés, analysés, débattus, souvent contestés, parfois objets d'âpres débats. Depuis les années 70, ils sont devenus des marqueurs politiques. On comprend qu'on puisse les édulcorer et même parfois les tordre  pour mettre en valeur telle ou tel choix économique, telle politique sociale.                                       Il est probable que les chiffres annoncés par le gouvernement soient fondés, étant donné le rebond inattendu de l'après Covid et les quelques mesures favorisant l'apprentissage des jeunes. Mais n'est-ce pas seulement conjoncturel ou en trompe l'oeil? Le phénomène n'est pas simple à analyser et par certains côtés paradoxal, mais pour l'essentiel ce sont tout de même des emplois courts, semblant servir de variables d'ajustement, dans une période faste qui peut ne pas durer. Pour certains, ces progrès seraient à nuancer et même à minimiser fortement. Aussi bien au niveau des données chiffrées que des modes de rémunération.                                                                                                                                                           Les vrais chiffres du chômage sont toujours à discuter, car ils sont le produit de modes de calcul qui souvent  échappent au commun des mortels. Il importe de relativiser.  L'utilisation des mathématiques, notamment statistiques, dans les sciences humaines, est souvent sujette à caution.     Surtout dans le domaine de l'économie, où les données ne sont pas neutres, les paramètres sont souvent partiels ou biaisés , et parfois les intentions frôlent la distorsion, quand l'objet d'étude est particulièrement sensible, mettant en question des choix politico-économiques..  C'est ainsi que la notion de taux de chômage est régulièrement débattue, ne faisant pas l'unanimité, loin de là, n'étant pas forcément un indicateur pertinent de la bonne santé de l'économie.


          Quand on parle de l'emploi et des variations du taux de chômage, on se trouve sur un terrain sensible, parfois miné, où domine la langue de bois, les parti-pris et parfois les manipulations. Pour des raisons souvent évidentes d'auto-justification. Les données officielles, à un moment donné, sont rarement fiables. Quand on évoque le petit nombre de chômeurs aux USA ou en Allemagne, on omet souvent de dire quel type d'emploi il s'agit.
            _______________L'économiste R.Godin nous invite à la prudence dans le maniement des données statistiques concernant le chômage:
      " D'après la publication par l’Insee la semaine passée du taux du chômage pour le deuxième trimestre 2019, le gouvernement et ses partisans se sont accordé un satisfecit appuyé. L’institut de Montrouge a annoncé le 14 août un taux de chômage moyen de 8,5 % entre avril et juin, soit 0,4 point de moins qu’il y a un an pour le même trimestre de 2018. En France métropolitaine, le taux atteint 8,2 %, soit 0,2 point de moins qu’au premier trimestre et 66 000 chômeurs de moins. Les défenseurs de la politique gouvernementale de flexibilisation du marché du travail et de baisse de son coût ont alors crié à la preuve du succès de ces mesures. La ministre de l’emploi, Muriel Pénicaud, s’est même fendue en pleins congés du gouvernement d’un communiqué pour se féliciter des résultats de « l’action résolue et cohérente du gouvernement, et notamment des transformations du code du travail, de l’apprentissage et de la formation professionnelle ». L’économiste-conseiller d’Emmanuel Macron Gilbert Cette a proclamé que désormais la France pouvait voir son taux de chômage baisser avec une croissance assez faible et qu’il fallait y voir un effet des réformes.
    Pourtant, les choses pourraient être beaucoup moins simples qu’il n’y paraît. L’éditorialiste d’Alternatives économiques Guillaume Duval a ainsi souligné avec justesse que la baisse du deuxième trimestre était en réalité due à un recul du taux d’activité, qui est passé de 72,2 % à 72 % de l’ensemble de la population des 15-64 ans. Autrement dit, il y a moins de chômeurs parce que de plus en plus de personnes renoncent à chercher un emploi et basculent dans l’inactivité. Voilà qui, effectivement, relativise le « succès ». Non sans raison, d’autres ont aussi mis en avant le fait qu’une baisse du chômage accompagnée d’une faible croissance est le signe inquiétant à moyen et long terme d’une dégradation de la productivité de l’économie. Certains, enfin, pouvaient pointer la progression du « halo du chômage », autrement dit du nombre de personnes qui ne sont pas intégrées dans les statistiques du chômage parce qu’officiellement inactives mais qui cherchent néanmoins un emploi : 63 000 de plus, soit autant que la baisse officielle du nombre de demandeurs d’emploi.
        Certes, on pourrait s’interroger sur une forme de mauvaise foi liée à ces contestations. Lorsque le thermomètre ne donne pas une mesure satisfaisante, on peut être tenté de le briser ou de le relativiser par d’autres types de mesures. Mais en réalité, ces contestations mettent bien en évidence le fait que le taux de chômage pourrait ne plus être le bon instrument, ou du moins ne plus être le seul, pour mesurer la réalité du marché du travail. Rappelons que ce taux mesure la proportion dans la population active du nombre de personnes sans emploi, immédiatement disponibles pour occuper un poste et qui recherchent activement un emploi. Au sens du Bureau international du travail (BIT), être « sans emploi » signifie ne pas avoir travaillé une heure par semaine.Les mutations du travail dans le contexte néolibéral tendent progressivement à rendre la réalité décrite par ce « taux de chômage » très incomplète pour évaluer tant l’activité économique que la situation sociale d’un pays.
            Au reste, la question n’est pas que française. Depuis une dizaine d’années, le chômage a beaucoup baissé dans bien des pays occidentaux, notamment dans trois grandes économies : les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Pourtant, ces baisses s’expliquent moins par des performances économiques exceptionnelles, puisque, globalement, les taux de croissance sont restés plutôt modérés, que par des modifications majeures du marché du travail lui-même.
     Le cas de l’Allemagne est de ce point de vue intéressant. En septembre 2017, une étude de l’économiste Michael Burda de l’université Humboldt de Berlin attribuait le « miracle de l’emploi » allemand à deux phénomènes : le développement du temps partiel qui a permis une réduction de facto du temps de travail et la modération salariale. Autrement dit : le taux de chômage a baissé parce que les travailleurs allemands ont travaillé moins pour moins cher. Entre 2008 et 2018, selon les données de l’institut IAB de Nuremberg, le volume global d’heures travaillées a ainsi progressé de 8,8 %, mais le nombre de personnes en emploi a, lui, crû de 11,7 % et le taux de chômage a, de son côté, reculé de 8,1 % à 3,5 %. Autrement dit, l’évolution du taux de chômage a donné une vision déformée de la performance globale de l’économie allemande. Pour ne rien dire de la situation sociale : avec un taux de chômage près de trois fois moins élevé, l’Allemagne affiche un taux de personnes en risque de pauvreté selon Eurostat plus fort que la France (16,1 % contre 13,7 % pour la France en 2017). Mieux même : ce taux a progressé à mesure que le chômage baissait…
       Aux États-Unis, le taux de chômage a aussi reculé spectaculairement, passant de 10 % en octobre 2009 à 3,6 % actuellement. Là encore, l’apparence du plein emploi est complète. Sauf que, en regardant de plus près, on constate que le nombre d’employés de 15 à 64 ans n’a progressé en dix ans que de 1,15 million de personnes alors même que la population des 15-24 ans a progressé de 9,1 millions d’individus ! Difficile dans ce cadre de parler comme on l’entend souvent de « plein emploi » outre-Atlantique. Autrement dit, le taux de chômage ne reflète que très imparfaitement ici aussi la performance économique et sociale du pays. Pire même, il est le reflet de la très faible croissance de la productivité américaine depuis la crise. Les exemples de ce type pourraient être multipliés. Progressivement, le taux de chômage peine de plus en plus à remplir son rôle d’outil de mesure de l’efficacité d’une économie.
      Voilà trente ans, un taux de chômage bas signifiait presque à coup sûr que l’économie tournait à plein régime et pouvait ainsi créer des emplois. Il était aussi une forme de mesure du bien-être car l’emploi se traduisait par une sécurité financière accrue. La raison en était simple : l’emploi créé l’était alors à temps plein, il était protégé, et à durée indéterminée. Le taux de chômage était donc une mesure de prospérité et de bien-être. Désormais, l’emploi étant plus flexible et précaire, le taux de chômage tel que défini par le BIT n’a plus la même signification. Un travailleur à temps partiel ou qui a travaillé quelques jours peut cesser d’être statistiquement chômeur alors qu’il est toujours à la recherche d’un emploi et qu’il dispose de faibles revenus. Le plein emploi statistique ne dit alors plus forcément grand-chose de l’état de l’économie.
          C’est dans ce contexte que s’inscrit un des principaux débats qui secoue aujourd’hui la science économique autour de la « courbe de Phillips » et du taux de chômage naturel. En 1958, l’économiste néo-zélandais William Phillips avait établi à partir des données britanniques une courbe qui porte depuis son nom et qui décrit une relation inverse entre chômage et inflation. Plus le chômage est bas, plus l’inflation augmente via les salaires. Plus il est élevé, plus les prix tendent à rester sages. Cette courbe a connu de nombreuses interprétations, mais le consensus utilisé par les banques centrales depuis les années 1980 était que l’on devait faire un choix, en conséquence, entre l’inflation et le chômage. Or, sous l’influence des monétaristes, on a donné la priorité à la lutte contre l’inflation en cherchant par la politique monétaire à parvenir à un taux de chômage « naturel » appelé « NAIRU » (« non-accelerating inflation rate of unemployment »). À ce niveau (théorique) de chômage, l’inflation n’est plus censée accélérer parce que le marché du travail a trouvé son équilibre. Mais ce NAIRU n’est pas le plein emploi : pour que les deux notions coïncident, il faut, selon les économistes, réaliser des « réformes structurelles » pour permettre un fonctionnement du marché du travail parfait et donc un équilibre optimal.
      Depuis quarante ans, ces deux notions sont l’alpha et l’oméga des politiques économiques et monétaires. Les réformes défendues par Emmanuel Macron n’ont pas d’autres ambitions que l’application de cette théorie. Puisque le taux de chômage français est élevé, il faut abaisser le taux d’équilibre par des réformes, ce qui revient à faire jouer davantage l’offre et la demande. D’où la flexibilisation du marché du travail qui, selon cette théorie, permettra de faire baisser le taux de chômage et, donc, en parallèle, à mesure que l’on se rapproche du taux d’équilibre, de renforcer les revendications salariales des individus. Aussi Muriel Pénicaud peut-elle se réjouir de la baisse du taux de chômage qui serait bien une mesure du bien-être puisque l’emploi serait alors plus abondant et mieux rémunéré. Mais tout ceci est théorique. Car, dans les faits, on peine à identifier la courbe de Phillips et le NAIRU. On ne compte plus, en effet, les études sur la « mort » de la courbe de Phillips, pour la nier ou l’avancer. Une chose semble cependant certaine : l’exemple étasunien ou allemand laisse perplexe.
    Car, dans ces pays, le plein emploi ne s’est pas accompagné de pressions salariales fortes. Loin de là. Aux États-Unis, le taux d’inflation a reculé pendant les cinq premières années de la baisse du chômage. Il est ensuite resté très modéré. Le taux d’inflation actuel est de 1,8 % pour un taux de chômage de 3,6 %, alors même qu’en 2008 avec un taux de chômage de 4,5 %, la hausse des prix dépassait 3 %. Le phénomène est encore plus frappant en Allemagne, où on ne constate aucune accélération de l’inflation au cours des dix ans qui ont conduit le pays au plein emploi. Après une rapide envolée en 2016, la croissance des salaires réels allemands s’est stabilisée autour de 1 % et tend même à s’affaiblir. Fin 2018, le taux de chômage allemand a atteint son niveau de 1980, 3,3 %. Mais en 1980, l’inflation hors énergie et alimentation (celle donc qui peut être attribuée aux salaires) était de 5,3 % contre 1,2 % en 2018…
...Le taux de chômage classique ne semble donc plus réellement pertinent. Il n’est qu’un moyen très imparfait de définir l’état d’une économie et, encore plus, un bien-être social. Un plein emploi statistique acquis à coups de modération salariale, de précarisation de l’emploi et de réduction du temps rémunéré de travail est en réalité une machine à creuser les inégalités. Là encore, les exemples allemand, américain et britannique le montrent assez clairement. Il y a alors un paradoxe : plus le taux de chômage est bas, plus le risque de mécontentement social peut être important. Dans une tribune récente publiée dans Le Monde, la sociologue Dominique Méda rappelle que « les mauvais emplois ont un coût social » et politique. Or les réformes néolibérales font le choix du plein emploi statistique au détriment de cette qualité de l’emploi. Tout est bon, tant qu’on a un travail, même précaire, même mal payé. Et, pour enfoncer le clou, on réduit les indemnisations chômage afin que cette vérité soit vérifiée. La pierre angulaire des réformes Hartz en Allemagne était précisément la réduction de la durée d’indemnisation et le renforcement de l’obligation de prendre un emploi pour les chômeurs de longue durée. C'est la voie suivie avec la réforme du chômage par le gouvernement français. Mais ce chemin est des plus dangereux. On comprend aisément pourquoi : le mécontentement ne peut que naître du contraste entre une situation présentée comme idéale, le plein emploi, et la réalité sociale vécue.

