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Connaissez-vous Avisa Partners?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Un très grand manipulateur.

                        On en apprend de belles!   Il s'agit d'une société française qui brille dans le domaine du lobbying et de la désinformation, sous des dehors de respectabilité. Une affaire plus que bizarre. Crapuleuse. On en débattait récemment sur France-Inter.  On croit rêver.                                                                                           "...On y apprend que  que les espaces collaboratifs des grands médias français (Le Club de Mediapart, les espaces débat du Huffington Post, du Point, de l’Express ou du site d’information libéral Contrepoints) sont infiltrés pour servir des luttes d’influence entre États et des querelles de concurrence dans le monde des affaires. L'affaire a été révélée par le journal Fakir et l'enquête reprise par Mediapart. Un journaliste raconte comment il a écrit des centaines d’articles sur des sujets politiquement inflammables et des tribunes destinées à lustrer des images de marque, voire à les écorner. Son employeur, anonyme, est une société privée d’intelligence économique qui travaille pour le compte d’États étrangers, de multinationales et d’institutions publiques. Sa production a été publiée dans les blogs et autres espaces collaboratifs de grands journaux français. Vous pouvez trouver les détails de l’affaire sur Mediapart, qui repose sur le témoignage de son protagoniste principal, le journaliste Julien Fomenta Rosat, et retrouver les premiers éléments dans le journal Fakir le 19 mai (l’article a depuis été mis en accès libre). .."                   Une société tentaculaire et insidieuse, politiquement compromise, parfois au plus haut niveau:                                                                                                                                            "...La société Avisa Partners s’est notamment spécialisée dans la vente d’influence médiatique et numérique à ses clients. Parmi eux, on trouve de très riches particuliers, des institutions publiques, de grandes entreprises et des régimes étrangers. Matthieu Creux et Arnaud Dassier dirigent Avisa Partners. © Illustration Justine Vernier / Mediapart En 2020, le fondateur d’Avisa, Matthieu Creux, détaillait au magazine Causeur une partie de son impressionnante clientèle : Interpol, le Ghana, la Côte d’Ivoire, Saint-Marin, le Togo, la Commission européenne, le ministère des armées, BNP Paribas, la Société générale, le Crédit agricole, la Banque Palatine, Axa, CNP Assurances, Engie, EDF, Total, L’Oréal, LVMH, Chanel, Carrefour, Casino, etc.  Des documents internes à Avisa, obtenus par Mediapart, montrent aujourd’hui une palette plus vaste encore de « clients étatiques », dont certains pays qui sentent le soufre. Cela concerne par exemple l’« e-réputation » (réputation sur Internet) de la présidence du Congo-Brazzaville, dirigé depuis des décennies d’une main de fer par le dictateur Denis Sassou Nguesso, l’autocratie du Kazakhstan, en Asie centrale, pour l’organisation d’une exposition internationale, la pétromonarchie du Qatar pour la promotion de ses investissements en Europe et du Mondial 2022, le Tchad pour la valorisation des réformes économiques du dictateur Idriss Déby, la société nationale pétrolière du Venezuela contre les sanctions américaines qui la visent. Mais aussi le géant russe de l’aluminium Rusal pour diverses opérations de lobbying, la multinationale pharmaceutique et agrochimique Bayer pour la publication de contenus sur les réseaux sociaux afin de « contrer l’activisme anti-OGM » ou l’avionneur Airbus. Pour certains de ces clients, auxquels ils proposent du « online advocacy » (comprendre de l’influence numérique), Avisa et ses partenaires ont une stratégie très particulière : l’infiltration, sous de fausses identités, d’espaces de discussion participatifs sur des sites de médias plus ou moins réputés – les pages débats de L’Express, du Huffington Post, les sites Agoravox et Contrepoints –, mais aussi Le Club de Mediapart, dans le but d’en faire des lieux de propagande qui ne disent pas leur nom..... "                 Rien que ça! 

                                                        __________On peut lire le détail dans Mediapart, sans que personne ne démente des pratiques de manipulation dans l'information:   "...Pendant six ans, Julien* a travaillé dans la plus grande confidentialité. Il n’a jamais vu ses supérieurs, tous anonymes. Lui-même se cachait derrière une dizaine de pseudonymes pour ne pas être identifié. Mais le jeu en valait la peine, dit-il : il y avait pas mal d’argent facile à se faire, et rapidement. Julien n’était ni un narcotrafiquant ni un vendeur d’armes...."                                                                                                                                                ___Il manipulait des informations. On peut lire le détail dans Médiapart:      ".....Dans les colonnes du trimestriel Fakir, Julien a expliqué par le menu, début juin, les coulisses édifiantes de sa mission. La raison ? L’entreprise pour laquelle il travaillait lui a demandé d’écrire sur le journal du député François Ruffin (La France insoumise – LFI), dans lequel, hasard, Julien compte un ami cher.    C’en était trop. Il décide de tout arrêter, de dénoncer les pratiques de son employeur et d’aider la presse à enquêter. Son récit, enrichi d’autres témoignages et de nombreux documents recueillis par Mediapart, permet aujourd’hui de révéler l’une des plus grandes entreprises de manipulation de l’information intervenue en France ces dernières années.     Derrière ces pratiques se trouve une société d’intelligence économique et de cybersécurité inconnue du grand public, baptisée Avisa Partners, mais l’une des plus réputées de la place de Paris. Elle rachète à tour de bras des acteurs phares du secteur et valorise son activité à près de 150 millions d’euros.    Co-organisatrice avec la gendarmerie nationale du Forum international de la cybersécurité (FIC), le principal événement européen sur les questions de la sécurité et de confiance numérique, Avisa Partners rassemble – ou a rassemblé – en son sein des figures du renseignement, du monde des affaires, de la politique ou de la diplomatie : l’ancien chef des services secrets intérieurs Patrick Calvar, l’ex-numéro 2 du Quai d’Orsay Maurice Gourdault-Montagne, l’actuelle porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire ou l’ancienne plume d’Emmanuel Macron à l’Élysée Sylvain Fort (voir leurs réactions en fin d’article)...    Codirigée par un proche de Sarkozy et de Zemmour, Arnaud Dassier, et le fils d’un ancien directeur d’un service de renseignement militaire, Matthieu Creux, la société Avisa Partners s’est notamment spécialisée dans la vente d’influence médiatique et numérique à ses clients. Parmi eux, on trouve de très riches particuliers, des institutions publiques, de grandes entreprises et des régimes étrangers...."                                                                                 _____    "Un article du dernier numéro du journal Fakir a été mis en accès libre récemment. Nous vous en conseillons la lecture, car l’histoire est édifiante : celle de Julien Fomenta Rosat, journaliste pigiste qui a rédigé pendant des années des articles complaisants envers les clients fortunés d’une entreprise de communication."        La méthode est d’une simplicité extrême : un client (le plus souvent une entreprise multinationale peu scrupuleuse ou un État autoritaire) souhaite revaloriser son image, soit pour engranger davantage de profits, ou bien assurer sa pérennité, ou simplement pour son bon plaisir puisqu’il en a les moyens. Le client (au hasard, le multimilliardaire Bernard Arnault) va donc payer un article flatteur ou, au contraire, un brûlot contre ses détracteurs (au pif, François Ruffin, le député auteur du film “Merci patron”, en plus d’être directeur du journal Fakir).                                          L’article est rédigé par un indépendant, puis est vendu comme prêt à publier à des journaux souvent considérés comme “sérieux”, gavés de subventions publiques comme Le Point. L’article est publié sous un nom de journaliste souvent inventé, que l’on fait passer pour spécialiste de la question. La ficelle est trop grosse ? Cela fait pourtant des années que ça dure !                          L’auteur réel n’est qu’une plume sélectionnée pour sa capacité à convaincre, mais la recherche journalistique n’est nulle part présente. C’est la réalité qui doit s’adapter à la commande et non l’article qui doit raconter une vérité. On savait déjà que les journaux et sites internet commerciaux d’informations étaient des torchons bourrés de publicités, mais on passe désormais dans une nouvelle dimension : CE SONT des publicités. Des pubs grassement rémunérées par et pour les puissants de ce monde, qui paient pour que l’on chante leurs louanges.           Lors du rachat de Twitter par Elon Musk, ce dernier considérait qu’il fallait lever toute forme de modération du réseau social car elle s’apparenterait à de la censure. Elon Musk, l’homme le plus riche du monde, puissant parmi les puissants, favoriserait-il la circulation des informations et la mise en place de contre-pouvoirs ? Rien n’est moins sûr.          Diffuser tous les contenus, relativiser toutes les informations, noyer le poisson. Une sorte de mithridatisation de l’information : le roi Mithridate, qui régnait sur le Bosphore dans l’Antiquité, consommait régulièrement de petites doses de poison pour être immunisé en cas d’empoisonnement. Au lieu de censurer les informations qui pourraient bousculer l’ordre bourgeois et risquer un “effet Streisand” (populariser une information en cherchant à la faire disparaître), il vaut mieux laisser l’information circuler en étant diluée dans un flot ininterrompu et inintéressant d’informations insipides et inoffensives pour le pouvoir en place.                            Ce flot, ce sont les articles payés par Avisa Partners. Et par une étonnante coïncidence, Olivia Grégoire, actuelle porte parole du gouvernement, a été directrice associée d’Avisa Partners ! Les médias mainstream nous abreuvent ainsi à longueur de journée d’analyses réacs et complaisantes, mais surtout d’informations diverses dont on ne peut tirer aucune analyse politique qui permette de penser la subversion. Info en continu et divertissement partout, révolution nulle part sur des médias détenus, dans leur très grande majorité, par ce que le Monde Diplomatique appelle le Parti de la Presse et de l’Argent.       Pire, non contents de saturer l’espace médiatique de fausses informations, d’articles orientés en leur faveur, ces puissants cherchent à semer le trouble sur la pertinence de vraies enquêtes journalistiques. Le terme de “fake news”, utilisé à tord et à travers, est trop souvent adressé contre des enquêtes journalistiques sérieuses et sourcées, mais qui lèvent des lièvres trop gros pour être dilués par BFM. Les milliardaires ont encore de beaux jours devant eux si on ne leur tord pas le poignet, si on ne les contraint pas à libérer l’information. La dernière fois que la bourgeoisie a perdu la main sur les médias, c’est lorsque le Conseil National de la Résistance a interdit aux capitaux industriels de financer les grands titres de presse. Le principe était simple : l’information doit être au service de la population et pas de quelques riches collabos.  ...  "                           _______________________
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Le billet de Plenel