    Il serait donc urgent de relativiser le taux de chômage et de cesser de le voir comme un indicateur de performance économique et de bien-être. Il est, au contraire, utile de le compléter par d’autres données : taux d’activité, salaires, mesures des inégalités, qualité des emplois. Mais la pratique politique est bien loin d’une telle nuance. L’obsession du taux de chômage, la promesse que les délices de la prospérité accompagnent sa baisse, tout cela est, il est vrai, politiquement plus vendeur. Cela permet aussi de mieux « vendre » la poursuite des réformes néolibérales qui pourraient pourtant bien être à l’origine de l’inefficacité du taux de chômage… Il y a donc fort à parier que le gouvernement continuera à n’avoir comme objectif que la baisse de ce taux. Quel qu’en soit le risque."   _____________________

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Et si on parlait français?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

    Français en souffrance    (bis repetita et plus..)
                                                                    Le Président Macron a déclaré être pour la promotion de la langue française. Bravo!

      Il est temps. Notre langue est malade d'apprentissages devenus déficients, de laxisme galopant, de mimétismes ridicules par rapport au globish dominant, chez le coiffeur du coin comme dans l'entreprise. Sans justification économique.
     C'est la pensée qui est affectée par certaines pratiques laxistes, par exemple dans la confusion trop courante entre l'usage du futur et du conditionnel, dans l'abandon progressif du passé simple, ce qui n'est pas conséquence dans la compréhension et le raisonnement.
  La défense du français est une question de bon sens avant d'être un réflexe de défense culturelle, car la pensée et son expression sont intimement liées. On pense comme on parle.
       Mais la réalité semble bien démentir les propos du Président:
            ...Notre Président nous donne plus l'impression d'être un VRP de l'anglais que d'être un promoteur de la langue française et du plurilinguisme.Bien sûr, il ne s'agit pas pour nous d'être négatifs pour le plaisir de nous torturer l'esprit,mais que penser, tout de même, du "Made for Sharing" du Comité de candidature de Paris-2024 que M. Macron a soutenu, alors que des associations de défense de la langue française l'avaient condamné, ainsi que l'Académie française ? ;  que penser aussi du fait que M. Macron ait laissé la délégation française de candidature de Paris-2024 s'exprimer majoritairement en anglais à Lausanne et à Lima devant les membres du CIO, alors que le français a le statut officiel de première langue de l'Olympisme (art.24 de la Charte olympique) et que chaque membre du CIO disposait, qui plus est, de la traduction simultanée ? ;  que penser du "Make our planet great again" que M. Macron a lancé aux yeux du monde entier ? Est-ce ainsi que l'on fait la publicité du français ? 
         On sait que résister à l'angliche envahissant n'est pas chose facile. La vigilance devrait être constante, comme chez nos amis québécois.
   Que le basic englisch domine dans le domaine des affaires est une donnée historique, peut-être provisoire. Mais l'anglomanie généralisé est d'un ridicule achevé, même dans les couloirs de certains ministères français ou dans les notes internes de service bancaires.
      Dans le contexte d'une francophonie qu'on proclame bien haut, cela n'est pas la meilleure voie à suivre:
    "Les exemples de désertion du combat pour la défense de la langue française sont si nombreux et si quotidiens qu’ils pourraient donner lieu à l’écriture d’une nouvelle version de L’étrange défaite de Marc Bloch. Nous ne sommes pas dans des causes conjoncturelles (comme certains voudraient nous le faire croire) mais dans des raisons structurelles face au tsunami ininterrompu de la langue anglaise. Il n’y a pas plus d’écoles de commerce dans notre pays. Elles ont cédé la place aux « Business Schools ». La compagnie publique Air France ne trouve pas mieux de trouver comme slogan que « Air France. France is in the Air », pensant conquérir des parts de marchés avec ce genre de publicités à deux balles. Le monde des affaires et du commerce est gangréné par le globish alors que les mots français existent et sont parfois plus élégants à entendre et à comprendre. La diplomatie française a capitulé depuis belles lurettes, ayant désormais honte de parler français dans les réunions internationales, laissant le soin de le faire à leurs collègues africains déboussolés par cette défaite en rase campagne. À l’Union européenne, le Français est en train de se transformer en langue vernaculaire. Pourquoi ne pas profiter du « Brexit » pour réclamer que les deux langues officielles de l’Union soient le Français et l’Allemand ? Pourquoi ne pas refuser les candidatures au poste de commissaire européen de tous ceux qui n’auraient pas un niveau suffisant de Français et s’engageraient à l’utiliser ? Que fait Michel Barnier, le piètre négociateur européen lorsqu’il se rend à Londres pour prolonger ses discussions sur le « Brexit » ? Il ahane ses fiches d’entretien (« speaking notes ») préparées par ses collaborateurs dans un mauvais anglais. A-t-il honte de parler sa langue maternelle ? Honteux pour pareil triste sire qui se revendique de l’héritage gaulliste !"
           L' idée pour le français de E.Macron souffre de quelques défaillances.

  Elle devrait être défendue tous azimuts dans tous les domaines "...dans les organisations internationales, notamment à Bruxelles et à Genève et appliquer sérieusement le vademecum adopté il y a 10 ans – Cela signifie promouvoir partout où on le peut et avec persévérance le plurilinguisme, en évitant d’être dans un rapport de forces bilatéral face à l’anglais- ce qui appelle des stratégies d’alliance contre les tenants du tout-anglais avec la Chine, le Brésil, l’Espagne, les Latino-américains, les Russes, etc...Remettre aussi de l’ordre chez nous dans les priorités de l’Education nationale, en prenant conscience que, pour que l’on parle davantage le français, nous devons connaître et pratiquer la langue des autres , et pas seulement l’anglais. Quelle erreur de songer à supprimer les classes bilingues alors qu’il faut au contraire les multiplier ! Enfin, et ce n’est pas le moins important, devrait être poursuivie une politique dynamique valorisant le métier de traducteur et d’interprète et visant à en favoriser 
     On a oublié que l'anglais et le français sont historiquement et linguistiquement plus proches qu'on ne le croit, que l'anglais est une langue française, qu'il fut un temps où la langue française envahissait l'anglais. On en retrouve bien des traces.
    On pourrait dire que l'anglais (ou plutôt certains de ses usages), moqués par beaucoup d'anglo-saxons, a tué le sein qui l'a nourrit. (*)
    Notre langue sous influence demande un retour à une pratique légitimement fière et décomplexée, sans cocoricos absurdes.
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     (*) - Un article du New-York Times soulignait  "ce phénomène d’anglomanie qui semble se généraliser dans toute la France et dont les illustrations ne laissent pas d’étonner. La langue de tous les jours en est affectée ; dans les commerces, les médias, les publicités, en politique, on emprunte directement à l’anglais pour faire moderne, tendance, à la page, pour se distinguer de la « plèbe » restée franchouillarde, pour marquer son appartenance à un monde unifié, globalisé, interconnecté, électrostatique, sans frontières. Les emprunts à l’anglais sont de plus en plus délibérés, choisis à la manière d’une signature, d’un logo, d’une image de marketique qu’on lance à la volée pour épater le Gaulois ; plus l’emprunt est fracassant, grossier, tonitruant, meilleure est la réclame. Ainsi à la télévision française organise-t-on des « Talk », comme si la langue française était sans ressource pour nommer une émission de variété. Même le monde de la littérature se place sous le patronage de l’anglo-américain. Ainsi, s’inspirant du Courrier International, pourtant fondé comme une entreprise d’ouverture à la diversité linguistique, un magazine de recensions de livres a pris le nom de Books , façon désinvolte d’annexer une publication française au modèle anglo-saxon de revue littéraire (comme le New York Review of Books). Sur la scène parisienne, se faire jouer les trésors de la littérature française en anglais semble être du plus grand chic : ainsi le renommé théâtre du Châtelet a-t-il mis à l’affiche du 28 mai au 4 juillet 2010 une production anglaise de la comédie musicale Les Misérables d’Alain Boublil et de Claude-Michel Schönberg originalement conçue en français d’après le célèbre roman de Victor Hugo. (Quand verra-t-on sur les scènes londoniennes une comédie musicale Hamlet ou King Lear en français ?)
        Dans les grandes entreprises françaises, l’anglais a supplanté le français dans les rouages névralgiques ; mêmes les entreprises à vocation strictement nationale voient arriver à leur tête des armées de jeunes managers formés à l’anglo-saxonne, pressés d’appliquer les recettes apprises en anglais à la lecture de manuels américains. Les universitaires français se convertissent aussi frénétiquement à l’anglais. Le prestige des publications dans les grandes revues et maisons d’éditions françaises a faibli ; les embauches dans les universités, les promotions, les honneurs se jouent de plus en plus sur la capacité à publier en anglais dans les forums mondialement cotés, à s’insérer dans les réseaux de recherche « européens » où tout se décline en anglais. Les grandes écoles et les universités françaises, au nom d’une autonomie fraîchement accrue, multiplient les programmes et les formations bilingues ou donnés strictement en anglais, dans l’espoir de toucher une part du marché lucratif des étudiants étrangers qui rêvent de vivre « a french experience » sans dépaysement linguistique. Il n’est pas rare que des professeurs français se vantent de donner leur cours en anglais, sans protestation des bacheliers français, au grand dam des étudiants…. étrangers que la France séduit encore par la langue et la culturex. Même le vocabulaire de la politique française se ressent de cette anglomanie. Le secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, a proposé en avril 2010 de renouveler les politiques sociales françaises en s’inspirant du « care » britannique v. La diplomatie française s’est mise aussi à l’english, en publiant, sous l’impulsion de Bernard Kouchner, ses cahiers (Mondes) en version bilingue. On applaudit même en France à « l’impérialisme cool de l’anglais », ainsi que l’a fait le thuriféraire de la culture américaine Frédéric Martel, dans un texte publié dans Le Point du 28 juillet 2010, « Français, pour exister, parlez English  », où il clame sans ambages sa conviction que le français est incapable d’être autre chose qu’une langue de Gaulois rétifs à la modernité, sans dimension internationale ni même européenne.
  Si le français fut l’une des langues fondatrices de la construction européenne, il se recroqueville aujourd’hui dans l’arrière-cour de l’Union européenne, détrôné par un « euroglish » triomphant. ..
."

__Même Alain Touraine se croit obligé d’utiliser l’anglais pour faire une communication à Montréal , dans le cadre d’une réunion... sur la francophonie !
   Nos politiques pourraient montrer l'exemple, ainsi que Bruxelles, qui en rajoute.... 
   Stop à l'anglomania
_

 

______________________La fuite en avant vers le tout-anglais correspond à des rapports de forces politiques clairement explicités:
 A  l'heure ou le libre-échange euro-américain veut se mettre en place, il faut se remettre en mémoire quelques affirmations non dépourvues d'ambiguïtés:
-"L'Anglais est la langue du vainqueur", disait le général Jean Béca
-« L’anglais est l’avenir de la francophonie », osait B.Kouchner
-Dans son rapport de 1987/88, le directeur du British Council écrit «  Le véritable or noir de la Grande-Bretagne n’est pas le pétrole de la Mer du Nord mais la langue anglaise . Le défi que nous affrontons est de l’exploiter à fond.  »
  Il y va de l’intérêt économique et politique des États-Unis de veiller à ce que, si le Monde adopte une langue commune, ce soit l’anglais et que, s’il s’oriente vers des normes communes en matière de communication, de sécurité et de qualité, ces normes soient américaines et que, si ses différentes parties sont reliées par la télévision, la radio et la musique, les programmes soient américains ; et que, si s’élaborent des valeurs communes, ce soient des valeurs dans lesquelles les américains se reconnaissent...Les Américains ne doivent pas nier le fait que, de toutes les nations dans l’histoire du monde, c’est la leur qui est la plus juste, la plus tolérante, la plus désireuse de se remettre en question et de s’améliorer en permanence, et le meilleur modèle pour l’avenir ...affirmait David Rothkopf dans Praise of Cultural Imperialism, 1997)

___
 Français, pour exister, parlez English ! 

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Orbanisation

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Un symptôme et un signal

                                    Pour la quatrième fois, le maître de Budapest a remporté les élections, cette fois-ci porté par le conflit ukrainien et félicité par Marine Lepen. Les dérives autoritaires ne peuvent que continuer...              Le nouveau succès électoral du maître de Budapest n'est nullement affecté par les rodomontades de Bruxelles, qui fait la morale à l'enfant terrible, tout en continuant à subventionner comme jamais une économie qui se porte mieux..

    Derrière les menaces, l'Eurogroupe montre sa faiblesse structurelle, tout comme à l'égard de la ligne polonaise du moment. D'autant plus que Victor joue habilement un double jeu: plutôt sage à Bruxelles, il se déchaîne contre elle à Budapest, jusqu'à la caricature, directement ou par le biais des médias devenus les fidèles serviteurs de sa cause.
     Même si une certaine inquiétude est apparente dans la capitale, le reste du pays est acquis aux thèses de Victor, qui sait jouer habilement sur les peurs." Le Fidesz est accusé d'avoir muselé depuis 2010 de nombreuses institutions et contre-pouvoirs du pays, comme les médias et la justice, mais aussi l'économie et la culture. Le tout légalement, grâce à sa super-majorité au Parlement et sans s'émouvoir des critiques de la Commission européenne et de nombreux observatoires internationaux.
      Même si les dérives hongroises  ne datent pas d'aujourd'hui, se trouve ainsi confortée une certaine radicalisation des droites européennes.
      ...Aujourd’hui, les alliés de Viktor Orbán ne se limitent pas à cette Mitteleuropa perdue dans le multiculturalisme européen. Ils se trouvent aussi dans l’ancienne Europe des Quinze et dans les derniers succès électoraux engrangés çà et là ces derniers mois : entrée de l’AfD au Bundestag en septembre, formation d’une coalition gouvernementale par une droite anti-migrants avec l’extrême droite du FPÖ en Autriche en décembre, campagne électorale dominée par la thématique migratoire en Italie et score historique pour la Lega (extrême droite) en mars
     Dernièrement, c’est même une partie de la droite allemande qui a pris un virage anti-migrants. Le tout nouveau ministre de l’intérieur et chef de la CSU, Horst Seehofer, a marqué le coup dès son entrée en fonction, le mois dernier, en assurant que l’islam n’appartenait pas à l’Allemagne. Quant à la droite française, son orientation, depuis que Laurent Wauquiez a pris la présidence des Républicains, ne laisse pas trop planer de doutes : elle serait clairement islamophobe.    
    Plus que la critique des institutions européennes, c’est ce positionnement identitaire qui rassemble aujourd’hui une partie grandissante des droites européennes... Et qui se trouve légitimité par la reconduction, pour un troisième mandat consécutif, d’un chef de gouvernement en exercice. Une convergence inquiétante, à un an des élections européennes....
     L impuissante de l'Europe face à Viktor Orban est manifeste, victime d'une volonté d'élargissement inconsidéré qui la paralyse. Plus Orban bombe le torse, plus Bruxelles semble impuissant. Que faire face à l’enfant terrible de l’Europe ? Comment faire rentrer dans le rang ce cancre qui a l'insolence de mordre dans l'Etat de droit en lui riant au nez ? La Commission européenne a beau taper du poing sur la table, cela fait déjà huit ans qu'elle se casse les dents sur le cas Orban…

     Dans le pays orange, où la corruption ne va pas se réduire, l'opportuniste de nouveau aux commandes pour quatre ans de plus, ne va pas se gêner pour conforter son pouvoir en utilisant à son profit les faiblesses de l’Union européenne 
       Quatremer n'avait pas tout à fait tort.
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Tristes prisons

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Un record français.

               Nous avons le triste privilège, en ce qui concerne la politique carcérale: nous détenons un record, pas seulement en nombre, mais aussi en qualité. Malgré, en ce domaine; quelques expériences menées ici où là. Et ce depuis longtemps. Le surpeuplement et la promiscuité sont connus et souvent dénoncés depuis des décennies. On parle de retard français . il faudrait parler de honte française. Un système indigne.  L'ignorance est grande sur ce sujet. L'idéal de réinsertion reste encore marginal. Surveiller et punir, comme disait Foucault, reste encore le maître mot de nos prisons nationales.   


                     "...Cinq ans après deux rapports déjà accablants, le Conseil de l’Europe vient de classer les prisons françaises parmi les pires de l’Union. A l’initiative du Nouvel Observateur, plus de 200 personnalités ont voulu réagir: NOUS, citoyens français et européens, responsables politiques, professionnels de la justice, personnalités du monde du spectacle ou de la société civile, surveillants, anciens détenus, victimes d’erreur judiciaire, parents de victimes ou familiers de personnes écrouées, nous disons la honte que nous inspirent les prisons de notre pays.                                                                                                                         Sans jamais oublier le respect dû aux victimes et à leurs proches, nous voulons rappeler haut et fort que, dans la peine d’emprisonnement, la privation de liberté est la seule punition prévue par la loi. L’humiliation, l’abaissement de la personne, l’abandon des détenus à la violence et à la loi du plus fort, bref, la négation de l’homme dans le prisonnier, qui ont cours dans le monde carcéral, sont des châtiments arbitraires et inhumains. Ils sont de plus inefficaces : la destruction psychologique de tant de détenus contredit aussi le légitime souci de la sécurité publique. Quand elles sont lieux d’injustice, les prisons sont l’école du crime. La protection des citoyens, premier devoir de l’Etat, suppose des prisons qui amendent le condamné et non, comme trop souvent, des cloaques surpeuplés sans règle ni merci qui provoquent la récidive.                                                                                                                                          Souvent des justes ont crié leur indignation et alerté l’opinion. Parfois les responsables ont répondu par des diagnostics lucides et des promesses précises. Les bonnes intentions se sont rarement concrétisées. Alors que des mesures peuvent et doivent être prises immédiatement.  Nous, citoyens d’un pays qui se veut exemplaire dans le combat pour les droits de l’homme, réclamons la mise en œuvre immédiate d’une politique de modernisation – favorisant les peines alternatives et le suivi – et d’humanisation de la prison mettant en accord les actes de la France avec ses principes..."     _____________________

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Néolibéralisme en question

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Sa logique, ses effets, ses contradictions (vu des USA, creuset du système)

              La logique du néolibéralisme est maintenant bien cernée. Même si les dogmes fondamentaux sont contestés, les crises aidant, l'architecture du système est toujours là. Les lois du marché commencent à être sérieusement remises en question, non sans contradictions, et la main de Dieu a pris un coup de vieux. Depuis la crise de la Covid et les interventions forcées de l'Etat au coeur même du réacteur économique, un certain keynésianisme refait surface. Mais pour quels lendemains? La révolution de l'école autrichienne a fait long feu. De plus en plus, la machine à creuser les inégalités est remise ne question et l'on reparle d'intérêts communs, de services publics...IL y a encore du boulot...