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Brut de décoffrage

                    (Non accessible aux non abonnés de Mediapart  ) Photo choisie par moi-

de la raison produit des monstres. Avant de donner à voir, dans toute leur abomination, les désastres de la guerre (Los Desastres de la Guerra, 1810-1815), le peintre et graveur espagnol Francisco de Goya (1746-1828) avait intitulé ainsi l’une des gravures de sa série Los caprichos à la fin du XVIIIe siècle : El sueño de la razon produce monstruos. On y voit le peintre endormi tandis qu’une volée d’oiseaux nocturnes tourbillonne au-dessus de lui, symbolisant la folie et l’ignorance qui mènent l’humanité à sa perte.                                                         Nous vivons un moment semblable, d’obscurcissement et d’égarement. Spectateurs effarés, nous découvrons l’horreur des tueries de civils israéliens dans l’attaque terroriste du Hamas tandis que nous suivons l’hécatombe de civils palestiniens à Gaza sous les bombes de l’armée israélienne. Toutes ces vies humaines se valent, elles ont le même prix et le même coût, et nous nous refusons à cette escalade de la terreur où les crimes d’un camp justifieraient les crimes de l’autre. Mais nous nous sentons impuissants devant une catastrophe qui semble irrémédiable, écrite par avance tant ont été perdues, depuis si longtemps, les occasions de l’enrayer (pour mémoire mes alarmes de 2009, de 2010 et de 2014).                                                                                  Dès lors, comment échapper à un sentiment de sidération qu’aggrave le spectacle de désolation du débat politique et médiatique français ? À mille lieues de sa grandeur prétendue, la France officielle donne à voir son abaissement raciste, jetant la suspicion sur nos compatriotes musulmans et arabes, et son alignement impérialiste, rompant avec l’ancienne position équilibrée de sa diplomatie moyen-orientale. Indifférence aux oppressions et intolérance aux dissidences règnent sur cette médiocrité dont font les frais manifestations et expressions propalestiniennes, dans un climat maccarthyste qui distingue tristement notre pays des autres démocraties.                                 Que faire ? Il importe déjà d’y voir clair. Ici, la responsabilité du journalisme, associant son devoir professionnel à son utilité sociale, est de trouer cette obscurité, en chassant les passions tristes et en s’éloignant des colères aveugles. Trouver son chemin, arriver à se repérer, réussir à ne pas s’égarer : autant d’impératifs vitaux par temps de propagande, que nous devons servir par une pratique aussi rigoureuse que sensible du métier. Elle suppose de résister au présent monstre de l’information en continu qui fonctionne à l’amnésie, perdant le fil de l’histoire, oubliant le passé qui la détermine, effaçant le contexte qui la conditionne (voir notre entretien-vidéo avec Bertrand Badie sur les mots et l’histoire du conflit).                                                                                                Mais il ne suffit pas de rendre compte. Il nous faut aussi échapper à la résignation qui guette, « cette accoutumance à la catastrophe dont le sentiment vague engourdit aujourd’hui tout désir d’action ». La formule est de l’historien Patrick Boucheron dans un récent libelle où il persiste, dans le sillage de Victor Hugo, à vouloir « étonner la catastrophe par le peu de peur qu’elle nous fait ». Secouant ce manteau de poussière dont le poids risque de nous paralyser, Le temps qui reste est une invitation inquiète à ne pas le perdre, ce temps, en refusant de se laisser prendre au piège de la catastrophe, tels des animaux saisis dans des phares, tétanisés et immobilisés par la conscience du péril. Car l’habitude, tissée de conformisme et de suivisme, est la meilleure alliée du pire en devenir. Voici donc, à l’instar de lucioles clignotant dans une nuit qui gagne, quelques repères qui nous guident pour affronter les désordres du monde et les folies des hommes. Quatre boussoles morales qui énoncent aussi ce à quoi nous refusons de nous habituer.                                                                                                                                                        1. Tout soutien inconditionnel est un aveuglement. Quel que soit le camp concerné. Quelle que soit la justesse de la cause.Aucun État, aucune nation, aucun peuple, et, partant, aucune armée, aucun parti, aucun mouvement, qui s’en réclame, ne saurait être soutenu inconditionnellement. Car, au-dessus d’eux, il y a une condition humaine universelle, dont découle un droit international sans frontières. Si, en 1948, l’année où est né l’État d’Israël, fut proclamée, à Paris, une Déclaration universelle des droits de l’homme, c’est pour cette raison même : s’ils ne rencontrent aucun frein, les États, les nations ou les peuples, peuvent devenir indifférents à l’humanité et, par conséquent, dangereux et criminels.  Adoptée à Paris en 1948 par les cinquante-huit États alors représentés à l’Assemblée générale des Nations unies, la Déclaration de 1948 résulte de cette lucidité provoquée par la catastrophe européenne dont nationalisme et racisme furent les ressorts, conduisant au génocide des juifs d’Europe. Français, son rédacteur, René Cassin, Prix Nobel de la paix en 1968, s’était battu pour imposer, dans son intitulé, cette qualification d’« universelle » au lieu d’internationale : façon de signifier qu’un droit supérieur, celui de la communauté humaine, devait s’imposer aux États et aux nations dont ils se prévalent. Autrement dit de rappeler qu’aucun État, qu’aucune nation, qu’aucun peuple ne devrait se dérober, au prétexte de ses intérêts propres, à cette exigence de respect de l’égalité des droits.                                                                            Nous savons bien qu’il n’y a qu’une façon d’en sortir dans l’urgence : un cessez-le-feu immédiat sous contrôle des Nations unies afin de sauver les otages des deux bords, qui ouvrirait la voie à une solution politique dont la clé est la reconnaissance d’un État palestinien ayant lui-même reconnu l’État d’Israël. Mais, s’il peut arriver que d’un péril imminent naisse un salut improbable, cette issue semble un vœu pieux, faute de communauté internationale forte et unie pour l’imposer. Faute, surtout, de détermination des soutiens d’Israël, États-Unis au premier chef, pour freiner une volonté de vengeance qui ne fera qu’accélérer la course à l’abîme.

Le sommeil de la raison produit des monstres. Avant de donner à voir, dans toute leur abomination, les désastres de la guerre (Los Desastres de la Guerra, 1810-1815), le peintre et graveur espagnol Francisco de Goya (1746-1828) avait intitulé ainsi l’une des gravures de sa série Los caprichos à la fin du XVIIIe siècle : El sueño de la razon produce monstruos. On y voit le peintre endormi tandis qu’une volée d’oiseaux nocturnes tourbillonne au-dessus de lui, symbolisant la folie et l’ignorance qui mènent l’humanité à sa perte.   Nous vivons un moment semblable, d’obscurcissement et d’égarement. Spectateurs effarés, nous découvrons l’horreur des tueries de civils israéliens dans l’attaque terroriste du Hamas tandis que nous suivons l’hécatombe de civils palestiniens à Gaza sous les bombes de l’armée israélienne. Toutes ces vies humaines se valent, elles ont le même prix et le même coût, et nous nous refusons à cette escalade de la terreur où les crimes d’un camp justifieraient les crimes de l’autre. Mais nous nous sentons impuissants devant une catastrophe qui semble irrémédiable, écrite par avance tant ont été perdues, depuis si longtemps, les occasions de l’enrayer (pour mémoire mes alarmes de 2009de 2010 et de 2014).                                                                                                  Nous savons bien qu’il n’y a qu’une façon d’en sortir dans l’urgence : un cessez-le-feu immédiat sous contrôle des Nations unies afin de sauver les otages des deux bords, qui ouvrirait la voie à une solution politique dont la clé est la reconnaissance d’un État palestinien ayant lui-même reconnu l’État d’Israël. Mais, s’il peut arriver que d’un péril imminent naisse un salut improbable, cette issue semble un vœu pieux, faute de communauté internationale forte et unie pour l’imposer. Faute, surtout, de détermination des soutiens d’Israël, États-Unis au premier chef, pour freiner une volonté de vengeance qui ne fera qu’accélérer la course à l’abîme.   


                                                                                               Dès lors, comment échapper à un sentiment de sidération qu’aggrave le spectacle de désolation du débat politique et médiatique français ? À mille lieues de sa grandeur prétendue, la France officielle donne à voir son abaissement raciste, jetant la suspicion sur nos compatriotes musulmans et arabes, et son alignement impérialiste, rompant avec l’ancienne position équilibrée de sa diplomatie moyen-orientale. Indifférence aux oppressions et intolérance aux dissidences règnent sur cette médiocrité dont font les frais manifestations et expressions propalestiniennes, dans un climat maccarthyste qui distingue tristement notre pays des autres démocraties.                      Que faire ? Il importe déjà d’y voir clair. Ici, la responsabilité du journalisme, associant son devoir professionnel à son utilité sociale, est de trouer cette obscurité, en chassant les passions tristes et en s’éloignant des colères aveugles. Trouver son chemin, arriver à se repérer, réussir à ne pas s’égarer : autant d’impératifs vitaux par temps de propagande, que nous devons servir par une pratique aussi rigoureuse que sensible du métier. Elle suppose de résister au présent monstre de l’information en continu qui fonctionne à l’amnésie, perdant le fil de l’histoire, oubliant le passé qui la détermine, effaçant le contexte qui la conditionne (voir notre entretien-vidéo avec Bertrand Badie sur les mots et l’histoire du conflit).                                                                                                      Mais il ne suffit pas de rendre compte. Il nous faut aussi échapper à la résignation qui guette, « cette accoutumance à la catastrophe dont le sentiment vague engourdit aujourd’hui tout désir d’action ». La formule est de l’historien Patrick Boucheron dans un récent libelle où il persiste, dans le sillage de Victor Hugo, à vouloir « étonner la catastrophe par le peu de peur qu’elle nous fait ». Secouant ce manteau de poussière dont le poids risque de nous paralyser, Le temps qui reste est une invitation inquiète à ne pas le perdre, ce temps, en refusant de se laisser prendre au piège de la catastrophe, tels des animaux saisis dans des phares, tétanisés et immobilisés par la conscience du péril.   Car l’habitude, tissée de conformisme et de suivisme, est la meilleure alliée du pire en devenir. Voici donc, à l’instar de lucioles clignotant dans une nuit qui gagne, quelques repères qui nous guident pour affronter les désordres du monde et les folies des hommes. Quatre boussoles morales qui énoncent aussi ce à quoi nous refusons de nous habituer.                                                                                                                                                      1. Tout soutien inconditionnel est un aveuglement. Quel que soit le camp concerné. Quelle que soit la justesse de la cause.                                                                                                                      Aucun État, aucune nation, aucun peuple, et, partant, aucune armée, aucun parti, aucun mouvement, qui s’en réclame, ne saurait être soutenu inconditionnellement. Car, au-dessus d’eux, il y a une condition humaine universelle, dont découle un droit international sans frontières. Si, en 1948, l’année où est né l’État d’Israël, fut proclamée, à Paris, une Déclaration universelle des droits de l’homme, c’est pour cette raison même : s’ils ne rencontrent aucun frein, les États, les nations ou les peuples, peuvent devenir indifférents à l’humanité et, par conséquent, dangereux et criminels.                                  Adoptée à Paris en 1948 par les cinquante-huit États alors représentés à l’Assemblée générale des Nations unies, la Déclaration de 1948 résulte de cette lucidité provoquée par la catastrophe européenne dont nationalisme et racisme furent les ressorts, conduisant au génocide des juifs d’Europe. Français, son rédacteur, René Cassin, Prix Nobel de la paix en 1968, s’était battu pour imposer, dans son intitulé, cette qualification d’« universelle » au lieu d’internationale : façon de signifier qu’un droit supérieur, celui de la communauté humaine, devait s’imposer aux États et aux nations dont ils se prévalent. Autrement dit de rappeler qu’aucun État, qu’aucune nation, qu’aucun peuple ne devrait se dérober, au prétexte de ses intérêts propres, à cette exigence de respect de l’égalité des droits.                                                                           « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité », énonce l’article premier de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Comme la française de 1789, la Déclaration de 1948 dessine l’horizon d’une promesse, toujours inaccomplie et inachevée, sans cesse en chantier et à l’œuvre face aux égoïsmes renaissants des États et au risque qu’ils cèdent aux idéologies de l’inégalité. De ce point de vue, l’ajout de la dignité, notion sensible, aux droits, critère juridique, n’est pas indifférent, tout comme sa position première dans l’énoncé : il s’agit non seulement de respecter d’autres humains, mais aussi de se respecter soi-même. En somme, de rester digne, de savoir se tenir, se retenir ou s’empêcher, afin de ne jamais céder à la haine de l’homme. Chèque en blanc accordé à ses dirigeants et à ses militaires, l’affirmation d’un « soutien inconditionnel » à l’État d’Israël dans sa riposte au Hamas tourne le dos à ces valeurs universelles. Elle prolonge ce mépris pour le droit international que l’on invoque volontiers face à l’agression russe en Ukraine mais que l’on dénie à la Palestine par l’absolu non-respect des résolutions onusiennes condamnant, depuis 1967, les annexions et colonisations israéliennes de territoires palestiniens. 

2. Jamais la fin ne saurait justifier les moyens. Seuls les moyens utilisés déterminent la fin recherchée.                                                                                                                                                                Depuis soixante-quinze ans, la Palestine pose au monde une question morale : celle de la fin et des moyens. La légitimité d’Israël ne saurait se fonder sur la négation des droits des Palestiniens jusqu’à la commission répétée de crimes de guerre. Mais la contestation de l’occupation et de la colonisation ne saurait tolérer la négation de l’humanité des Israéliens. En franchissant ce pas avec les massacres et prises d’otage de civils, le Hamas a fait plus que nuire à la cause qu’il dit servir : il l’a déshonorée. Dans la mémoire juive des persécutions européennes contre lesquelles s’est créé le mouvement sioniste à la fin du XIXe siècle, la terreur déchaînée par le Hamas sur des civils israéliens ne peut qu’évoquer les pogroms antisémites. Et le rappel de massacres commis en 1947-1948 par les composantes les plus extrémistes du sionisme, afin de faire fuir les Palestiniens, ne saurait en aucun cas lui servir d’excuses.                                                                  La violence aveugle de l’oppresseur le discrédite, légitimant la résistance violente de l’opprimé. Jusqu’au processus de paix entamé en 1991, le mouvement national palestinien, alors sous la direction de Yasser Arafat et du Fatah qui dominait l’Organisation de libération de la Palestine, a illustré cette règle éternelle des situations d’injustices où un peuple prétend en dominer un autre. Mais, par ses débats internes, son pluralisme assumé, son évolution revendiquée jusqu’à la reconnaissance de l’État d’Israël, il a fait sienne la conviction que la cause libératrice de l’opprimé exige une morale supérieure où sa riposte ne cède pas aux crimes reprochés à l’oppresseur.                            Il y a cinquante ans, en 1973, l’année de la guerre du Kippour dont le Hamas a choisi la date anniversaire pour son attaque sur Israël, un appel collectif d’intellectuels notables (parmi lesquels Edgar Morin, Laurent Schwartz, Jean-Pierre Vernant et Pierre Vidal-Naquet) rappelait ces « évidences morales et politiques fondamentales » « Il n’y a pas de problème de la fin et des moyens. Les moyens font partie intégrante de la fin. Il en résulte que tout moyen qui ne s’orienterait pas en fonction de la fin recherchée doit être récusé au nom de la morale politique la plus élémentaire. Si nous voulons changer le monde, c’est aussi, et peut-être d’abord, par souci de moralité. […] Si nous condamnons certains procédés politiques, ce n’est pas seulement, ou pas toujours, parce qu’ils sont inefficaces (ils peuvent être efficaces à court terme), mais parce qu’ils sont immoraux et dégradants, et qu’ils compromettent la société de l’avenir. »                                                                                                                                   Cette mise en garde vaut évidemment pour les deux camps. De 2023 à 2001, se risquer à comparer le 7-Octobre israélien au 11-Septembre états-unien, ce n’est pas seulement ignorer la question nationale palestinienne en souffrance, au prétexte d’une guerre de civilisation entre le bien occidental et le mal arabe, c’est surtout continuer de s’aveugler sur la suite. Le terrorisme faisant toujours la politique du pire, les désordres actuels du monde résultent de la riposte américaine, à la fois mensongère et criminelle, détruisant un pays, l’Irak, qui n’y était pour rien, tout en semant un discrédit universel par une violation généralisée des droits humains dont l’Occident paye encore le prix. Loin de détruire l’adversaire désigné, il en a fait surgir d’autres, d’Al-Qaïda à Daech, encore plus redoutables.

    3. Au cœur du conflit israélo-palestinien, la persistance de la question coloniale ensauvage le monde.                                                                                                                                                        Porté par le mouvement sioniste qui avait obtenu la création d’un foyer national juif en Palestine, la création de l’État d’Israël en 1948 a été unanimement approuvée par les puissances victorieuses du nazisme. L’incommensurabilité du crime contre l’humanité, jusqu’à l’extermination par le génocide, commis contre les juifs d’Europe, légitimait le nouvel État. Une faute abominable devait être réparée en offrant aux juifs du monde entier un refuge où ils puissent vivre dans la tranquillité et la sécurité, à l’abri des persécutions.                                                                                                                Si, aujourd’hui, Israël est un des endroits du monde où les juifs vivent avec angoisse dans le sentiment inverse, c’est parce que la réparation du crime européen s’est accompagnée de l’injustice commise contre les Palestiniens. Ce faisant, l’Occident – cette réalité politique dont les États-Unis ont alors pris le leadership – a prolongé dans notre présent le ressort passé de la catastrophe européenne : le colonialisme. Se retournant contre l’Europe et ses peuples, après avoir accompagné sa projection sur le monde, le colonialisme fut l’argument impérial du nazisme, avec son cortège idéologique habituel de civilisations et d’identités supérieures à celles des peuples conquis, soumis ou exclus.                                                                                                                                                     La colonisation ne civilise pas, elle ensauvage. Le ressentiment nourri par l’humiliation des populations dépossédées s’accompagne de l’enfermement des colons dans une posture conquérante, d’indifférence et de repli. L’engrenage est aussi redoutable qu’infernal, offrant un terrain de jeu idéal aux identités closes où la communauté devient une tribu, la religion un absolu et l’origine un privilège. Dès lors, accepter le fait colonial, c’est attiser le foyer redoutable d’une guerre des civilisations qu’illustre la radicalisation parallèle des deux camps, le suprémacisme juif raciste de l’extrême droite israélienne faisant écho à l’idéologie islamique du Hamas et de ses alliés, dans la négation de la diversité de la société palestinienne.                                                                                                      Dialoguant en 2011, dans Le Rescapé et l’Exilé, avec le regretté Stéphane Hessel, qui accompagna depuis l’ONU où il était diplomate la création de l’État juif en Palestine, Elias Sanbar rappelle cette origine d’un conflit qui ne cessera de s’aggraver tant qu’elle ne sera pas affrontée : « On ne peut certes pas refaire l’histoire, mais il est important de dire que ce conflit a commencé par une terrible injustice commise en Palestine pour en réparer une autre, née dans l’horreur des camps nazis. » Acteur des négociations de paix israélo-palestiniennes, il en tirait la conséquence que la seule solution est dans l’égalité des droits. Dans la réciprocité et la reconnaissance. L’envers de ce poison qu’est la concurrence des victimes. L’opposé de cette misère qu’est la condescendance du vainqueur.                                                                                                                                                         « Il faut affirmer, déclarait-il alors – et pense-t-il toujours –, que la concurrence dans le registre des malheurs est indécente, que les courses au record du nombre de morts sont littéralement obscènes. Chaque souffrance est unique, le fait que des juifs aient été exterminés n’enlève rien à la souffrance des Palestiniens, tout comme le fait que des Palestiniens aient souffert et continuent de souffrir n’enlève rien à l’horreur vécue par des juifs. Puis et surtout, la reconnaissance de la souffrance des autres ne délégitime jamais votre propre souffrance. Au contraire. »