 

 

 

 

_________"....Si vous avez la malchance de résider dans une ville où des centres de données abritent des serveurs informatiques qui stockent tout, depuis les données financières de sociétés géantes jusqu’aux secrets militaires, il est probable qu’un bruit fort et strident devienne le fond sonore angoissant de votre vie. Le son monte et descend, mais il est toujours là, ne vous permettant jamais de vous détendre complètement. Au bout d’un certain temps, le stress lié à ce type de bruit ambiant peut vous épuiser, doublant le risque que vous souffriez de maladie mentale et augmentant le risque de maladies comme les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux.       Vivre dans une économie dominée par les principes néolibéraux peut ressembler à cela : un bourdonnement de fond et un stress psychologique constant.     Cette sensation de vulnérabilité ne disparaît jamais vraiment. Au lieu de se répartir socialement les risques de la vie, nous sommes de plus en plus accablés par le poids de l’existence dans un monde moderne d’une complexité écrasante. Nous sommes des individus solitaires, et nous nous battons pour rester à flot, quelle que soit notre situation. Il y a quelques heureux gagnants, bien sûr (et encore, nombre d’entre eux sont psychiquement abîmés), mais la plupart d’entre nous sommes contraints de livrer une lutte et entrer dans une concurrence acharnées pour obtenir des récompenses. Jeux de la faim, jeux pour un statut, jeux de pouvoir, la liste est longue.                             De manière plus globale, l’impact cumulé de filets de sécurité de piètre qualité, de pratiques commerciales rapaces, de politiques axées sur l’argent et de graves inégalités économiques est en train de détruire tout espoir pour l’avenir, alors que nous en avons besoin pour survivre. La confiance que nous avons les uns envers les autres et envers nos institutions est en train de se dissoudre. Notre santé mentale et physique ne peut pas résister à tout cela.                 Selon la Johns Hopkins Medicine, des affections éprouvantes comme la dépression sévère, les troubles bipolaires, la schizophrénie et les troubles obsessionnels compulsifs figurent parmi les principales causes d’invalidité constatées dans les économies de marché développées. Même avant la pandémie, plus d’un quart des adultes américains étaient affligés d’un trouble mental diagnostiqué. Et puis, en 2020, les taux mondiaux de dépression et d’anxiété ont grimpé en flèche de plus de 25 %, une hausse stupéfiante sur un an, liée à la pandémie, qui a particulièrement touché les femmes et les jeunes. Des médecins américains ont déclaré que les crises de la santé mentale chez les enfants relevaient de l’état d’urgence. Et toute cette détresse mentale alimente les maladies physiques, comme les accidents vasculaires cérébraux, les maladies cardiaques, le diabète et l’arthrite.                                                                        Le mouvement néolibéral du vingtième siècle, la philosophie économique dominante de ces cinquante dernières années aux États-Unis et dans une grande partie du monde, nous a imposé une fausse vision du monde avec une myriade de conséquences négatives pour le bien-être humain. La question est de savoir comment nous pouvons nous remettre de ces maladies. Nous ferions mieux de le découvrir rapidement, car un demi-siècle de pression incessante de cette philosophie toxique est en train de nous briser.               Les racines de la perspective néolibérale sont nées d’un monde brisé par l’effondrement des empires et du chaos engendré par la première guerre mondiale. Dans les années 1920 et 1930, des économistes autrichiens et des défenseurs du monde des affaires, comme Ludwig von Mises et Friedrich Hayek, travaillant à l’époque à la Chambre de commerce de Vienne, s’inquiétaient de savoir comment une nation vassalisée comme l’Autriche pourrait s’en sortir dans le nouveau paysage mondial. Le spectre du socialisme et du communisme en Hongrie, qui faisait partie de l’ancien empire des Habsbourg, et qui a brièvement basculé dans le rouge en 1919, ajoutait à leur anxiété. Ils craignaient également que des États-nations en plein essor se saisissent des rênes de l’économie en prenant des mesures telles que l’augmentation des droits de douane – tout particulièrement s’agissant de nations gouvernées par des régimes démocratiques qui reconnaissaient les intérêts des gens ordinaires. La généralisation du droit de vote universel pour les hommes a déclenché le signal d’alarme indiquant que le pouvoir était en train de basculer.                                      Comment les capitalistes pourraient-ils survivre sans un vaste réseau de colonies sur lequel compter pour obtenir des ressources ? Comment pourraient-ils se protéger de l’ingérence continue dans les affaires et des saisies de la propriété privée ? Comment pourraient-ils résister aux exigences démocratiques croissantes pour un partage plus large des ressources économiques ?        C’était là de grandes questions, et les réponses néolibérales reflétaient leurs craintes. De leur point de vue, le monde politique semblait effrayant et incertain – un endroit où les masses s’agitaient en permanence pour déstabiliser le domaine de l’entreprise privée en formant des syndicats, en organisant des manifestations et en exigeant la réaffectation des ressources.                                                                                           Ce que les néolibéraux voulaient, c’était un espace sanctuarisé exempt de cette agitation – une économie mondiale transcendée où les capitaux et les marchandises pourraient circuler sans contrainte. Ils imaginaient un endroit où les capitalistes seraient à l’abri des processus démocratiques et protégés par des institutions et des lois savamment édictées — et par la force, si nécessaire. Les néolibéraux n’étaient pas franchement opposés aux démocraties tant que ces dernières étaient en capacité de fournir un refuge sûr aux capitalistes, et si ce n’était pas le cas, beaucoup pensaient que l’autoritarisme ferait aussi très bien l’affaire.                Ces premiers frémissements de néolibéralisme étaient donc une sorte de religion, une aspiration utopique à un monde abstrait et invisible de chiffres que les humains ne pourraient pas gâcher. Dans cette terre promise, parler de justice sociale et de plans économiques visant à améliorer le bien général était une hérésie. La « société » était un domaine qui, au mieux, devait être strictement séparé de l’économie. Au pire, elle était l’ennemie de l’économie mondiale — un domaine gênant de valeurs non marchandes et de préoccupations populaires qui entravaient la transcendance capitaliste.     Après la Seconde Guerre mondiale, les néolibéraux se sont organisés officiellement sous le nom de Société du Mont-Pèlerin, au sein de laquelle des personnalités comme Hayek ont défendu la vision d’un « ordre concurrentiel » dans lequel la concurrence entre les producteurs, les employeurs et les consommateurs assurerait le bon fonctionnement de l’économie mondiale et protégerait tout le monde des abus (une sacrée idée). Les dispositifs de protection tels que les assurances sociales et les cadres réglementaires étaient inutiles.                                                                              En gros, le marché était un dieu, et les gens étaient là pour le servir – et non l’inverse.     Pour les néolibéraux, le vingtième siècle ne se résume pas à la guerre froide, elle n’a pas vraiment grand intérêt pour eux. Il s’agit de lutter contre des choses comme le New Deal de Franklin Roosevelt et des projets totalitaires d’égalité économique qu’ils considèrent comme dangereux. Comme le dit l’historien Quinn Slobodian dans son livre Globalists : The End of Empire and the Birth of Neoliberalism, ils visent le « développement d’une planète interconnectée par le biais de l’argent, l’information et les biens, où l’avancée emblématique du siècle n’est pas une communauté internationale, une société civile mondiale ou l’approfondissement de la démocratie, mais un objet en constante intégration qu’on appelle économie mondiale et qui est accompagné des institutions spécialement créées pour la protéger ».                   Les néolibéraux se sont consacrés à la protection d’un commerce mondial qui ne serait soumis à aucune restriction, à la liquidation des syndicats, à la déréglementation des entreprises et à la privatisation et l’austérité, usurpant ainsi le rôle du gouvernement dans la fourniture des biens communs. S’il est vrai que la plupart des gouvernements occidentaux, ainsi que de puissantes institutions mondiales comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, sont aujourd’hui fortement influencés par le néolibéralisme, ce n’est qu’après la crise financière mondiale de 2007-2008 que la plupart des gens ont entendu parler de cette doctrine.                                                    C’est parce que, pendant longtemps, le néolibéralisme a envahi nos vies comme un virus furtif.         Au cours de la première moitié du vingtième siècle, ce sont surtout et avant tout des gens riches et de droite qui ont adhéré à la vision néolibérale de l’ordre mondial. L’économiste John Maynard Keynes, qui préconisait l’intervention de l’État dans le fonctionnement des marchés pour protéger les gens contre le type de défaillances et d’abus si clairement mis en évidence lors de la Grande Dépression, a eu beaucoup plus d’influence.                  Mais les néolibéraux ont entretenu leur rêve d’utopie économique en construisant patiemment des institutions, en se concentrant sur la création de contraintes juridiques imposées aux démocraties et en implantant leurs idées dans des institutions supranationales et dans des avant-postes universitaires comme l’université de Chicago. Ils ont financé des symposiums, des universitaires, des livres et des rapports, et se sont acquis des ambassadeurs connus, comme l’économiste Milton Friedman, et d’autres moins connus mais influents, comme James Buchanan, le seul américain des états sudistes à avoir reçu le prix Nobel d’économie.                                                              Ce n’est que dans les années 1970 que le néolibéralisme s’est imposé, lorsque les conservateurs ont imputé les bouleversements économiques à un excès de dépenses publiques et de main-d’œuvre. Dans les années 1980, la championne du néolibéralisme, Margaret Thatcher, se sentait parfaitement en confiance et laissait libre cours à son programme : « La politique économique n’est qu’une méthode, l’objectif est de changer le cœur et l’âme », prônait-elle.            Il semble étrange de mentionner cette théorie lugubre en la rapprochant de l’âme humaine, mais Thatcher avait raison. Le néolibéralisme cherche à modifier la façon dont nous, êtres humains existons dans le monde, à changer nos relations entre nous et ce que nous attendons de la vie. Au fil du temps, nous cessons de nous considérer comme des êtres mutuellement responsables ayant un destin commun pour devenir des atomes isolés responsables uniquement de nos propres vies. Peu à peu, nous passons du statut de citoyens autonomes à celui de personnes destinées à être asservies à des puissances économiques arbitraires qui se trouvent bien au-delà de notre portée ou de notre compréhension. Notre humanité s’efface au profit d’un royaume abstrait de chiffres et de données incompréhensibles, et nous ne sommes guère plus que des marchandises, voire des entités externalisées, dans une économie mondiale invisible dirigée on ne sait comment par un poing invisible.                                Il n’est pas surprenant que ce mode d’existence produise des maladies de l’esprit, du corps et de l’âme, exaltant certains de nos instincts les plus dérangeants tout en démolissant bon nombre des plus nobles.                                                                      L’un des principes fondamentaux de la philosophie néolibérale est que la vie consiste à être en compétition. Comme l’a décrit Slobodian, les architectes du néolibéralisme se sont attachés à « promouvoir des politiques visant à amplifier le rôle de la concurrence dans la définition et l’orientation de la vie humaine ». Pour eux, le monde idéal est un monde où chacun s’efforce constamment d’obtenir plus ou mieux que son voisin.          Dans une société dominée par ce type de pensée, on vous inculque un esprit de compétition à la minute même où vous entrez à l’école. L’expression la plus simple de votre vitalité, comme chanter, courir ou sauter, est rapidement placée dans un cadre compétitif. Vous ne pouvez pas simplement sauter de joie ; vous devez être le meilleur sauteur. L’objectif n’est pas la récompense intrinsèque de l’activité, mais le plaisir de battre quelqu’un d’autre, ou peut-être le soulagement négatif de ne pas être un perdant. Vous êtes éduqué à classer vos camarades selon qu’ils gagnent ou qu’ils perdent, et vous pressentez que vous devez simplement abandonner les activités dans lesquelles vous n’excellez pas.                       