                  4. La solution du désastre ne peut être confiée à ses responsables israéliens dans l’indifférence au sort des Palestiniens.                                                                                                                          Le 8 octobre 2023, au lendemain de l’attaque du Hamas contre Israël, le quotidien Haaretz, qui sauve l’honneur de la démocratie israélienne, publiait un éditorial affirmant que cette énième guerre était « clairement imputable à une seule personne : Benyamin Nétanyahou », ce premier ministre qui a « établi un gouvernement d’annexion et de dépossession » et a « adopté une politique étrangère qui ignorait ouvertement l’existence et les droits des Palestiniens ».                                                             La droite et l’extrême droite israéliennes ont attisé l’incendie qu’elles prétendent aujourd’hui éteindre par l’extermination militaire du Hamas et l’expulsion des Palestiniens de Gaza. Ce n’est pas un Palestinien qui, en 1995, a assassiné Yitzhak Rabin, portant un coup d’arrêt fatal au processus de paix, mais un terroriste ultra-nationaliste israélien. C’est Israël qui, depuis, sous l’impulsion de Benyamin Nétanyahou, n’a cessé de jouer cyniquement avec les islamistes du Hamas pour diviser le camp palestinien et affaiblir sa composante laïque et pluraliste.

             À l’aune de ces vérités factuelles, largement documentées, notamment par le journaliste Charles Enderlin, la polémique française sur le prérequis que serait la qualification de terroriste du Hamas en tant qu’organisation – et pas seulement de ses actions dont on a souligné le caractère criminel – a quelque chose de surréel. En 2008-2009, faisant écho aux stratégies israéliennes, la présidence de Nicolas Sarkozy n’hésitait pas à défendre la nécessité de « parler » avec le Hamas dont le chef était même interviewé par Le Figaro pour inviter le chef de l’État français à « donner une impulsion vitale à la paix ».                                                       Comble de l’hypocrisie, le Qatar, financier avéré du Hamas avec la tolérance d’Israël, est un partenaire économique, financier, militaire, diplomatique, sportif, culturel, etc., qui est, ô combien, chez lui dans l’establishment français, tout comme d’ailleurs son rival émirati. Or c’est au Qatar que le Hamas tient sa représentation extérieure, avec un statut avoisinant celui d’une antenne diplomatique, digne d’un État en devenir.                                                                    Si des actions du Hamas peuvent être qualifiées de terroristes, c’est s’aveugler volontairement que de ne pas prendre en considération son autre réalité, celle d’un mouvement politique avec une assise sociale. Que sa ligne idéologique et ses pratiques autoritaires en fassent l’adversaire d’une potentielle démocratie palestinienne, qui respecterait le pluralisme des communautés et la diversité des opinions, ne l’empêche pas d’être l’une des composantes, aujourd’hui devenue dominante, du nationalisme palestinien.                                                                                                                                                          La paix demain ne se fera qu’entre ennemis d’hier. Et, surtout, qu’entre peuples qui ne sont pas assimilables à leurs dirigeants. Ce mensonge doublé d’hypocrisie sur la réalité du Hamas et son instrumentalisation par l’État d’Israël souligne l’illusion qui a volé en éclats depuis le 7 octobre. Israël et les États-Unis pensaient reléguer la question palestinienne en pariant sur les États arabes, leurs intérêts à courte vue et leur opportunisme à toute épreuve. Ce faisant, ils oubliaient les peuples qui ne sont pas dupes, s’informent et s’entraident. Grands absents de ces mécanos diplomatiques, où l’on prétend faire leur avenir à leur place, ils finissent toujours, un jour ou l’autre, par en déjouer les plans.                                                                                                                                                Au spectacle des foules proclamant dans le monde leur solidarité avec la Palestine, y compris dans les pays arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël, comment ne pas penser à ces lignes de notre confrère Christophe Ayad qui accompagnent l’exposition de l’Institut du monde arabe « Ce que la Palestine apporte au monde » ? « C’est du monde tel qu’il va mal dont la Palestine nous parle, écrit-il. On l’observe, on la scrute, on l’encourage ou on lui fait la leçon, mais c’est elle qui nous regarde depuis l’avenir de notre humanité. La Palestine vit déjà à l’heure d’un monde aliéné, surveillé, encagé, ensauvagé, néolibéralisé. Les Palestiniens savent ce que c’est d’être un exilé sur sa propre terre. Apprenons d’eux ! »                                                                                 Face aux ombres qui, aujourd’hui, s’étendent, ces réflexions peuvent paraître optimistes. Pourtant, la leçon est déjà là, la seule qui vaille pour éviter le pire, soit cette guerre des monstres dont Benyamin Nétanyahou et le Hamas sont les protagonistes : il n’y aura jamais de paix par la puissance et la force. Devant les défis sans frontières qui nous assaillent, le crédo de la puissance est une impasse quand la conscience de la fragilité est, au contraire, une force."

         Merci à Edwy Plenel

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Le retour du politique

Publié le par Jean-Etienne ZEN

                        Il va falloir s'y faire...

                                         Nous sommes en République! Et le parlement ne peut être une chambre d'enregistrement qui se rangerait servilement derrière les décisions exécutives. Il doit servir à quelque chose en tant que lieu de débats sur les questions de fond, les enjeux concernant l'intérêt général. Dans l'esprit de la Constituante et la Législative, quand s'effaça le pouvoir du Souverain. Dans l'esprit de Montesquieu, selon les exigences de l'Esprit des lois.  Après l'affairisme de Sarkozy, le laxisme de Hollande, le système Jupiter a montré ses limites, la start-up nation ne peut plus être un modèle, la gouvernance par le haut assumé se révèle être un échec, sanctionné par les urnes. Le centralisme à la Kohler, rêve de toute technocratie, doit prendre un nouveau chemin. La députation n'est pas pour le futur chef de l'Etat. Comme il le disait avec hauteur « Etre député, c’est être un soldat, et cette fonction, il la voyait comme trop étriquée pour lui », se souvient l’ex-premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis. A un collègue pressé de connaître ses intentions, l’ambitieux ministre justifiera plus tard, sans ambages, les raisons de ce renoncement : « Le Parlement, ce n’est pas là que ça se passe ! » Ironie de l’histoire, c’est pourtant « là », aujourd’hui, que tout se « passe »…   


                                                                                         Oui, le Parlement, c'est le coeur vivant de la démocratie, là où se décide les choix essentiels, dans un débat constant et libre. On comprend l'incertitude du pouvoir mal élu, même s'il déclarait pour le forme que la pluralité parlementaire est d'une "grande banalité". La confiance officielle règne au milieu des décombres; cette attitude faussement volontariste justifierait-elle l'analyse de " Karl Kraus sur la catastrophe suprême, celle qui rendait possibles toutes les autres, était ce qu'il appelait la «catastrophe des phrases». «Die Katastrophe der Phrasen» est le titre d'une chronique de 1913, dans laquelle l'écrivain autrichien constatait la dégradation du langage qui permet par un effet d'atténuation, de neutralisation et d'euphémisation, de banaliser complètement l'inacceptable. Une phraséologie creuse qui constituait l'apothéose du mode de pensée et de l'écriture journalistiques. C'est ce que Kraus nommait la «pauvreté d'imagination enivrée», qui invente le moment venu le langage dont elle a besoin pour ignorer la réalité de ce qui est en train de se passer..."                                                                                      A l'étranger, perplexe, on s'interroge...                 _______

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Varia

Publié le par Jean-Etienne ZEN

_Surenchère

__ Enfin?

__ Mitage

 

__ Cyber-malaise               

 

__ Feignasses?

__ Taxez-moi...

__ Funambulisme

__ Ça continue...

__ Places fortes

__ Les soutiers

__ Gafams en péril?

__ Medias  toxiques

__ Dépeuplement forcé

__Ruptures chinoises?

__ Compromis difficile

__ Bombe sociale?

__ Action et emplois

__ Airbus et le Kremlin

__ Question de chances?            _______________________________

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Désindustrialisation: une fatalité?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

En France

                      Depuis plus de vingt ans, la France a perdu de nombreux atouts en matière industrielle, par  laxisme ou par conviction néolibérale naïve. Le contexte idéologique de la "mondialisation heureuse", l'impact des croyances à la vertu des marchés et à la valeur des services ont favorisé des abandons de souveraineté que nous payons encore cher aujourd'hui, notamment en matière d'emploi et de formation. Malgré un volontarisme épisodique, comme les appels de Montebourg, la barre n'a pas été redressée, même si l'époque post-covid laisse entrevoir un rebond et des prises de conscience salutaires. Mais nous continuons à payer cher nos erreurs. Nous avons souvent regardé passer les trains et le France fut trop souvent "vendue à la découpe"....avec l'inertie ou la complicité des élites.  Le tournant de 1983 fut un moment clé pour comprendre le virage qui marque encore nos choix.  Cette période et celles qui l'ont précédée et suivie, sont assez complexes à analyser et quelques rappels sont nécessaires:

 

 

Point de vue

                                         "... La France est affectée depuis un quart de siècle par une désindustrialisation massive. Dans La désindustrialisation de la France, 1995-2015 (Odile Jacob, juin 2022), Nicolas Dufourcq, directeur général de la BPI (Banque Publique d’Investissement), s’interroge sur les causes du phénomène et donne la parole à des témoins de premier plan : entrepreneurs, économistes, hauts fonctionnaires.    Ce livre passionnant et dense redonne vie à tout un pan de l’Histoire contemporaine. Il nous invite à bâtir notre opinion à partir des avis souvent opposés des intervenants...     En 2020, la France (68 millions d’habitants) compte 5,3 millions d’ouvriers contre 7 millions il y a 40 ans. Ce sont essentiellement des hommes. 40% seulement d’entre eux, soit environ deux millions, travaillent dans l’industrie. Les autres sont chauffeurs routiers, agents de maintenance, garagistes, etc         Un siècle plus tôt, la France (40 millions d’habitants) comptait six millions d’ouvriers. Ils travaillaient essentiellement dans l’industrie et dans ces années-là, leur nombre dépassait celui des agriculteurs en activité. Il y a un siècle et demi enfin, sous le Second Empire, ils étaient environ deux millions et demi – dont une proportion notable de femmes et d’enfants - pour une population similaire.  .......Ces chiffres illustrent le tête-à-queue de l’industrie française. On voit en effet que son poids relatif dans la population et l’économie est retombé en quarante ans à ce qu’il était à l’aube de la révolution industrielle.                    Les Français prennent conscience de la désindustrialisation à partir de 2008. C’est l’année où la crise des subprimes venue d’Amérique frappe le Vieux Continent. Plusieurs groupes prestigieux ont déjà disparu : « Alstom, mis à terre par l’acquisition ratée des turbines d’ABB en 2003, Pechiney, abîmé par l’acquisition d’American Can, puis racheté par Alcan en 2005, et Arcelor, racheté par Mittal en janvier 2006 ». À ces noms s’en sont ajoutés bien d’autres depuis : Technip, passé aux Américains en 2016, Lafarge repris par le Suisse Holcim en 2015, etc.            Pour le reste, les groupes français font très vite le choix de délocaliser leurs usines sur les marchés émergents (Chine, Brésil) et dans les pays à bas coût (Tunisie, Maroc,…). Ils entraînent avec eux, bon gré mal gré, leurs principaux sous-traitants, ainsi que l’attestent les entrepreneurs interrogés par Nicolas Dufourcq. Ils profitent aussi de la délocalisation pour construire des usines dernier cri qui à Tanger, qui à Wuhan, de sorte que lorsque surviendront des difficultés, ils fermeront en premier lieu les usines françaises, sous-équipées et vétustes !        Les constructeurs allemands délocalisent également mais avec une différence capitale que souligne Nicolas Dufourcq : ils transfèrent en Europe orientale et ailleurs les activités bas de gamme et la sous-traitance ordinaire tout en conservant leurs meilleures machines et leurs activités haut de gamme dans l’usine-mère, où elles sont assurées de disposer d’une main-d’œuvre fidèle et qualifiée.       Du coup, phénomène insuffisamment souligné, « la proportion des capacités industrielles hors du territoire d’origine est aujourd’hui beaucoup plus élevée en France qu’en Allemagne, en Italie ou en Espagne : le poids des ventes des filiales de groupes français à l’étranger représente 2,5 fois la valeur ajoutée industrielle de la France contre 1,3 fois pour l’Allemagne, 1 fois pour l’Italie et 0,5 fois pour l’Espagne. »                       Selon l’auteur Nicolas Dufourcq, libéral bon teint, « tout commence dans les années 1970 » : le premier choc pétrolier est suivi d’une rigidification du droit du travail sous le septennat de Valéry Giscard d’Estaing. L’élection de François Mitterrand en 1981 n’arrange rien : 39 heures, lois Auroux, nationalisations, augmentation des charges patronales, contrôle des prix… « Le modèle social français pèse de tout son poids sur les entreprises ». Les dévaluations permettent de sauver malgré tout leur compétitivité, la dernière intervenant en 1987.       Vient alors le tournant libéral de 1983. Le président Mitterrand choisit de renforcer l’intégration européenne vaille que vaille. « Décidés sans grand débat national, la suppression du contrôle des prix et l’Acte unique de 1986 préparent le marché unique de 1992. (…) C’est aussi l’époque où le concept de politique industrielle prend une coloration péjorative partout en Europe. »                                              Notons qu’en 1994, le Premier ministre Édouard Balladur réunit une commission sous l’égide d’Alain Minc pour réfléchir à la France de l’An 2000. Nicolas Dufourcq en est le rapporteur. Le document final prône l’adaptation du pays à la mondialisation par une politique d’austérité salariale. Jacques Chirac s’engouffre dans la brèche et dénonce la « fracture sociale » qui risque de s’ensuivre. Il sera élu à la présidence de la République.               Jean-Baptiste de Foucauld, commissaire au Plan et véritable âme du rapport Minc, reconnaîtra que le rapport a peut-être péché par trop d'assurance. Il ébauchera une distinction qui n'y était pas : « Dans l'industrie, où les machines coûtent plus cher que les hommes, c'est normal qu'on augmente les salaires ; mais, dans les services, la main-d’œuvre constitue la principale charge. Dans ces secteurs, c'est en allégeant le coût salarial que l'on créera des emplois. » (Libération, 20 avril 1995). C’est peu ou prou la politique que mettra en œuvre en 2003-2005 Peter Hartz… en Allemagne.                                      La fin du siècle est marquée par une forte reprise de la croissance en France. Tous les indicateurs se mettent au vert malgré une hausse des taux d’intérêt due à l’endettement massif de l’Allemagne, qui doit financer la réunification de l’Est et de l’Ouest après la chute du Mur de Berlin. Le gouvernement de Lionel Jospin en profite pour instaurer la semaine de travail de 35 heures (4 heures de moins sans baisse de salaire).        Bien que plébiscitée par les Français, l’initiative arrive au plus mauvais moment. Elle provoque un charivari dans les entreprises et les administrations, cependant que la monnaie unique ouvre la France à la concurrence européenne. Dans le même temps, l’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) la plonge dans le grand bain de la mondialisation.          Pour ne rien arranger, les entreprises de taille intermédiaire (ETI), généralement à caractère familial, se voient gravement pénalisées par l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et les droits de succession. Pour payer leurs impôts, les actionnaires familiaux se voient obligés soit de pressurer l’entreprise pour dégager davantage de dividendes, soit de vendre leurs parts à des groupes étrangers. Il faudra la loi Dutreil de 2003 pour alléger leur fardeau.    Dans cette conjoncture pour le moins compliquée, la palme de l’inconscience est sans conteste remportée par Serge Tchuruk, Pdg d’Alcatel, l’un des fleurons nationaux (120 sites industriels, 150000 salariés dans le monde, numéro un mondial de la fibre optique). Il annonce en 2001 vouloir faire de l’équipementier télécoms une « entreprise sans usines » (fabless) ! Il ne va que trop bien y arriver. Aujourd’hui, l’entreprise n’existe plus.  L’Allemagne, ragaillardie après l’épreuve de la réunification, profite du marché unique et de l’euro pour exporter à tout va.  « À partir de 2003, les parts de marché allemandes à l’export hors de la zone euro explosent littéralement, à un rythme qu’on n’avait jamais vu. (…) Le déficit commercial avec la France se creuse dans la foulée des pertes de parts de marché à l’export. (…) En vingt ans, notre déficit commercial ne va plus cesser de se creuser. Il tangente aujourd’hui les 100 milliards d’euros annuels. Il est de 17 milliards d’euros par an sur le seul franco-allemand depuis quinze ans, dont une part écrasante en biens manufacturiers. » La perte de savoir-faire industriel va de pair avec ce déficit commercial toujours croissant.             Louis Gallois (77 ans) est le dernier des grands patrons qu’a connus la France. Après un passage à la Direction Générale de l’Industrie et dans les cabinets ministériels, aux côtés de Jean-Pierre Chevènement, il a dirigé la Snecma et Aérospatiale avant d’être appelé en catastrophe à la SNCF en 1996 pour sortir celle-ci d’une crise existentielle. En 2007, il a assumé la co-présidence d’EADS. Porté enfin en 2014 à la présidence du conseil de surveillance de PSA Peugeot Citroën, il contribue à sauver le groupe automobile d’une mort assurée.    Nicolas Dufourcq a eu la bonne idée de lui confier la conclusion de son ouvrage en dépit d’une opposition politique et idéologique assumée.       Louis Gallois admet des erreurs dans la politique industrielle de 1981-1983 (échec des plans sectoriels : machines-outils, électronique). Mais il rappelle aussi que les nationalisations ont sauvé de la faillite plusieurs champions français alors très mal en point. Elles leur ont permis de se refaire une santé, avant que les privatisations hasardeuses de 1986 et 1995 ne les remette à l’épreuve.          Mais le virage essentiel est celui de 1983, dit-il : « Mitterrand estimait que la voie du programme socialiste était une impasse et qu’il fallait un nouveau projet. Ce projet était l’Europe. Pour moi, c’était une rupture du contrat. C’était surtout une fuite en avant vers une Europe libérale à l’allemande. Je savais que si on sortait du SME [système monétaire européen], ce serait rugueux et qu’il faudrait mettre tout de suite en place une politique de rigueur à la Trichet, avant Trichet. Il fallait faire une dévaluation interne en plus de la dévaluation externe. C’était coûteux, mais c’était le prix du respect des engagements pris devant les électeurs. Mitterrand a préféré l’Europe, car il a cru qu’elle lui épargnerait cet effort. Ensuite, la décision d’aller vers le marché unique (Acte unique) est passée en douce. Aucun débat n’a eu lieu, ni au Parlement, ni au gouvernement, sur le démantèlement de l’essentiel de la réglementation économique française. »         De manière logique suite à ce virage, la droite libérale l’emporte aux législatives de 1986 et veut en finir avec la politique industrielle. « Quand Madelin est nommé ministre de l’Industrie, il déclare que les industries manufacturières ne sont pas sa tasse de thé, » se souvient Louis Gallois. Le ministre n’en fera que trop la démonstration. L’industriel déplore également les erreurs de l’attelage Chirac-Jospin (1997-2002) : les 35 heures qui ont désorganisé les entreprises et mobilisé les énergies à un moment où elles auraient été nécessaires ailleurs ; l’entrée dans l’euro à une parité trop élevée.  Il affirme très clairement la responsabilité de l’euro dans la désindustrialisation. « Chez Airbus, on vendait nos avions en dollars avec des coûts en euros. (…) Entre 2005 et 2009, au plus haut cours de l’euro, on ne tenait plus. (…) Pour moi, l’euro fort avantage les forts et affaiblit les faibles. » De fait, avec la monnaie unique, on se prive de la fonction d’équilibre que joue une monnaie nationale en sanctionnant tant les excédents que les déficits commerciaux.                                                            Nicolas Dufourcq, qui a pris la direction de la BPI en 2012, veut croire que la désindustrialisation est désormais derrière nous, du fait de quelques mesures correctives sur la fiscalité, les successions, etc. Du fait aussi de la fin de la « mondialisation heureuse » (Alain Minc) illustrée par la pandémie de Covid-19 (pénuries de composants chinois). Du fait enfin de l’action de sa banque. Les chiffres semblent attester de la recréation d’emplois industriels en France. Mais « une hirondelle ne fait pas le printemps. »      Les pénuries de main-d’œuvre, les carences abyssales du système éducatif, autrefois réputé l’un des meilleurs du monde, la démotivation de la jeunesse après la pandémie, l’argent gratuit et le « quoi qu’il en coûte » nous rendent pour le moins sceptiques sur la solidité de cette « réindustrialisation ».  [ Merci à André Larané_____Souligné par moi__]____________