Peu à peu, vous vous méfiez à la fois de vos instincts naturels et des motivations des autres. Après tout, aider les autres à réussir signifie qu’ils peuvent gagner le prix à votre place dans un jeu à somme nulle. Penser de manière égoïste devient une seconde nature. Comme l’ont montré les chercheurs qui étudient l’impact du néolibéralisme, nous devenons des perfectionnistes agités, cherchant sans cesse à nous perfectionner.                     Comme l’a fait remarquer l’économiste politique Gordon Lafer, les écoles (dont le financement est de plus en plus réduit) deviennent le lieu où les enfants ordinaires sont conditionnés pour la servitude et une vie dans laquelle ils risquent soit de se retrouver bloqués, soit de glisser vers le bas de l’échelle économique.                                            Vous apprenez à accepter un monde où les possibilités sont en diminution et non en expansion..          Le sentiment de déconnexion augmente au fur et à mesure que la vie avance. Dans un pays comme les États-Unis, vous grandissez avec peu d’espoir que quelqu’un se soucie vraiment de vous, résigné à dépenser la majeure partie de votre énergie à essayer de financer les besoins de base de la vie, comme les soins de santé et l’éducation, tout en faisant face à des prédateurs aux formes multiples tels qu’une compagnie d’assurance, une banque, une société de services publics, un hôpital, une police, une… à vous de choisir – ces entités dont les néolibéraux ont fait en sorte qu’elles soient libérées des pressions de la réglementation et des recours juridiques. Si vous avez un problème, cela n’intéresse nullement l’État protecteur ; demandez à quiconque a essayé de négocier des frais bancaires ou des factures de services publics.            Vous commencez à comprendre que vous n’avez pas beaucoup d’influence dans le monde. La vie vous semble précaire, et c’est exactement ce que les néolibéraux veulent, car ils pensent que vivre ainsi est indispensable pour « discipliner » les gens afin qu’ils acceptent de rester à leur place dans un monde dirigé par les capitalistes.            En tant que citoyen, votre influence semble négligeable. Le néolibéralisme tend à affaiblir l’action politique des gens ordinaires, en nous offrant en compensation un large éventail de biens de consommation (souvent de piètre qualité). À mesure que la concentration des richesses prend le contrôle du système politique, on constate que les revendications de la plupart des gens – des soins de santé universels, un système fiscal dans lequel les riches paient leur part, une éducation abordable, des emplois décents, des droits reproductifs – est de plus en plus ignoré dans les politiques et les lois qui régissent nos vies. Les néolibéraux ne cherchent qu’une chose, accroître les droits et libertés des propriétaires, comme l’expliquait James Buchanan dans son livre de 1993, « Property as a Guarantor of Liberty ». Selon lui, tout individu n’est guère plus qu’un parasite qui essaie de saigner à blanc le capitaliste.                                              En 2007, Alan Greenspan a déclaré que « savoir qui sera le prochain président n’a guère d’importance, le monde est gouverné par les forces du marché ». Ce qu’il n’a pas précisé, c’est que les forces du marché sont gouvernées par les capitalistes, même si les néolibéraux prétendent que leur vision du marché ne conduit pas à des asymétries de pouvoir qui entraînent des pratiques monopolistiques, l’affaiblissement des droits légaux des citoyens et le transfert des risques des activités commerciales sur la société. Au moment où Greenspan faisait cette déclaration, les gens avaient commencé à s’habituer à l’idée que les marchés financiers prédateurs conçus par et pour les capitalistes s’étaient insinués dans tous les aspects de nos vies, de l’éducation à la médecine en passant par la police. (Bien sûr, peu de gens avaient fait autant que Greenspan pour que cela se produise, en raison de sa ridicule confiance dans la réputation comme substitut à une réglementation sérieuse).                                  Aujourd’hui, la vision néolibérale maladive est devenue prégnante au point où si vous vous retrouvez aux urgences d’un hôpital, un gestionnaire de fonds spéculatifs pourrait bien décider de votre sort. Perpétuellement angoissés dans notre existence atomisée, nous assumons seuls nos dettes et nos charges, habitués que nous sommes à faire, en faveur de « l’économie », le sacrifice de notre bien-être, nos habitats naturels et même, comme la pandémie nous l’a montré, notre vie.                                                                Au bout de ce chemin semé d’embûches, lorsque vous serez trop vieux pour travailler, vous serez probablement confronté à une retraite incertaine et sous-financée, tout en vous faisant gronder par les néolibéraux pour ne pas avoir été plus prévoyant alors que vous luttiez pour simplement survivre. Et même si vous avez élaboré les plans les plus minutieux, vous risquez d’être récompensé par une plus grande probabilité de maladie et par une mort plus précoce que chez ceux qui vous ont précédé.                                  Le néolibéralisme vous explique : « Tenez bon, parce qu’on ne peut pas faire mieux ». Faut-il alors s’étonner si nous commençons à nous écrouler ?                                        La pandémie de Covid-19 a mis en lumière la sombre gravité des échecs et des insuffisances de l’approche néolibérale – et pourtant, les gouvernements continuent de mettre en place des politiques qui privilégient la sécurité des entreprises plutôt que la vie de la grande majorité des gens.                                                                                Les travailleurs stressés ne peuvent tout simplement plus faire face. À une époque où la plupart des Américains s’inquiètent de l’économie, les travailleurs qui ont de bas salaires quittent leur emploi. Les données publiées par le Bureau of Labor Statistics en janvier 2022 illustrent une tendance à rendre son tablier si répandue que 2021 a été appelée « l’année de la démission ».                                                                      Contrairement aux idées reçues, les démissions ne sont pas majoritairement le fait des employés les mieux lotis qui choisiraient quelque chose de plus satisfaisant. Au contraire, ce sont les secteurs où les travailleurs sont mal payés qui ont enregistré le plus grand nombre de ces démissions. Alors qu’il ne semble pas rationnel qu’un travailleur préoccupé par la situation économique quitte un emploi même peu attrayant, peu flexible et faiblement rémunéré, il est logique de penser qu’un travailleur terrassé par la dépression et l’anxiété le fasse, incapable de gérer les exigences contraignantes tout en s’inquiétant de tomber malade, de s’occuper de ses enfants ou d’autres membres de sa famille et d’être obligé d’assumer des tâches supplémentaires alors que les employeurs peinent à pourvoir les postes. C’est tout simplement trop pour eux.        Le passage de l’État-providence au néolibéralisme signifie que vous êtes responsable de tout, même de ce qui échappe clairement à votre contrôle. Il faut réinventer la roue à chaque fois qu’un problème doit être résolu, comme payer pour sa maison, faire des études, se faire opérer ou prendre sa retraite. Chaque tournant réserve des surprises désagréables.                                    Le néolibéralisme n’est pas une philosophie du bonheur, car il véhicule la conviction que l’insatisfaction humaine est un état de fait non seulement naturel, mais aussi souhaitable. Il a eu un impact considérable sur la culture des États-Unis et d’autres pays où il est en vigueur et constitue un frein largement méconnu quant à la santé et au bien-être. Ce n’est pas un hasard si la prévalence des problèmes de santé mentale, tant au niveau national que mondial, est en hausse. Les mariages brisés, les phénomènes de dépendance, la solitude et le profond désespoir font des ravages.        Quelle est donc l’alternative ? Commençons par énoncer l’évidence. Une société saine n’est pas gérée pour le bénéfice économique de quelques riches capitalistes. Ça, c’est une société malade, et nous en sommes la preuve vivante.                                        Depuis les années 1980, nous sommes entraînés à considérer que cet état de fait, pourtant psychologiquement handicapant, est quelque chose de normal, alors qu’il est tout sauf normal.    Notre guérison passe en partie par le rappel de ce qui fait véritablement de nous des êtres humains. Des chercheurs ont découvert qu’un bébé de six mois présente déjà l’instinct d’empathie, ce qui montre que le fait de se préoccuper de ce qui arrive à nos semblables fait partie de notre ADN. Au niveau collectif, des anthropologues comme David Graeber ont montré que les sociétés humaines n’ont pas toujours été organisées selon des logiques de domination et des hiérarchies rigides. Nous disposons de choix, et nous sommes en mesure de privilégier ceux qui correspondent le mieux à nos instincts les plus positifs. Nous pouvons donner aux parents la possibilité d’élever leurs enfants, par exemple en faisant participer les pères à l’éducation des enfants dès la naissance, en offrant un congé parental sans distinction de sexe et en rendant les services de garde d’enfants abordables. Par extension, le fait de prendre soin des jeunes renforce notre capacité à prendre soin les uns des autres, de nos communautés et de la nature en général.                                                                                                       Notre bien commun est renforcé par des systèmes politiques dans lesquels les formes coopératives de participation et les besoins des gens ordinaires sont prioritaires. Cela signifie faire à peu près le contraire de ce que les néolibéraux défendent. Nous devons reconnaître que les gouvernements peuvent et doivent intervenir sur les marchés afin de protéger les gens des abus. Nous devons nous attacher inlassablement à écarter l’argent de la politique et à rendre le vote accessible à tous. Nous devons réglementer les entreprises, renforcer le pouvoir des travailleurs et veiller à ce que l’économie mondiale ne soit pas une simple course vers le bas mais un système dans lequel les besoins et les droits de tous les habitants sont pris en compte.                                          La guérison implique la création, comme l’a souligné l’économiste Peter Temin, d’une économie intégrée au lieu de l’économie morcelée que les néolibéraux et leurs descendants libertaires nous ont léguée. Nous devons nous concentrer sur le rétablissement et le développement de l’éducation et sur la réaffectation de ressources destinées à des politiques telles que l’incarcération de masse. Nous devons nous concentrer sur la mise en place et l’amélioration de filets de sécurité afin que la vie ne soit pas seulement une épreuve difficile et hobbesienne, [Selon Hobbes, l’état naturel de l’homme est d’être constamment en conflit et en compétition avec les autres, NdT] mais un voyage au cours duquel la créativité et les activités joyeuses sont accessibles à tous. Au lieu de nous focaliser sur la concurrence, nous devons mettre l’accent sur l’entraide et nous devons toujours garder à l’esprit, alors que les adeptes de la Silicon Valley cherchent à nous entraîner dans un métavers toujours plus abstrait, que nous sommes des créatures dotées d’un corps et que nous avons davantage besoin de liens sociaux dans la vie réelle que de connectivité numérique. Nous devons exiger d’être formés pour des emplois dignes, décemment payés et exempts d’abus.                          Les remèdes aux fléaux alimentés par le néolibéralisme consistent à faire ce qu’il faut pour renforcer notre sentiment de confiance et de destin partagé. Nous devons passer de la privatisation à l’intérêt public, du vol en solo au partage des risques, de la financiarisation à une économie équitable, du dénominateur commun au bien commun.           Un tel changement exige d’énormes ressources en termes d’endurance, d’engagement, de patience et d’audace. Les néolibéraux ont fait preuve de ces qualités. Ils ont pratiqué un jeu long et difficile pour faire accepter leurs idées antisociales et anti-vie comme étant la norme. Notre guérison et l’acceptation généralisée d’un meilleur récit, un récit plus sain, n’arriveront pas du jour au lendemain. Au début, les revendications en matière d’égalité économique, de droits politiques et de justice sociale sembleront radicales et futiles, et ceux qui les défendent seront traités de rêveurs et de cinglés. C’est exactement ce qui est arrivé aux néolibéraux lorsqu’ils ont commencé à exiger une terre promise universelle pour les capitalistes, une terre promise qui soit libre de toute contrainte démocratique. Ils ont encaissé les coups et ont continué à avancer.      Si nous apprenons à jouer sur le long terme, l’avenir pourra être notre et non leur monde. Cet atroce bourdonnement qui est à l’arrière-plan de nos vies pourrait alors être remplacé par un air sur lequel nous pourrons danser.  [Lynn Parramore, analyste de recherche principale, Institute for New Economic Thinking.] __________________________