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Renaissance?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Une sortie de l'enfer?

        Si la tendance se poursuit, il se pourrait bien que la Grèce nous étonne par sa remontée des enfers en cours; Relativement. Elle qui fut vilipendée, ostracisée, humiliée, sommée de  se soumettre aux diktats d'une UE qui voulait la mettre à genoux pour ses écarts jugés non orthodoxes aux yeux des banquiers du Nord de l'Europe, les pays qui la jugeaient comme un "paradis" de paresseux, tout juste bon à faire se bronzer sur ses côtes les plus favorisés, sans rigueur budgétaire aux yeux des normes de rigueur  imposées par l'Allemagne notamment. Que faisait d'ailleurs ce pays sans le club des pays industrialisés? certains estimaient qu'on l'avait fait entrer par erreur ou par sentimentalisme. On fit tout pour précipiter sa chute, pour privatiser l'essentiel de ses infrastructures, au nom d'un libéralisme "bien compris", on installa la pauvreté jusqu'au coeur des hôpitaux. Merci Mr Shaüble! On voulut faire un exemple à destination des pays du Sud et ou n'y alla pas de main morte, dans le silence parfois embarrassé de la France notamment. Et puis, il fallait sauver quelques grandes banques "imprudentes"...sur les ruines d'un petit pays exsangue.                               ____Mais voici , nous dit-on, les signes d'un certain renouveau, après les effets dévastateurs de la crise de 2008. si l'on en croit le Monde: Une-chance-de-"redemption"...

 

 

     "...Malgré la terrible récession historique qu’elle a connue, la Grèce est aujourd’hui un pays stable, pro-européen. Alors que l’agence de notation américaine S&P a sorti la Grèce de son statut de junk bond (« obligation pourrie »), c’est-à-dire la catégorie la plus risquée, vendredi 20 octobre, symbole d’un vrai début d’amélioration, le constat mérite de s’y arrêter. Le choc économique a été exceptionnel, de quoi faire émerger les pires noirceurs de l’histoire : la chute du produit intérieur brut (PIB) de 28 % entre 2008 et 2016 a été de la même ampleur que la dépression américaine de 1929, mais elle a duré deux fois plus longtemps. Aujourd’hui encore, l’économie demeure 20 % au-dessous de son niveau de 2007. La population reste très largement plus pauvre qu’elle ne l’était il y a quinze ans, les services publics, en particulier les hôpitaux, sont exsangues et un demi-million d’habitants ont émigré.   « Si je vous avais dit en 2008 que l’économie connaîtrait une telle chute, que notre politique s’approcherait du précipice [en flirtant avec la sortie de l’euro], mais que la société finalement tiendrait, ça aurait été dur à croire », témoigne Dimitri Papalexopoulos, le président du SEV, le patronat grec. A l’écouter, l’expérience de la Grèce est celle d’un pays qui a « essayé le populisme » et qui en est revenu. « Nous avons aujourd’hui l’un des premiers gouvernements postpopulistes, continue M. Papalexopoulos. Kyriakos Mitsotakis [l’actuel premier ministre de centre droit] a été élu en 2019 sur la base de sa compétence et réélu sur sa compétence. »                                                                                                       Ce portrait flatteur du leader du gouvernement grec doit être relativisé. M. Mitsotakis a été éclaboussé pour avoir mis sur écoute des journalistes et des opposants. Un drame ferroviaire qui a fait 57 morts a mis en évidence une administration des chemins de fer encore sclérosée. Son administration a mal fait face aux feux et aux inondations, cet été.   Il n’empêche. Dans un pays qui n’a émergé de la dictature qu’en 1974, il n’était pas difficile d’imaginer un scénario alternatif, où la Grèce serait sortie de l’euro en 2015 et se serait retrouvée, quelques années plus tard, plus ou moins alignée avec la Russie ou la Chine. Rien de tout cela ne s’est produit....."                                Mais la grande pauvreté n'a pas disparu. A Bruxelles on applaudit, mais le chantier reste immense, après la potion amère du néolibéralisme financier laisse encore des traces vives ...  __________________

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Excepionnalisme américain

Publié le par Jean-Etienne ZEN

Une constante et ses variantes

                                    Depuis ses origines pas si lointaines, les petites colonies de l'Est, prémisses de ce qui deviendra plus tard un Etat fédéral, sous l'effet d'une migration de plus en plus  accélérée, connurent un destin particulier, du moins dans son idéologie. Créé de toutes pièces, sur les ruines des peuples autochtones, le noyau des premiers occupants cultiva et transmit une idéologie d'exception, sur la base d'une religiosité dérivée d'un protestantisme européen qui trouva sur ces nouvelles terres le lieu d'un nouveau départ, loin des contraintes et des persécutions de l'ancien continent. Faire du neuf, créer un nouvel espace régénéré, représenter une humanité d'exception en des lieux supposés "vierges", ce fut les modèles qui imprégnèrent l'esprit américain jusqu'à aujourd'hui?                                             Naquit un idéal puritain qui devint peu à peu une idéologie d'Etat et imprégna peu ou prou le "rêve américain". Le poids du religieux connu des hauts et des bas, revenant aujourd'hui en force, à travers les croisades politiques de Bush, le born again, notamment, et les remises en question néoconservatrices d'aujourd'hui en matière de moeurs.   Ce qu'il reste du rêve américain, dans des circonstances variées, malgré ses crises, est toujours bien vivace.   La notion de Destinée manifeste apparut pour la première fois en 1844, dans un article du directeur de la Democratic Review, John O’Sullivan:  « Notre Destinée Manifeste [consiste] à nous étendre sur tout le continent que nous a alloué la Providence pour le libre développement de nos millions d’habitants qui se multiplient chaque année»

 

         Ce mythe et ses variantes furent longtemps un moteur économique et géopolitique, mais fut peu à peu contesté à l'intérieur et à l'extérieur du pays.
   La mobilité, tant vantée,  apparaît comme largement surfaite.
      C'est la fin d'une époque, qui connaît une sorte de déclin, les premiers signes de la fin de l'empire, qui vit à crédit. et qui est de plus en plus porté vers une nouvelle forme d'isolationnisme. Mais pour combien de temps encore? Tant que dureront l'hégémonie. du dollar et de la puissance militaire...
  Comme le fait remarque l'économiste Paul Krugman, la réalité n'a jamais été à la hauteur du rêve américain.   Plus cruellement, Noam Chomsky  souligne la faiblesse d'un rêve de puissance, qui, s'il a réduit sa voilure, n'en finit pas de vouloir s'imposer dans le mondedirectement ou indirectement, physiquement ou symboliquement.     

            Dieu est forcément américain,  et impose une Destinée manifeste ..à ce pays d'exception. (1)

                    « L’Amérique est la seule nation idéale dans le monde […] L’Amérique a eu l’infini privilège de respecter sa destinée et de sauver le monde […] Nous sommes venus pour racheter le monde en lui donnant liberté et justice. » [Woodrow Wilson, cité par Bernard Vincent, La Destinée Manifeste, Messène, Paris, 1999]
         Cela vient de loin, de ses mythes fondateurs.
        Prêt à défendre toutes les causes, surtout pour les évangélistes de combat
    Le Président table rase, libéral désordonné, ne peut se passer de ses services...
Où Dieu va-t-il mener son nouveau serviteur?...
Lui qui a tout prévu, même un survivor...

"Dieu a posé sa main sur Donald Trump ...:


      Trump a prêté serment sur la Bible lors de son inauguration, honorant ainsi la tradition mise en place par George Washington.
       La religion a toujours été importante dans la république américaine. Mais jusqu’aux années 1950, elle était largement séparée de l’Etat, soutient l’historien de Princeton Kevin Kruse dans One Nation Under God. L’adoption de la devise nationale « In God we trust » date ainsi de 1956. Deux ans plus tôt, le Congrès avait fait ajouter au serment d’allégeance l’expression « one Nation under God » (une nation sous l’autorité de Dieu).
         « Ce ne sont pas les Pères fondateurs, mais nos grands-pères qui ont forgé les cérémonies et les formules qui viennent à l’esprit lorsqu’on interroge la nature chrétienne des États-Unis », souligne Kruse. L’idée que les Etats-Unis sont une nation chrétienne a été promue dans les années 1930 et 1940 par des lobbies industriels et commerciaux opposés au New Deal. Ceux-ci considèrent la religion comme une arme puissante dans la guerre contre les promoteurs de l’Etat providence et les communistes. Ils recrutent et financent un clergé conservateur prêchant, non la charité, mais l’enseignement individualiste de Jésus. Ce mélange de chrétienté et de capitalisme s’installe au centre de l’arène politique dans les années 1950 avec l’arrivée d’Eisenhower à la Maison Blanche. Quelques mois avant sa prise de fonction, celui–ci déclare : « Notre façon de gouverner n’a aucun sens si elle n’est pas fondée sur une foi profondément ressentie, peu importe laquelle. » Il acte ainsi la fin de « l’Etat païen » et ouvre la voie à de nouvelles traditions.

         Dans ce contexte de renouveau religieux, la formule « une nation sous l’autorité de Dieu » saisit l’imaginaire national. La formule « In God we trust », empruntée à l’hymne national The Star-Spangled Banner, apparaissait déjà par intermittence, sur les pièces de monnaie depuis le Guerre civile. Elle s’y installe définitivement, ainsi que sur les timbres et les billets de banque, avant de devenir la devise officielle du pays. Quant au célèbre « God Bless America », il est un peu plus récent. Il est popularisé par Ronald Reagan et marque tellement les esprits qu’aujourd’hui aucun homme politique n’envisage plus de terminer un discours sans lui.
[ Books, octobre 2015]        
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Héroïsme contributif?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 C'est le monde à l'envers...                                                                                                                                                              Ils remettent ça, les plus fortunés. Du moins certains...Ce n'est pas la première fois qu'ils se font remarquer en ce sens;  Sens civique?: on peut en douter... Mauvaise conscience, culpabilité ou intérêt bien compris? Il faut dire que la charge de l'impôt leur pèse moins qu'au commun des mortels, même s'ils se plaignent souvent, en faisant valoir leur fonction économique" incontournable" et la légitimité de leurs rétributions qui laissent souvent rêveur. Buffet avouait que sa femme de ménage donnait plus que lui au fisc. Mais il n'est pas toujours cohérent....Tout est question de proportionnalité. "...Les revenus des 75 foyers français les plus riches sont proportionnellement moins imposés que ceux du reste de la population et ne redonnent à l'administration fiscale que 2% de leur fortune en moyenne, souligne une étude de l'Institut des politiques publiques. Les milliardaires ne sont, en effet, imposés qu'à un barème de 26%, en moyenne, contre 46% pour les millionnaires. Comment cela est-il possible tandis que l'impôt en France est censé être progressif, en fonction des revenus ? ..." Qu' en aurait pensé Roosevelt à son époque? 

   Le boulier fiscal n'est plus d'actualité mais on peut toujours contourner la loi, parfois en toute "légalité". De manière simple ou plus sophistiquée: l'évasion fiscale a encore de beaux jours devant elle. _____Ce mouvement de volontarisme  touche d'autres pays, notamment les USA.                                                 Ce serait presque attendrissant. Voilà que de très grosses fortunes de par le monde demandent humblement à être taxés davantage qu'il ne sont actuellement. Quand on sait que beaucoup le sont proportionnellement moins que leur femme de ménage, on peut comprendre...Déjà lors de la crise de 2008, un groupe de philanthro-capitalistes  demandaient au pouvoir d'être imposés en rapport avec leurs revenus stratosphériques. Mais ce ne fut pas suivi d'effets, ils le savaient, et ils se firent ensuite plus discrets, craignant peut-être une nouvelle époque à la Roosevelt, qui pendant la crise de 29 les mit sérieusement à contribution..               Certains cependant persévérèrent à Davos. Cela sentirait-il le sapin ou la révolte, fourches en avant? Les châteaux seraient-ils menacés? La peur pourrait-elle être le commencement de la sagesse?  Ils passent aux aveux, avec parfois quelques accents se sincérité: "...«La plupart d'entre nous peuvent dire que, alors que le monde a traversé d'immenses souffrances au cours des deux dernières années, nous avons en fait vu notre richesse augmenter pendant la pandémie –mais peu d'entre nous, voire aucun, peuvent honnêtement dire que nous payons notre juste part d'impôts», écrivent les signataires. Le groupe soutient que le système fiscal international a créé un manque de confiance entre les gens ordinaires et les élites, ces dernières étant les «architectes de ce système».

 

                                      Mais pas de suite à ces élans de civisme....comme on s'y attendait. L'héroïsme contributif n'a pas la cote au pays des ultra-riches. Et pourtant le temps est venu de combler l'immense fossé qui se creuse entre les extrêmes, ne serait-ce que pour sauver l'économie réelle, en mettant fin au règne des rentiers improductifs.                     ______ "...La confiance – en politique, dans la société, entre nous – ne se construit pas dans de minuscules pièces annexes accessibles uniquement aux plus riches et aux plus puissants. Elle n’est pas bâtie par des voyageurs spatiaux milliardaires qui font fortune grâce à une pandémie, mais ne paient presque pas d’impôts et offrent des salaires médiocres à leurs employés. La confiance se construit par la responsabilité, par des démocraties bien huilées, justes et ouvertes qui fournissent de bons services et soutiennent tous leurs citoyens.    Et le socle d’une démocratie forte est un système fiscal équitable. Un système fiscal équitable.    En tant que millionnaires, nous savons que le système fiscal actuel n’est pas équitable. La plupart d’entre nous peuvent dire que, si le monde a connu d’immenses souffrances au cours des deux dernières années, nous avons en fait vu notre richesse augmenter pendant la pandémie – mais peu d’entre nous, voire aucun, peuvent honnêtement dire qu’ils paient leur juste part d’impôts.    Cette injustice, inscrite dans les fondements du système fiscal international, a créé un manque de confiance colossal entre les peuples du monde et les élites qui sont les architectes de ce système…      Pour le dire simplement, pour rétablir la confiance, il faut taxer les riches. Le monde – tous les pays qui le composent – doit exiger que les riches paient leur juste part. Taxez-nous, les riches, et taxez-nous maintenant.    Aggravée par la pandémie de coronavirus, la montée en flèche de l’inégalité des revenus et des richesses a été au cœur des récents mouvements de protestation de masse en Amérique du Sud, au Moyen-Orient, en Europe, aux États-Unis et ailleurs – des soulèvements populaires qui se sont souvent heurtés à une répression policière brutale.     « Il est temps de corriger les erreurs d’un monde inégalitaire. »       Mais peu d’actes réels ont été faits ces dernières années pour inverser la tendance de plusieurs décennies d’une accumulation de richesses stupéfiantes au sommet et d’une baisse du niveau de vie pour de larges pans de la population mondiale.    Selon une analyse d’Oxfam publiée en début de semaine, les dix hommes les plus riches du monde ont vu leur fortune cumulée augmenter de plus de 1,2 milliard de dollars par jour depuis que la pandémie de coronavirus a frappé il y a deux ans, alors que des dizaines de millions de personnes dans le monde ont sombré dans la pauvreté.  Les défenseurs et les législateurs progressistes soutiennent depuis longtemps que l’augmentation des impôts sur les riches – bien qu’elle soit loin d’être une panacée pour les maux profonds de la société – contribuerait à réduire les inégalités croissantes et à générer des revenus que les gouvernements pourraient consacrer à la réduction de la pauvreté, à la fourniture de soins de santé universels et à la satisfaction d’autres besoins fondamentaux.     Gemma McGough, une entrepreneuse britannique et membre fondatrice de Patriotic Millionaires UK, a réitéré cet argument dans une déclaration mercredi.   « Une valeur commune à la plupart des gens est que si quelque chose n’est pas juste, alors ce n’est pas bien. Mais les systèmes fiscaux du monde entier intègrent l’injustice, alors pourquoi les gens devraient-ils leur faire confiance ? a déclaré McGough, l’un des signataires de la nouvelle lettre. On leur demande d’assumer notre fardeau économique commun encore et encore, alors que les plus riches voient leur richesse, et leur confort, continuer à augmenter. » « Il est temps que nous redressions les torts d’un monde inégalitaire, ajoute McGough. Il est temps de taxer les plus riches."                        ____Certains hyper-privilégiés sentiraient-ils passer le vent du boulet et finiraient-ils par comprendre qu'il est dans leur intérêt de mettre la main à la poche?... quitte à renoncer à l'achat d'un deuxième yacht ou d'une troisième résidence de luxe.   Chiche!           _____________________

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EDF: retour à la normale?