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Varia

Publié le par Jean-Etienne ZEN

__ Dette

__ "Paresse"

__ Désarroi

__ Transition

__ Simplifier?

__ Ambigüité               

 

 

__ Extradition ?

__ Perturbateurs               

__ L'horreur

__ Durcissement

__Gentrification

__  Surexposition   

__ Ecrans toxiques

__ Transhumanisme

__Grand écart

__ Etranges expulsions

__Economie de guerre

__Droit de vote féminin

__ Prisons en question

__ Colonies de vacances

__ Histoire de rillettes    _______________________________

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Economie à courte vue

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Ça arrive plus d'une fois... 

                                 Comme disait M.Allais, « A toutes les époques de l’histoire, le succès des doctrines économiques a été assuré, non par leur valeur intrinsèque, mais par la puissance des intérêts et des sentiments auxquels elles paraissent favorables... La science économique, comme toutes les sciences, n’échappe pas au dogmatisme, mais le dogmatisme est ici considérablement renforcé par la puissance des intérêts et des idéologies ».   Maurice Allais_ 1968

                      La "science économique" peut être myope et même parfois parfaitement aveugle vis à vis de sa propre démarche et de ses fondements, comme dans toutes les sciences humaines.                                Jusqu'à se planter.    Nous nous sommes tous trompés, avouaient certains économistes libéraux au lendemain de la soudaine et violente crise de 2008. D'autres, comme Roubini et quelques autres avaient vu venir l'orage, avec un peut plus de recul théorique. 

 

        L'économie peut avoir sa rigueur, mais elle oublie trop souvent les postulats dont elle part, la part de choix et d'idéologie qui détermine sa démarche et ses résultats, qui fait qu'il peut arriver qu'elle ne fait qu'alimenter ses présupposés.     Au risque se tromper magistralement, comme l'a reconnu au passage Alain Greenspan, après la crise qu'il avait contribué à stimuler.
    Les économistes rigoureux le savent bien : il faut la jouer modeste en travaillant sur une matière aussi molle et aléatoire, historiquement marquée.

 

            C'est le risque permanent, bien souligné par J. Sapir, qui explique les profondes divergences de points de vue.
                         On peut être en désaccord plus d'une fois avec les analyses de J.Sapir, mais sur le sujet des limites de la science économique, qui est une science humaine, il est difficile de ne pas le rejoindre sur l'essentiel. Une étude qui n'est pas facile, mais qui décape et remet les choses à leur place, contre le dogmatisme de certains courants économiques inspirant souvent des choix politiques, qui ne sont pas sans conséquences;  l'école libérale de Hayek et de M. Friedman  ont inspiré la pensée libérale de Thatcher et de Reagan, avec leur croyances naïves en la toute puissance du marché et du caractère obsolète des régulations étatiques, dont s'est inspirée la conduite des affaires européennes.                                         On sait pourtant que l'économie n'est pas une science dure et la crise a bien montré à quel point beaucoup se sont trompés. Elle peut même être une imposture, en fonction de certains choix préalables non interrogés..Son enseignement devrait être revu et il est des présupposés à repenser, un formalisme mathématique qui interdit tout débat de fond...Les maths ne sont qu'un outil, utile mais à manier avec précaution.
     La plupart n'ont rien vu venir, comme certains l'ont reconnu.  Il arrive même qu'on puisse dire tout et le contraire de tout.       Cela relativise un peu...
                 Dans son étude sur "L'imposture économique",  Steve Keen, remet en cause certaines croyances érigées comme des postulats, des théorèmes, dans la théorie économique néoclassique libérale. Selon cette théorie, les marchés auraient des anticipations parfaites sur tout et auto-réguleraient naturellement l'économie dans une concurrence supposée transparente. Pourtant ces hypothèses sont faussées à la base et la vie économique est bouleversée par des événements non anticipés par les marchés, est ponctuée de crises souvent inattendues, celle de 2008, déclenchée par les subprimes en étant un exemple criant. 
          [ -Krugman fustigeait naguère "la cécité de la profession sur la possibilité de défaillances catastrophiques dans une économie de marché"."Durant l’âge d’or, les économistes financiers en vinrent à croire que les marchés étaient fondamentalement stables - que les actions et autres actifs étaient toujours cotés à leur juste prix"---- M. Greenspan avouait qu’il était dans un état d’ « incrédulité choquée » car « l’ensemble de l’édifice intellectuel » s’était « effondré ». Cet effondrement de l’édifice intellectuel étant aussi un effondrement du monde réel de marchés, le résultat s’est traduit par une grave récession"( P.K.)_« Lorsque dans un pays le développement du capital devient un sous-produit de l’activité d’un casino, le travail est susceptible d’être bâclé», disait Keynes.]
      Bref, une "science" en question, souvent aveugle à ses fondements.
               La cohérence n'est pas toujours au rendez-vous.
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Ecriture inclusive (suite)

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Le débat n'est pas prêt de s'arrêter

          Il est sans cesse relancé, sans être forcément contesté sur le fond, les modalités de son application posant plus de problème que l'esprit. Une question toujours épineuse. 

                     Pas seulement en France. Les linguistes eux-mêmes sont parfois en désaccord.

                        Ménage dans le langage. Vers une langue d'un nouveau genre?
                                                Mein Gott! Si Thomas Mann revenait...
    Les enfants de Molière s'abandonnent au globish. Ceux de Goethe, au denglich, souvent contesté de l'intérieur, mais envahissant.


      La question du genre s'introduit aussi dans le vocabulaire, comme si changer les mots suffisait à changer les choses.
  Cela fait polémique au royaume d'Angela, même si c'est pour l'instant géographiquement circonscrit.
      Comme chez nous, le ridicule ne tue pas, heureusement.