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Re-nationalisation 

                                   C'est le terme utilisé par Mme Borne pour désigner l'opération annoncée pour redonner une  orientation et un avenir à un géant sans lequel rien ne serait possible dans le contexte énergétique actuel soumis à des tensions inédites. Mais que cache cette notion de "nationalisation", dont le contenu n'a pas été toujours très clair, dans les (trop) nombreux projets qui se succèdent depuis une vingtaine d'années , surtout depuis l'ouverture à une concurrence au moins partielle et à une financiarisation qui ne disait pas son nom?                                                                                                Ce ne sera certainement pas un retour au projet de 1946, où le service public devint le maître mot d'une opération sans pareille. En tout cas, la nécessité de sortir de la dictature  des marchés, où le géant de l'énergie s'est plus d'une fois enlisé et endetté, semble une nécessité urgente. Cela ne se "joue pas à la corbeille" disait De Gaulle, qui ne fut guère entendu par Jupiter, obligé maintenant à revenir à plus de raison, après ses tentatives successives pour ouvrir aux capitaux le joyau national...Mais rien n'est clair pour l'instant. "...« EDF était dans le pire des deux mondes. Celui de l'État qui fait ce qu'il veut, peut lui imposer de favoriser ses concurrents ou de racheter General Electrics. Et le pire de la Bourse qui lui impose des misères », estime Jacky Chorin, ancien membre du conseil d'administration d'EDF... En acquérant la totalité des parts, l'État met fin à cette situation, sauve EDF et promet de s'endetter à sa place..."   

                                    Cela semble bien la fin de la folie boursière et des aventures financières hors de nos frontières, sans parler des aventures d'Areva. L'urgence va être de retrouver le sens du métier que les ratés et les contradictions d'aujourd'hui soulignent cruellement. Pas seulement à Flamanville...Il faut arrêter les dérives récentes et mettre un terme à la notion de "rente nucléaire"                                                                                         L'audace et la raison naissent de la nécessité et de l'urgence, au coeur d'une crise durable.  Un défi colossal.         Back to the past?...  Après différents "ouvertures du capital" selon le langage jospinien, serait-ce le retour à la case 1946, celle du bon sens, après des aventures financières scabreuses, le scandale d'Areva , le projet  Hercule  , déjà avorté ... Mr Lemaire, après avoir fustigé les initiatives européennes en matière d'alignement des prix de l'électricité sur celui du gaz,  se dit prêt à remettre les compteurs à zéro, en raison d'une conjoncture problématique en matière énergétique: "Toutes les options sont sur la table" dit-il. Alors?... Faudrait savoir.  "...Le ministre de l’économie, des finances et de la relance, Bruno Le Maire, a déclaré, mardi 15 février, qu’« aucune option (…) ne d[eva]it être écartée » dans la stratégie de l’Etat vis-à-vis d’EDF – y compris une éventuelle nationalisation de l’énergéticien français.    « Aucune option, à partir du moment où on ouvre une nouvelle ère, ne doit être écartée. Il faut toutes les regarder sereinement », a déclaré le ministre sur la radio BFM Business, en réponse à une question sur une nationalisation d’EDF. « Toutes n’appartiennent pas forcément au même calendrier. Mais toutes les options sont sur la table », a encore dit M. Le Maire. En début d’année, son ministère avait plutôt écarté un tel scénario...."                                       __On avait attendu des merveilles des différentes percées libérales sur un marché pas tout à fait comme les autres...Mais c'est devenu un échec patent. Des contradictions manifestes, à l'heure où les grandes puissances s'interrogent sur leur avenir énergétique. Un défi gigantesque. Rien n'est joué. Les incertitudes redoublent. Un virage compliqué.

 


                                                          

 

          "...Ce mardile ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, n’a pas exclu de nationaliser EDF si le besoin s’en faisait sentir. De fait, le faramineux chantier des six EPR annoncé par le chef de l’Etat ne laisse guère le choix à la puissance publique: au contribuable de payer l’atome, le marché se régalera du reste. Le macronisme a cela de fascinant qu’il peut convertir les libéraux les plus endurcis au Gosplan quand nécessité politique et économique font loi. Le 10 février, campé devant une imposante turbine Arabelle à Belfort, le chef de l’Etat sonnait la relance du programme nucléaire français en annonçant la construction de six réacteurs EPR à l’horizon 2035, et une option pour huit de plus. Mardi matin sur BFM Business, mal réveillé mais assez pour sursauter, on a entendu Bruno Le Maire assurer le service après-vente du «chantier du siècle» en répondant par l’affirmative à l’hypothèse d’une nationalisation d’EDF : «Aucune option, à partir du moment où on ouvre une nouvelle ère, ne peut être écartée. Il faut toutes les regarder, sereinement, toutes n’appartiennent pas forcément au même calendrier, mais toutes les options sont sur la table», a déclaré le ministre de l’Economie en pesant chaque mot.  Bien sûr, Le Maire n’a pas explicitement prononcé le mot «nationalisation». Un gros mot pour qui a fait l’essentiel de sa carrière politique dans la case droite néolibérale de l’échiquier. Car qui demandait jusque-là à corps et à cris la nationalisation d’EDF au nom du retour à un vrai service public de l’énergie ? La CGT, le PC, …"           Etonnant, non?             ____Wait and see...comme disait ma grand-mère, qui n'était pas bretonne._________

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Parole d'Israëlienne

Publié le par Jean-Etienne ZEN

 Une voix pathétique, rare et juste

    Loin de appels à la vengeance aveugle, la loi du talion étant porteuse de pires violences encore

"J’ai 19 ans.

Je viens du kibboutz Be’eri.    Le pire – à part entendre les noms des morts, des disparus et des otages – ce n’est pas de se coucher dans un abri sombre. Ce n’est pas d’entendre des coups de feu. Ce n’est pas de recevoir, en temps réel, les notifications de mes camarades du kibboutz, des gens que je connais depuis toujours, demander de l’aide sans que personne ne vienne.             Le pire pour moi – à part les morts, les kidnappés et les otages – a été le moment où je suis sortie, lorsque nous avons été évacués, et qu’il faisait nuit. J’étais pieds nus. J’ai marché sur du verre. Et j’ai vu – sur les visages des gens de mon quartier – partout – la peur. Une peur terrible. Ces visages que je connaissais depuis toujours – je ne les avais jamais vus comme ça. Couverts de larmes. Des gens avec qui j’ai grandi : terrorisés.                                                           La peur circule, là, parmi nous. Je viens d’arriver à la mer Morte. Je vois la peur se promener sur les visages de mes camarades du kibboutz. Ils essaient de continuer à se lever le matin. De tenir le coup. De sourire de temps en temps. Chacun comme il peut.                                       Me relever tous les matins… Il n’y a pas eu beaucoup de matins depuis… Mais me lever… chaque matin… …c’est difficile, très. Ce qui nous est arrivé est, oui, terrifiant. Mais il faut que je dise quelque chose de très important. Ce qui nous est arrivé n’est pas nouveau ; c’est juste pire. On nous a négligé pendant des années, des années. Ne dîtes pas « dôme de fer » – c’est du sparadrap. Ne dites pas « soldats de fer » – c’est du sparadrap. Une personne est en train de mourir et vous lui apportez du sparadrap. Honte à vous. Honte à vous. Ça fait des années, des années que nous en parlons. Vous nous négligez : voilà où nous en sommes. Ce n’est pas nouveau, c’est juste pire. Et ce n’est pas la seule chose dans cette guerre qui n’est pas nouvelle et juste pire.                                                                                                                          J’essaie de trouver les mots, parce que, honnêtement, c’est difficile de les trouver avec toute cette colère et ce chagrin qui me traversent en ce moment. Comment suis-je censée me lever le matin ? Citoyens d’Israël, hommes politiques, personnes à l’étranger – qui que vous soyez je m’en fous – écoutez-moi bien. Comment suis-je censée me lever le matin quand je sais qu’à 4,5 kilomètres de Be’eri, de chez moi, dans la bande de Gaza, il y a des gens pour qui ce n’est pas fini ? Pour moi, c’était fini après 12 heures, parce que j’avais un endroit où me réfugier. Je suis à la Mer Morte dans un hôtel.                                                                                         Ceux qui parlent de vengeance, honte à vous. Oui, c’est vrai, la douleur est immense. Moi, après tout ce que j’ai vécu… à chaque fois que j’entends le mot « vengeance », je m’effondre. Que des gens s’apprêtent à vivre ce que j’ai vécu sans que personne ne vienne les sauver, c’est…

On ne peut pas continuer comme ça, on ne peut pas

Et non : d’autres sparadraps ne résoudront pas le problème. Les gens nous demandent sans cesse : « allez-vous retourner au kibboutz ? », « Croyez-vous pouvoir retourner y vivre sans plus de soldats, plus de protection ? » Ne me parlez pas de soldats. Ne me parlez pas de protection. Parlez-moi de solutions politiques. Depuis des années, nous demandons une solution politique.....". (La suite)...                        

  _____(Rien à ajouter)                                             

  _______________ Le terrorisme vient de loin, avec ses ambiguïtés. On le voit ici. Un souien à un peuple n'est pas une adhésion à une cause. Sinon...                                                    La porte ouverte à toutes les confusions, abondamment instrumentalisées.___________

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