                    "... Publié en décembre 2019, le document a pour titre Guide pour une langue sensible à la question du genre dans la cité hanséatique de Lübeck. Sur douze pages, il détaille les nouvelles règles qu’il est conseillé d’appliquer dans les documents administratifs édités par une municipalité qui « veut parler à tous, femmes, hommes ou personnes qui se définissent ni comme femmes ni comme hommes », ainsi que l’écrivent, dans l’avant-propos, le maire social-démocrate de cette ville du nord de l’Allemagne, Jan Lindenau (SPD), et sa déléguée chargée des questions d’égalité, Elke Sasse.
    Ces règles peuvent se regrouper en quatre catégories principales. 1. Systématisation de l’écriture inclusive au moyen du « double point » (« Senator : innen »), équivalent du « point médian » en français (« sénateur·rice·s »). 2. Utilisation de périphrases « dégenrées » comme « une personne employée » au lieu de « un·e employé·e »). 3. Emploi de « notions neutres » tel que Elternteil (« membre de la parentèle »), préférable à Vater/Mutter (père/mère). 4. Bannissement des formules « Cher Monsieur, Chère Madame » en début de lettre au profit des seuls prénom et nom. 5. Abrogation d’expressions imagées véhiculant des « clichés », comme « Not am Mann » (« urgence pour l’homme »).Sans surprise, ces nouvelles règles ont fait bondir Walter Krämer, économiste à l’université de Dortmund et président du Verein Deutsche Sprache (VDS), une association de défense de la langue allemande fondée en 1997 qui revendique 36 000 membres. Ses arguments : les difficultés de lecture de l’écriture inclusive et le caractère « hideux » des expressions recommandées. « La ville de Lübeck s’assoie sur les règles officielles qui régissent l’écriture de l’allemand. (…) Thomas Mann aurait honte de sa ville natale », a réagi M. Krämer....."

    Une histoire qui vient de loin...
        Chez nous, nous avons assisté à un débat souvent faussé:
             La polémique qui a continué à l'occasion du mariage pour tous (expression sans doute malheureuse) se révèle pleine de malentendus, de préjugés, d'arrière-pensées, de parti-pris, parfois d' absurdités, comme ici:
     "Dire que le sexe d'une personne a peu d'importance, en niant l'importance d'être un homme ou une femme, c'est très grave et nous sommes scandalisés que l'on puisse troubler des enfants à un âge tendre avec cette théorie", explique Ludovine de la Rochère, présidente de la Manif pour tous... Bernard Debré, député UMP de Paris, allait même encore plus loin: "C'est une déviation, une folie, mais je crois même qu'il s'agit d'un crime. On n'a pas le droit d'aller contre la vérité et la théorie du genre est un mensonge". En décembre, quelque 70 députés UMP avaient déjà réclamé une "commission d'enquête" sur l'introduction et la diffusion de la théorie du "gender" en France. Il dénonce une théorie "contre nature car s'opposant à ce que nous donne la nature, en particulier les corps sexués et comme contradictoire avec l'équilibre social et politique", explique Réjane Sénac..."
    __Une polémique orchestrée, qui n'est pas retombée, où l'ignorance le dispute à l'idéologie.
En fait, le débat de fond, mal engagé, n'a pas eu lieu, ou si peu...
__On évoque la théorie du genre. Ce qu'on appelle théorie du genre n'est pas une théorie au sens strict, encore moins une machine de guerre. C'est d'abord un domaine de recherche anthropologique, éclairée notamment par de multiples enquêtes ethnologiques et les découvertes de la psychanalyse.
    "...Dans le sillage de la mobilisation contre le "mariage pour tous" adoptée par l'Assemblée le 23 avril, les critiques visant les études sur le genre se sont multipliées, leurs détracteurs stigmatisant une "théorie" consistant à "nier la réalité biologique". Les études de genre sont un pan des sciences humaines affirmant que l'identité sexuelle n'est pas déterminée uniquement par le sexe biologique, mais est également influencée par la société. L'adoption de la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe a ravivé une peur qui avait crispé les milieux conservateurs et catholiques en 2011 avec l'introduction, dans les manuels de sciences de la vie et de la terre (SVT) des classes de première, de l'idée selon laquelle l'orientation sexuelle est différente de l'identité sexuelle. En mars, l'Union nationale inter-universitaire (UNI), association étudiante de droite très active dans la contestation contre le "mariage pour tous", a ainsi fondé l'Observatoire de la théorie du genre, proposant d'"ouvrir les yeux sur la théorie du genre", une "idéologie [...] qui vise à remettre en cause les fondements de nos sociétés 'hétéro centrées', de substituer au concept marxiste de la lutte des classes, celui de la lutte des sexes"( sic!). Ce discours très radical, outre le fait qu'il illustre une mauvaise compréhension de ce que sont les études sur le genre, est représentatif des "éléments de langage" repris dans la sphère conservatrice et catholique..."
____Les idées reçues sur les études de genre sont nombreuses:
                      "Le concept de genre s'est développé comme une réflexion autour de la notion de sexe et du rapport homme/femme. Loin de nier la différence entre le sexe féminin et le sexe masculin, le genre est utilisé par les chercheurs comme un outil permettant de penser le sexe biologique (homme ou femme) indépendamment de l'identité sexuelle (masculin ou féminin). Il ne s'agit donc pas de dire que l'homme et la femme sont identiques, mais d'interroger la manière dont chacun et chacune peut construire son identité sexuelle, aussi bien à travers son éducation que son orientation sexuelle (hétérosexuelle, homosexuelle, etc.).
En dissociant intellectuellement le culturel et le biologique, le concept de genre interroge les clichés liés au sexe. Par exemple, l'idée selon laquelle les femmes sont plus naturellement enclines à s'atteler aux tâches domestiques que les hommes est de l'ordre de la construction sociale et historique, et non pas liée au fait que la femme dispose d'un vagin et d'ovaires.
 _____La "théorie du genre" est devenue un cache-sexe de la réaction
                Avant de faire des déclarations publiques sur un sujet qu'il ne connaît à l'évidence pas, Vincent Peillon aurait pu lire, sous les plumes de Laure Bereni ou Bruno Perreau par exemple, que le monde académique ne parle jamais de “ théorie du genre ”, mais bien d'études sur le genre ou d'études de genre, l'usage du pluriel et du terme “ étude ” attestant de la diversité des recherches et des positionnements.
Le genre n'est en effet pas une théorie unique, monolithique, sortie de la cuisse de quelques féministes dogmatiques, c'est un concept travaillé par tout un champ d'études en France mais également dans le monde entier. Les propos du ministre relèguent ces études au domaine de la croyance – on serait pour ou contre le genre, on trouverait ça bien ou mal –, attestant d'un mépris et d'une réelle condescendance de la part d'un représentant d'Etat à l'égard d'universitaires, chercheurs et chercheuses, mais aussi membres du monde associatif, fonctionnaires ou encore militant-e-s qui ne croient pas au genre, mais travaillent dessus, l'analysent pour comprendre le monde social et améliorer les politiques publiques....
 L'incompréhension du genre participe à créer une nouvelle figure idéologique repoussoir fondée sur une homophobie latente, parfois manifeste, et l'insupportable menace de l'égalité entre hommes et femmes. Sous la peur de l'indifférenciation entre hommes et femmes, entre hétérosexuel-le-s et homosexuel-le-s, réside en effet le maintien des inégalités. Parce que comme l'explique notamment Christine Delphy, l'opération de classement entre hommes et femmes n'a de sens que parce qu'elle permet de les hiérarchiser, d'accorder des privilèges aux hommes, de créer et maintenir les rapports de domination .
Si les études de genre sont en effet plurielles et diverses, il ne s'agit pas nécessairement d'invalider toute distinction biologique, mais bien de montrer quel sens elle prend, quel rôle elle joue, comment elle opère et quels en sont les effets dans des contextes spécifiques. Combattre les études de genre permet de rendre invisible, de mettre sous silence la manière dont se construisent les inégalités pour les pérenniser. Et l'attitude du ministre alimente le discours de droite et d'extrême droite qui joue un jeu idéologique dont les règles semblent pourtant claires : répandre des croyances pour discréditer les travaux, universitaires, militants, etc., et de cette manière, maintenir le statu quo, voire renforcer les inégalités entre femmes et hommes, entre hétérosexuel-le-s et lesbiennes, gays, bi-e-s et trans.
Si le ministre n'avalisait pas des propos réactionnaires, dans le cadre de l'éducation nationale, le concept de genre pourrait se révéler utile pour analyser la manière dont l'institution scolaire est un espace de socialisation qui participe notamment à reproduire des différences de jugement et d'attentes envers les filles et les garçons. S'il n'utilisait pas la fausse notion de “ théorie du genre ”, et qu'il appliquait le concept de genre aux politiques éducatives, il se rendrait compte que c'est un levier vers la lutte contre le sexisme et l'homophobie à l'école.
C'est bien parce que le genre est une question politique qu'il est sous le feu de la critique, objet des fantasmes de la droite et de l'extrême droite. Et les membres du gouvernement devraient peut-être le prendre comme tel, avec sérieux et rigueur intellectuelle, pour éviter de reprendre à leur compte des formules inadaptées et infondées construites par la droite, mais également en permettant aux études de genre de jouir du statut qui leur est dû, celui d'un champ d'études.."
    ___La famille, quelle que soit l'époque ou la civilisation , est toujours le produit de la nature ET de la culture, comme Lévi-Strauss, entre autres, l'a brillamment démontré.
      Les droits des femmes, loin d'être universels et appliqués, sont toujours d'actualité et le féminisme de casting n'en est qu'une caricature. 
    Bref,  la « théorie du genre » n’existe pas, malgré des assauts répétés
      
       ___Quel avenir a l'écriture inclusive Outre-Rhin? Que faire du neutre dans certains cas, comme pour DAS Mädchen? Hum, embarrassant...
                  La grammaire n'y est pour rien. .Le réel est plus difficile à changer que les codes.
                         Et Dieu dans tout ça? Qu'en pense-t-il (-elle?)?....On lui a demandé son avis?...
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Le crédit, c'est chouette!

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Oui, mais...

                Nous sommes loin du phénomène américain où le crédit est un mode de pratique courante jusqu'à être à découvert parfois en permanence. Un mode de vie encouragé par le système (ne pas acheter, c'est ne pas être bon américain), mais aussi un asservissement et des problèmes bancaires graves dans certains cas, comme à chaque crise systémique. Chez nous le leasing est devenu une aubaine...pour les constructeurs. Et attention aux pièges!                                                      Vivre à crédit est devenu souvent toxique dans notre univers d'hyperconsommation. Cela peut mener à miner des vies. La pratique du crédit n'est pas nouvelle. Elle prospérait déjà dans le domaine marchand à l'époque de l'ancienne Venise et on en trouve déjà des traces dans l'Antiquité, notamment à l'époque de Nabuchodonosor. Le prêt permettait de développer une affaire, un projet avec engagement de restitution des sommes engagées si elle avait prospéré. Une sorte de moteur du développement de la richesse, plus ou moins régulée. Les banques finirent par jouer un rôle central dans cette fonction de prêt, à partir des dépôts engrangés par des particuliers, sur une base de confiance, où l'épargne était drainée vers les investissement divers. Tout cela en théorie...Car le prêt à intérêt non régulé fut aussi parfois un moyen de pression, voire d'exploitation (comme dans certaines campagnes d'Inde)  et le rôle des banques fut parfois perverti, comme par exemple dans les pratiques qui furent à l'origine des surprimes dans le début de la crise financière et économique de 2008.   Une arme à double tranchant donc, si elle n'est pas encadrée par une institution neutre et vigilante.  L'endettement peut devenir un moyen de contrôle dans le cadre d'une consommation sans frein et créer les conditions d'une servitude.

 

 

            Un peu de crédit, ça va. Beaucoup de crédits, bonjour les dégâts !   Au pays où le crédit est roi, érigé en quasi vertu, faire des économies est considéré comme peu civique. Le consumérisme est une deuxième religion.   Avoir une dizaine de cartes de crédit est entré dans la normalité.
 Spend a lot of money is american. Même pour démarrer dans la vie...
La crise des surprimes a montré jusqu'où pouvait aller l'endettement des particuliers, même très modestes, et l'aplomb des banques qui sont sorties des clous, pas seulement en 2008.  Pour faire face à l'urgence, l'américain moyen ne dispose que de peu de réserves...   Il faut parfois s'endetter pour assurer le minimum vital. Et même pour des soins hospitaliers.   Ne parlons pas des études, cette nouvelle bulle...qui menace.    Après la crise des surprimes, machiavéliquement organisée pas les banksters, la fièvre acheteuse a repris de plus belle.   Un Américain dans la norme est un Américain endetté qui rembourse les échéances en temps et en heure...quand il peut. Et pourtant, comme dit Robert Reich, ancien ministre du Travail de Bill Clinton, dans le New York Times « ...aujourd’hui les ouvriers travaillent beaucoup plus pour gagner moins. Le revenu moyen d’un travailleur aujourd’hui, après correction de l’inflation, est moins élevé qu’il y a 30 ans. Et puisque le pouvoir d’achat décline, un ouvrier d’aujourd’hui travaille en moyenne 100 heures de plus chaque année qu’il y a deux décennies pour rester la tête hors de l’eau..."    Une vieille tradition de l'américan way of live, dont Barber a montré la toxicité.
          Aux USA,"Il faut être riche pour mener une vie de pauvre", comme dit le Washington Post.   Car les pauvres paient plus. C'est aisément vérifiable.  Et on ne prête (bien) qu'aux riches.
      D'une certaine manière, les pauvres sont rançonnésabandonnés par les banques traditionnelles.     Le Payday Loan, ( prêt sur salaire), autrefois inexistant, devient courant. C'est un emprunt à ultracourt terme (quinze jours au plus) que l’on rembourse le jour de sa paie avec de gros intérêts. Un client peut ainsi obtenir un prêt de 300 dollars qu’il rembourse 346 dollars le jour où il touche son salaire.    Une étude publiée par Bankrate.com suggère que 37 % des Américains ont une dette de carte de crédit supérieure ou égale à leur épargne d’urgence, ce qui signifie qu'une facture médicale un peu conséquente, un accident de voiture ou une autre dépense imprévue pourrait les pousser vers un désastre financier personnel. 
         Le crédit devient  une servitude dans ces conditions, un instrument de contrôle social.
                                                                      Il est urgent que les pouvoirs publics mettent un minimum de régulation dans un système qui tend toujours à s'emballer, pas seulement aux détriments des particuliers, la monnaie perdant sa fonction essentielle de simple fluidifiant économique.     Le phénomène régulier des bulles qui s'accumulent représente un péril pour le système tout entier, comme on l'a vu trop souvent, les dettes souveraines prenant le relai.    La debtocracy a de beaux jours devant elle.   Comme le signale Thiery Porcher: La dette a été inventée pour promouvoir des coupes dans les dépenses sociales »   Encore fort de sa monnaie de référence, de son armée et de sa planche à billets, l'empire fonctionne à crédit...astronomiquement_____
Pour prolonger:
        Les pièges de l'endettement:... "L'endettement est un élément central du dynamisme économique. C'est un pari sur l'avenir de celui qui emprunte pour financer ses projets. C'est une marque de confiance du prêteur : il est convaincu qu'il retrouvera l'argent offert. Pas d'économie créative sans cette possibilité donnée à chacun de dépasser ses limites de l'instant. Mais chacun sait aussi les pièges du crédit, les fuites en avant qu'il encourage. La crise qui frappe l'économie mondiale est née d'excès dans le recours à l'emprunt et aux dissimulations qui l'ont accompagné. Elle a provoqué la ruine de beaucoup de particuliers, souvent victimes de pratiques usuraires, et l'effondrement de nombreuses institutions prêteuses par absence de discernement dans la distribution des prêts..."
Le Système Dette : répudier cette arme de domination et de spoliation.    "...David Graeber montre que le vocabulaire des écrits juridiques et religieux de l’Antiquité (des mots comme « culpabilité », « pardon » ou « rédemption ») est issu en grande partie des affrontements antiques sur la dette. Or il fonde jusqu’à nos conceptions les plus fondamentales du bien et du mal, jusqu’à l’idée que nous nous faisons de la liberté. Sans en avoir conscience, nous livrons toujours ces combats…   Selon l’auteur, l’endettement est une construction sociale fondatrice du pouvoir. Si autrefois les débiteurs insolvables ont nourri l’esclavage, aujourd’hui les emprunteurs pauvres – qu’il s’agisse de particuliers des pays riches ou d’États du tiers-monde – sont enchaînés aux systèmes de crédit. « L'histoire montre, explique Graeber, que le meilleur moyen de justifier des relations fondées sur la violence, de les faire passer pour morales, est de les recadrer en termes de dettes – cela crée aussitôt l’illusion que c’est la victime qui commet un méfait. » Trop d’économistes actuels perpétuent cette vieille illusion d’optique, selon laquelle l’opprobre est forcément à jeter sur les débiteurs, jamais sur les créanciers. »
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On rachète!

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Faut pas se gêner...

                    Un mécanisme critiquable et critiqué. Pour une grande entreprise qui a besoin  de vivre, de se développer, avoir recours à des actions est un processus économique classique et normal, dont on peut situer l'origine dans le capitalisme marchand du XVI° siècle. Mais il est un phénomène qui ne l'est plus: c'est quand elle rachète en catimini ses propres actions, faussant les lois du marché en en faisant artificiellement monter le cours. Une pratique courantes de certains grands groupes US qui se répand chez nous avec le développement du capitalisme financier, dans une économie qu'on appelle "de rente".                                                                                                                                          Les surprofits, au lieu d'aller pour une large part vers les investissements et les salariés, à l'origine de la valeur, , vont à la spéculation,  créant ainsi un paradis artificiel dangereux. Très en vogue dans le Cac40


                                                                                                                                          "...C’est en juillet 1998 que le rachat par les sociétés de leurs propres titres de capital a été libéralisé en France, en s’inspirant fortement des propositions du rapport Esambert, commandité par la Commission des opérations de bourse (l’ancêtre de l’Autorité des marchés financiers) et publié six mois auparavant. Avant cette date, la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales prohibait l'achat par une entreprise de ses propres actions. « Ce principe général d'interdiction était assorti de quelques dérogations qui étaient toutefois limitées et mal adaptées à une gestion dynamique du capital des sociétés », déplorait le rapport dans son lobbying de place.  Qu’attendaient les entreprises cotées - et le marché - de cet assouplissement ? Tout simplement « un moyen privilégié pour rendre de la valeur aux actionnaires », comme le titrait BNP Paribas dans une étude de 2019. La moitié des sociétés interrogées par la banque plébiscitaient alors des solutions mixtes intégrant les rachats d’actions et les dividendes pour « rendre de la valeur » aux actionnaires. La majorité d’entre elles disaient subir la pression des investisseurs en faveur de rachats d’actions, à commencer par les hedge funds et les mutual funds anglo-saxons, suivis des compagnies d’assurance et des fonds souverains. L’étude pointait aussi que les rachats d’actions constituaient « une demande quasi-systématique des investisseurs activistes ». Résultat, la part des rachats d’actions dans le mix versé aux actionnaires ne cesse de grimper dans le monde : en 2012, elle en représentait un tiers, puis la moitié en 2022, selon le gérant d'actifs Janus Henderson.  De longue date, la souplesse du mécanisme a fait du rachat d’actions une pratique capitalistique courante chez l’Oncle Sam, notamment comme moyen de protection contre les prises de contrôle inamicales (en remédiant à la sous-évaluation de ses titres et en renforçant le contrôle de l’actionnariat). On a ainsi assisté à une vague de rachats d’actions aux États-Unis au lendemain du krach boursier d’octobre 1987, dont le but était de faire remonter les cours. En 1996, les 1 472 opérations de ce type répertoriées dans le pays représentaient 176 milliards de dollars. En 2022, les rachats d'actions des sociétés du S&P 500 (l’indice actions phare de Wall Street) ont avoisiné les 1 000 milliards de dollars, dont 89 pour le seul Apple…  Sur le fond, les rachats d’actions posent un problème de partage de la valeur, puisqu’en cherchant tous les moyens possibles d’enrichir les actionnaires, on réduit la part de gâteau des salariés. « Racheter ses propres actions revient aussi à diminuer les sommes disponibles pour investir dans la croissance et l’innovation de l’entreprise. D’où l’idée que cela se fait au détriment de la croissance, de la consommation et de l’emploi », analyse le journaliste Nicolas Gallant sur capital.fr. « Si l’actionnaire est avantagé grâce à l’aspect relutif des opérations de rachat d’actions, celles-ci peuvent aussi traduire un manque de perspectives et s’opposer à une hausse de la valorisation sur le long terme », complète encore le Particulier. ___________

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